Une grande tolérance à codifier
Le rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté de religion et de conviction, l’expert Ahmed Shaheed, des îles Maldives, a tenu, hier, à Tunis, un point de presse au cours duquel il a présenté les résultats préliminaires d’une mission d’évaluation de la situation en Tunisie dans ce domaine, effectuée du 9 au 19 avril. Il a assuré que sa mission, à la demande du gouvernement tunisien, en tant qu’expert indépendant dans le cadre du mécanisme onusien connu sous le nom de Procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Ces experts sont indépendants par rapport aux Nations Unies et aux gouvernements concernés et travaillent même à titre bénévole.
La conclusion générale à laquelle cet expert indépendant a dit être arrivé est qu’il existe en Tunisie une très grande tolérance en matière de liberté de religion, de conviction et de conscience, ainsi qu’en matière de l’exercice des pratiques religieuses, mais il a insisté sur la nécessité de codifier cette tolérance en l’inscrivant dans des lois conformément à la nouvelle constitution tunisienne de 2014. M. Ahmed Shaheed qui avait été, à deux reprises, ministre des Affaires étrangères de son pays en 2007 et de 2008 à 2010, a qualifié la nouvelle constitution tunisienne de « très progressiste, garantissant à tout citoyen la liberté de conscience et de croyance et le droit au libre exercice des pratiques religieuses ».
Des spécialistes interrogés ont dit partager l’observation de cet expert ajoutant qu’elle reflète l’opinion générale sur le respect de la liberté de religion et de conviction, en Tunisie, et rejoint le point de vue de la grande majorité des intellectuels, universitaires et acteurs de la société civile.
Toutefois, selon cet expert, il reste encore pour la Tunisie quelques défis à relever pour hisser sa législation au niveau des standards internationaux en matière de liberté de religion, de conviction et de l’exercice des pratiques religieuses. Il a noté qu’en l’absence d’une telle codification, il a été constaté que des notions comme le maintien de l’ordre public ou encore la préservation des bonnes moeurs ont été invoquées pour restreindre les libertés individuelles en matière de pratiques religieuses comme à l’occasion du mois de ramadan, en se fondant sur certaines dispositions constitutionnelles stipulant que l’etat a en charge la protection de la religion. Il a signalé aussi l’interdiction de constituer des associations sur la base de la religion, mais ce choix est justifié, car, en Tunisie, il est également interdit de créer des partis politiques à vocation religieuse, dans le but de mettre la religion à l’abri des exploitations et des instrumentalisations louches.