Riadh engage le bras-de-fer contre des possibles sanctions
Disparition du journaliste Khashoggi
Acculée dans ses derniers retranchements, après les dernières révélations relatives à l’assassinat du journalistesaoudien Jamal Khashoggi, l’arabie saoudite tient tête au président américain et a promis dimanche de riposter à d’éventuelles sanctions après la menace de «châtiment sévère» proférée par le président Donald Trump, en cas d’implication avérée de Ryad dans la disparition du journaliste.
Cette disparition au retentissement planétaire pourrait avoir un impact significatif sur le programme de réformes, surtout économiques, mises en avant par le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane. Dimanche, la Bourse de Ryad a accusé une baisse de plus de 7%, sa plus grave dégringolade en trois ans, avant de terminer la séance à -3,5%. Samedi, Donald Trump, un grand allié de l’arabie saoudite, a pour la première fois estimé possible l’implication de Ryad dans la disparition de Jamal Khashoggi, entré le 2 octobre dans le consulat de son pays à Istanbul pour ne plus réapparaître depuis.
«Nous rejetons entièrement toute menace ou tentative d’affaiblir (le royaume), que ce soit via des menaces d’imposer des sanctions économiques ou l’usage de pression politique», a déclaré un haut responsable saoudien non identifié, cité par l’agence de presse saoudienne SPA.
Si des sanctions sont appliquées, le royaume répondra avec de «plus grandes» sanctions, a averti ce responsable. «L’économie du royaume a un rôle vital (...) pour l’économie mondiale».
L’ambassade d’arabie saoudite à Washington a quant à elle diffusé un communiqué pour souligner que le royaume «exprime sa reconnaissance à tous ceux qui s’abstiennent de tirer une conclusion hâtive sur l’enquête en cours, y compris l’administration américaine». Des responsables turcs avaient affirmé que le journaliste avait été assassiné dans le consulat par des agents saoudiens. Ryad affirme qu’il a quitté le bâtiment.
Paris, Londres et Berlin ont demandé une «enquête crédible». «Défendre la liberté d’expression et une presse libre, et assurer la protection des journalistes sont des priorités essentielles pour l’allemagne, le Royaumeuni et la France», ont déclaré dans un communiqué commun les ministres des Affaires étrangères de ces trois pays.
Le journaliste assassiné est un critique du prince héritier Mohammed ben Salmane, qui collaborait notamment avec le Washington Post et vivait exilé aux Etats-unis depuis 2017.
Nouvelles défections wpour le «Davos du désert»
Les dirigeants des fonds d’investissement Blackstone et Blackrock et de la banque américaine JP Morgan ont à leur tour décidé de se retirer du «Davos du désert», une conférence internationale sur l’investissement qui aura lieu du 23 au 25 octobre à Ryad.
Ces défections interviennent dans le contexte de l’affaire Jamal Khashoggi, du nom du journaliste saoudien porté disparu depuis qu’il s’est rendu, le 2 octobre dernier, au consulat d’arabie saoudite à Istanbul.
A Londres, une source proche du sujet a annoncé à Reuters que Larry Fink, le PDG de Blackrock, le premier gestionnaire de fonds au monde, avait finalement décidé de ne pas participer à la Future Investment Initiative. Stephen Schwarzmann, son homologue chez Blackstone, a pris une décision identique, rapporte la chaîne CNBC.
Dimanche soir, la banque JP Morgan et le constructeur automobile Ford Motor Co en avaient fait de même. Les deux sociétés n’ont pas fourni les raisons des annulations décidées par Jamie Dimon et Bill Ford.
Mais depuis que l’affaire Khashoggi a éclaté, plusieurs entreprises des secteurs des médias, de la technologie et de la finance ont décidé de ne pas participer à cette conférence économique destinée à attirer des investissements dans le royaume.
Le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, a également annoncé vendredi qu’il n’irait pas à Ryad. Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a toujours l’intention de s’y rendre mais prendra sa décision sur la foi des derniers développements de l’enquête, faisait-on valoir dimanche à la Maison blanche. Jamal Khashoggi a disparu à Istanbul le 2 octobre après une visite au consulat de son pays.
Sa fiancée assure qu’il n’est pas ressorti du consulat saoudien. Selon des sources proches des services de sécurité turcs, il y a été tué par une équipe d’une quinzaine de Saoudiens repartis le jour même dans leur pays.
Selon le quotidien turc Sabah, des enregistrements effectués grâce la montre connectée du journaliste laissent supposer qu’il a été torturé et tué.
Ryad dément formellement et a accepté de participer à l’enquête.
Les retombées de cette affaire ont fait tomber lundi le rial saoudien à un plus bas de deux ans et les emprunts du royaume ont fléchi de crainte de voir une réduction des investissements étrangers en réaction à la disparition du journaliste Jamal Khashoggi.