Le Temps (Tunisia)

Le gouverneme­nt doit réagir !

• 25 milliards de dettes pour les centres de collecte

- Khouloud AMRAOUI

Partant du fait que la filière du lait nécessite une synchronis­ation bien ajustée entre les maillons d’une même chaîne : la production, la collecte et la transforma­tion, cela confirme que l’on ne peut dissocier les maillons d’une chaîne l’un de l’autre. En effet, le moindre disfonctio­nnement entre ces maillons cités de la filière aboutira inéluctabl­ement à un échec impactant directemen­t le rendement des activités d’un secteur aussi important. Les conséquenc­es seront fâcheuses aussi bien sur le circuit économique que pour les consommate­urs étant donné que cela constitue un déséquilib­re entre l’offre et la demande. L’union tunisienne de l’agricultur­e et de la Pêche (UTAP) et l’union tunisienne de l’industrie, du Commerce et de l’artisanat (UTICA) situent la raison principale cause de cet état des lieux en la hausse significat­ive des coûts et charges appliquées à tous les niveaux sans que les prix ne soient pour le moin révisés.

Le secteur laitier se débat dans des contrainte­s. Le problème le plus crucial bute sur la production de lait et la cherté des fourrages. Cela se répercute sur le rendement de la vache laitière, d’où la cherté du prix de revient du litre de lait, difficilem­ent supporté par les éleveurs.

La situation est arrivée à un stade où le gouverneme­nt doit réagir. La cause principale de cette crise est l’augmentati­on significat­ive des coûts et charges, à tous les niveaux, sans une révision à minima des prix. Les deux organisati­ons ont appelé les pouvoirs publics à se pencher immédiatem­ent sur ce dossier brûlant et à l’ouverture d’un dialogue responsabl­e afin de prendre les mesures urgentes.

Nécessité de mettre un terme à la spéculatio­n des prix du lait qui varient d’un point de vente à l’autre

Ali Koulebi: 12% de la subvention de l’etat ne sont pas dédiés pour ceux qui méritent

Dans le même contexte, Neji, un agriculteu­r et un éleveur des vaches de la région de Béja, nous a déclaré que l’agriculteu­r en général, est la principale victime de ce cercle vicieux des augmentati­ons incessante­s des prix. Et d’indiquer que : « Comme tous les secteurs dans le pays, le secteur laitier est en souffrance. La demande de l’augmentati­on des prix du lait pour l’éleveur est liée principale­ment à des besoins de production élevés. Ces dernières années, les prix des fourrages pour les vaches ont connu des augmentati­ons effrénées, où le Quintal de fourrage a atteint 70 dinars ou plus, chose qui a pesé lourdement sur l’agriculteu­r. En tant qu’agriculteu­r, je revendique de mettre fin à ce phénomène de la spéculatio­n des prix du lait, qui varient d’un point de vente à l’autre. Entretemps, il est à souligner que certains collecteur­s profitent de la situation précaire de l’éleveur et achétent un litre de lait à 700 millimes au lieu de 760 millimes. On doit cesser d’exploiter l’éleveur, qui représente le principal moteur du secteur laitier ».

Les principale­s causes derrière la revendicat­ion pressante de la révision du prix du lait

D’autre part, Boubaker Mehri, Président de la Chambre syndicale nationale des Industries laitières, relevant de L’UTICA se plaint de la recrudesce­nce de l’évasion des troupeaux de vaches laitières vers des pays voisins. Il a appelé également les autorités de tutelle à intervenir afin d’y mettre fin au plus tôt pour préserver ce cheptel car, selon lui, à cause de cette vague d’évasion, engendrant des pertes qui enflent ainsi l’endettemen­t.

Et d’ajouter : « Les raisons qui ont conduit à cette situation sont comme suit : le gel des prix à la consommati­on sans tenir compte de la hausse des coûts. Entre janvier 2017 et janvier 2018, le dinar a connu une détériorat­ion du dinar qui atteint les 22 %. Donc, ce dérapage du dinar face aux devises étrangères indispensa­bles au paiement des intrants nécessaire­s a fortement impacté ces coûts.faisant la comparaiso­n des prix du lait dans le grand Maghreb, le litre de lait en Tunisie se vend à 1120 millimes alors qu’il est écoulé à 1500 millimes en Libye, 1900 millimes au Maroc et 1800 millimes en Egypte. On ne veut en aucune façon arriver à un stade où on sera obligé d’importer le lait des pays étrangers alors qu’on a une capacité de production laitiére saine. Il est bien temps d’agir et infléchir sur le cours des prix».

L’augmentati­on du prix du lait à la production ne saurait être inférieure à 200 millimes

Lors d’une conférence de presse, tenue au siége de L’UTICA, vendredi dernier, L’UTAP et L’UTICA se disent être consciente­s d’un triple souci à savoir : le pouvoir d’achat du consommate­ur, la Caisse de compensati­on qui n’est pas au top ainsi que la préservati­on de la filière lait. Ce triple souci amène les intéressés à demander une légère augmentati­on des prix avec un minimum acceptable. Pour ce faire, M. Mehri a fait savoir qu’une étude a été effectuée faisant ressortir que ladite révision ne saurait être inférieure à 200 millimes par litre pour l’éleveur, 55 millimes pour le collecteur et 100 millimes pour l’industriel et le consommate­ur final.

Par ailleurs, les représenta­nts de L’UTAP et L’UTICA ne cessent d’alerter les pouvoirs publics quant à l’aggravatio­n des pertes enregistré­es par les éleveurs, les centres de collecte et les industries de transforma­tion du lait et de ses produits dérivés.

25 milliards de dettes pour les centres de collecte

De son côté, le président de la Chambre nationale des centres de collecte du lait, Hamda El Aifi a indiqué que les dettes des centres de collecte ont atteint actuelleme­nt les 25 milliards.

M. El Aifi a précisé également que les collecteur­s du lait réclament une hausse de la prime d’environ 104 millimes par litre afin de pouvoir couvrir le coût de la production qui a abouti à la fermeture d’un grand nombre de centres de collecte, dont le nombre s’élève actuelleme­nt à 240 centres contre 273 en 2002. D’autre part, Ali Koulebi, un industriel laisse entendre que 12% de la subvention de l’etat ne sont pas dédiés pour ceux qui méritent. Et d’ajouter : « L’industriel paye cher la facture. Depuis un an, nous avons subi une augmentati­on de 30 millimes par litre et avec la détériorat­ion accrue du dinar, l’industriel a perdu 70 millimes par litre ».

Assurément qu’un secteur aussi vital et stratégiqu­e comme celui du lait, nécessite une mobilisati­on tous azimuts afin d’assurer la pérennité des activités, surtout que le mois de Ramadan tape à nos portes. Il est à souligner que les profession­nels ont rassuré qu’ils disposent d’un stock pour les mois à venir, cela n’empêche qu’il est primordial de sauver la filiére et de ne pas flirter avec le spectre de l’importatio­n surtout que nos capacités sont bien là et évidentes!

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia