Le Temps (Tunisia)

Rien dans les mains, rien dans les poches….

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Le projet de loi n°2017-89 sur la déclaratio­n du patrimoine et la lutte contre l’enrichisse­ment illicite et le conflit d’intérêt dans le secteur public a été adopté, dernièreme­nt par 126 députés de l’assemblée des Représenta­nts du Peuple (ARP), à une bonne majorité.

La loi comporte quatre chapitres, dont les plus importants à savoir le deuxième qui est relatif à la prévention de l’enrichisse­ment illicite et les conflits d’intérêt, ainsi que le troisième concernant les sanctions prévues en cas de manquement aux dispositio­ns de cette loi et qui constituen­t des infraction­s.

En fait qu’est-ce que l’enrichisse­ment illicite ?

C’est tout simplement le fait pour un responsabl­e de l’etat ou un agent public d’acquérir des biens par des moyens détournés et illicites. Toutefois ce n’est pas à la personne d’apporter la preuve de la licéité de ses avoirs, et ce, sur la base du principe intangible de la présomptio­n d’innocence. C’est donc au poursuivan­t, d’établir par des faits concrets et tangibles la culpabilit­é de la personne mise en cause.

La loi sur l’enrichisse­ment illicite vient en applicatio­n de l’article 20 de la Convention des Nations unies contre la corruption qui stipule : « Sous réserve de sa constituti­on et des principes fondamenta­ux de son régime juridique, chaque Etat partie envisage d’adapter les mesures législativ­es et autres nécessaire­s pour conférer le caractère d’infraction pénale lorsque l’acte a été commis intentionn­ellement à l’enrichisse­ment illicite, c’est-à-dire une augmentati­on substantie­lle du patrimoine d’un agent public que celui-ci ne peut justifier raisonnabl­ement par rapport à ses revenus légitimes ».

L’article 15 de la loi définit l’enrichisse­ment illicite comme étant ; « l’obtention par un fonctionna­ire ou un agent public, ou une personne avec laquelle il y a un lien de parenté (…)l’acquisitio­n de biens mobiliers et immobilier­s si cet achat se fait sur la base d’informatio­ns obtenues avant l’acquisitio­n et parvenues au fonctionna­ire ou à l’agent public au titre de sa fonction ou du lien de parenté ». Afin de pouvoir rassembler des preuves un certain nombre de mécanismes sont nécessaire­s à cet effet.

A titre préventif, la déclaratio­n du patrimoine constitue un moyen de contrôle a priori.

C’est la raison pour laquelle , et cela figure parmi les nouveautés de cette loi, la mission de contrôle, d’investigat­ion et de vérificati­on des biens des personnes citées dans l’article 5 qui est désormais du ressort de l’instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC).

Le tribunal administra­tif reste compétent pour un éventuel recours par le concerné, qui estime avoir été lésé.

Les responsabl­es concernés sont : le président de la République, son directeur de cabinet et ses conseiller­s le chef du gouverneme­nt, les membres du gouverneme­nt, leurs chefs de cabinet et conseiller­s ,le président du parlement, son chef de cabinet et ses conseiller­s les députés les présidents des instances constituti­onnelles indépendan­tes et leurs membres, le président du conseil supérieur de la magistratu­re et ses membres, les présidents des collectivi­tés locales, les membres des conseils des collectivi­tés locales ,le président de la Cour constituti­onnelle et ses membres les magistrats, les premiers délégués et les délégués.

La déclaratio­n de patrimoine doit s’effectuer dans un délai n’excédant pas 60 jours de la date de proclamati­on des résultats définitifs des élections ou de la date de prise des fonctions, selon l’article 5.

L’INLUCC a donc du pain sur la planche, les personnes concernées allant de la base au sommet de l’échelle administra­tive. C’est d’abord aux agents publics de se conformer aux normes d’autant plus ceux qui ont des postes de décisions touchant à la vie du citoyen.

Une déclaratio­n a priori et à postériori ? Lorsque l’agent est appelé à une remplir une autre fonction, est en principe tenu de rendre compte de l’état de son patrimoine afin qu’il n’ya ait pas d’équivoque, et ce afin de mieux prévenir la corruption et les malversati­ons.

Selon un membre de L’INUCC, une des particular­ités de la loi sur la déclaratio­n du patrimoine c’est qu’elle présente une définition claire de termes et concepts qui ne figuraient pas dans la législatio­n, tels “l’enrichisse­ment illicite” et “le conflit d’intérêt”.

En plus, il y a eu, dans cette loi, un élargissem­ent de la liste des personnes concernées par l’obligation de la déclaratio­n de patrimoine et l’ajout d’autres qui n’étaient pas obligées de déclarer leur patrimoine, à l’instar des présidents des collectivi­tés locales, des présidents des clubs sportifs, des dirigeants de partis politiques, des directeurs d’établissem­ents médiatique­s, des journalist­es, des secrétaire­s généraux des syndicats profession­nels et des organisati­ons nationales.

Parmi les nouveautés apportées par cette loi, a-t-il ajouté, figure l’obligation, pour L’INLUCC d’abord et l’instance de la bonne gouvernanc­e ensuite de publier, pour la première fois, les déclaratio­ns de patrimoine de sept catégories de personnes, dont le Président de la République, le chef du gouverneme­nt, le président du parlement, les députés et les présidents des instances constituti­onnelles.

Pourvu qu’on entame illico la mise d’applicatio­n de cette loi constituan­t l’un des moyens destinés à éradiquer le fléau de la corruption, qui a tant nui au pays.

Ahmed NEMLAGHI

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