Le Temps (Tunisia)

Un sommet, des espoirs

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Atmosphère tendue garantie ce mardi à l'hôtel Capella à Singapour. Le sommet historique entre le fantasque président américain Donald Trump et son jeune homologue nordcoréen Kim Jong-un sur la dénucléari­sation de la péninsule coréenne risque de se terminer en queue de poisson, en guerre nucléaire mondiale ou, tout simplement, en un gigantesqu­e barbecue. Toutes les options sont permises pour ce sommet, plusieurs fois annoncé et confirmé pour être annulé ensuite. C'est dire que cette rencontre entre les deux plus étranges et imprévisib­les chefs d'etat dans le monde peut capoter à tout moment et donner lieu à une issue absolument délirante. Même si, côté coréen, le ton est austère, sérieux, concentré sur de nombreux dossiers, pas seulement sur la dénucléari­sation de l'île, mais également sur l'aprèsaccor­d avec Washington, s'il est obtenu. Car, du côté américain, tout est possible, même le départ de Trump en pleine réunion. Le président américain, qui a donné un avant-goût de ses ‘'trumperies'' après la réunion catastroph­ique du G7 au Canada, qui s'est terminée en queue de poisson, si ce n'est en une volteface absolument renversant­e du locataire du bureau ovale, peut tourner casaque au dernier moment dans ses discussion­s avec le dirigeant coréen pour un petit détail. Et replonger le monde, l'humanité, dans une autre période d'incertitud­es. Car il n'est pas évident que le président nord-coréen, qui a fait toutes ses études en Suisse, ne sache pas l'enjeu d'une telle rencontre et, surtout, ce qu'elle permet comme perspectiv­es d'ouverture tous azimuts pour son peuple, longtemps maintenu dans un isolement total du reste du monde. L'accord de Kim à cette rencontre en dépit des multiples volte-face de Trump est un gage que dans le camp coréen tout est mis en oeuvre pour une grande ouverture sur le monde, avec la fin de la menace du nucléaire. Par contre, le danger est plutôt du côté américain, puisque Washington, sous l'ère Trump, consacrera des centaines de milliards de dollars à un vaste programme nucléaire, quand il l'interdit pour l'iran et Pyongyang.

Le sommet Trump-kim, sécurisé par les Népalais du Gurkhas, la police d'élite de Singapour, pourrait dès lors déboucher sur une fin de la confrontat­ion entre les deux Etats et l'avènement d'un accord historique qui fera entrer la Corée du Nord par la grande porte dans le reste du concert des nations. Mais, beaucoup, après la mésaventur­e des Européens du G7, doutent en réalité des véritables intentions du président américain. Un homme imbu de son pouvoir, narcissiqu­e comme pas un et capable d'annuler, en montant les escaliers d'air Force One, un accord qu'il a paraphé quelques minutes plus tôt. Les chefs d'etat membres du G7, douchés après la réunion de La Malbaie au Canada, en savent quelque chose. Et sont parvenus à une seule conclusion, celle qui veut que le président américain est plus imprévisib­le qu'un bulletin météo.

Mais, dans l'entourage des présidents américain et coréen, on compte sortir au moins avec une bonne poignée de main, à défaut d'un difficile accord sur la dénucléari­sation de la Corée du Nord. D'abord pour dégeler les relations entre les deux Etats, ensuite pour amorcer un long processus de rapprochem­ent, même si la personnali­té de Trump est une donnée à géométrie variable. Quant aux deux sentinelle­s de ce sommet, la Chine et la Russie, elles restent résolument derrière Kim Jongun. Une sorte de gage et de garantie pour que les Etats-unis ne fassent pas ce qu'ils veulent, partout dans le monde, et surtout ne prennent goût à cet inquiétant comporteme­nt du président US d'insulter et ridiculise­r ses pairs.

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