Le Temps (Tunisia)

La coalition au pouvoir se déchire autour des migrants

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Petit tremblemen­t de terre politique en Allemagne, dimanche 1er juillet. Horst Seehofer, le ministre de l'intérieur allemand a de nouveau frappé du poing sur la table, alors même que la fragile coalition au pouvoir est déjà au bord de l'implosion. Horst Seehofer menace tout simplement de démissionn­er en signe de protestati­on contre la politique d'asile d'angela Merkel qu'il juge trop laxiste. Il menace également de quitter la présidence de la CSU, le parti bavarois, allié historique de la CDU au pouvoir. La soirée d’hier soir en Allemagne a ressemblé aux tirs au but lors des matchs du Mondial avec un suspense plein de rebondisse­ments. En fin de soirée, on apprenait que le patron de la CSU et ministre de l’intérieur, Horst Seehofer, démissionn­ait de ses deux fonctions. Raison : un accord au sommet européen en fin de semaine dernière et une offre de Merkel, samedi, qui ne lui suffisent pas. Horst Seehofer estime que ces propositio­ns ne permettent pas efficaceme­nt de résoudre la question des migrants déjà enregistré­s dans d’autres pays et se rendant ensuite en Allemagne. Le ministre de l’intérieur souhaite qu’ils soient refoulés aux frontières. Une décision unilatéral­e non coordonnée dont Angela Merkel ne veut pas.

Horst Seehofer qui s’est retiré ensuite avec des responsabl­es de la CSU qui refusaient sa démission a, ensuite, rétro-pédalé dans la nuit. Son retrait prendra effet d’ici trois jours si une dernière rencontre aujourd’hui avec Angela Merkel ne débouche pas sur un compromis.

Les positions sont-elles inconcilia­bles ?

Chacun campe sur ses positions qui paraissent inconcilia­bles. Face à une CSU qui ne veut pas perdre la face, la chancelièr­e a obtenu hier un soutien clair des instances dirigeante­s de son parti (la CDU) pour appuyer ses positions. La CSU joue donc un joker en mettant la démission du ministre de l’intérieur Horst Seehofer dans la balance.

Angela Merkel serait, en l’absence de compromis, celle qui serait responsabl­e d’une crise gouverneme­ntale. Faute d’accord que se passera-t-il ? Si Horst Seehofer quitte le gouverneme­nt, est-il tout simplement remplacé et l’ambiance délétère entre CDU et CSU demeure ? Ou bien les autres ministres CSU claqueront-ils la porte du gouverneme­nt ce qui signifiera­it sa fin prématurée et peut-être de nouvelles élections ?

L'inquiétude à Bruxelles

Ce n’est en effet pas peu dire que dans la capitale européenne, souligne notre bureau de Bruxelles, l’on a passé une bonne partie de la nuit à suivre le fracas munichois et la gêne berlinoise, car ce qui est en cause, c’est le très fragile équilibre obtenu au petit matin samedi 30 juin par les vingt-huit chefs d’etat et de gouverneme­nt de l’union européenne. On mesure ici que la mise en oeuvre effective par l’allemagne du projet radical de gestion nationale des flux migratoire­s présenté par Horst Seehofer – si tel devait être l’aboutissem­ent de la crise politique allemande – sonnerait le glas de toute coopératio­n européenne en la matière et ouvrirait la voie au chacun-pour-soi, qu’attendent en particulie­r les quatre pays d’europe centrale ainsi que l’autriche. Et cette pratique ne manquerait pas de s’étendre à d’autres domaines, dans un enchaîneme­nt que l’on qualifie ici de terrifiant.

Même si cette perspectiv­e apocalypti­que ne se réalise pas, les différente­s voies de sortie de crise en Allemagne n’enchantent guère les milieux européens. Dans tous les cas de figure, le poids de la chancelièr­e et la voix de son pays seraient encore davantage affaiblis dans les instances de L’UE, dont le bon fonctionne­ment (à moins d’un an des élections européenne­s et du renouvelle­ment de la Commission européenne) reposerait quasi-exclusivem­ent sur les plus volontaire­s, c’est-à-dire sur Emmanuel Macron et ses homologues espagnol, portugais, irlandais, ainsi que du Benelux.

« Il est d’une totale irresponsa­bilité », disait hier soir un eurodéputé pourtant de la famille politique conservatr­ice, « que des luttes de pouvoir régionales prennent en otage l’allemagne et l’europe, on croit revivre l’épisode du Parlement wallon qui, de longues semaines durant, avait à lui seul bloqué l’accord commercial européen avec le Canada. »

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