«Que je reste ou que je parte, cela ne revient qu’à la décision du ministre»
Achref Chargui (Directeur des JMC)
Musicien et prof universitaire, Achref Chargui a débuté dans l’organisation des événements et des festivals en tant que directeur artistique en 2010 avec la première soirée du Rap tunisien. Puis se sont enchaînés le festival de la musique acoustique unplugged (2012), Roots and Sprouts (2013), le festival Founoun al Bouhayra (2016), le festival Layeli Assalhia (2016), le festival El Jem world music (2017). Mohamed Zinelabidine, ministre des Affaires culturelles, lui offre la direction des Journées Musicales de Carthage (JMC) pour deux éditions, soit 2018 et 2019. Deux éditions ? Des rumeurs circulant au sein dudit ministère annoncent son remplacement, donnant trois noms à sa succession : Anis Klibi, Samir Becha et Fakher Hakima. L’intéressé, déjà victime de propos racistes de la part de Ezzedine Ayachi et du directeur de la Troupe nationale de Musique Mohamed Lassoued, n’a reçu aucune notification de la part du ministre et continue à préparer la prochaine édition des JMC.
Le Temps : Des bruits courts que vous seriez débarqué de la tête des JMC 2019, suite à des plaintes d’artistes et à une mauvaise gestion. Qu’en est-il ?
Achref CHARGUI : Je n’ai aucune idée de ces rumeurs. Puis, que je reste ou que je parte, cela ne revient qu’à la décision du ministre. Mais je tiens à préciser que ma tâche était essentiellement la mise en place d’un projet et d’une vision artistique. Le reste de la gestion était à la charge des agents de l’etablissement National pour la Promotion des Festivals et des Manifestations Culturelles et Artistiques (ENPFMCA) : contrats, logistique, transport, sécurité. Je salue leurs efforts… D’autre part, il y a aussi l’équipe technique de la Cité de la Culture, qui a assuré toutes les activités du festival. Donc, il est tout à fait normal que l’on rencontre quelques problèmes d’organisation avec cette diversité d’intervenants. Nos amis artistes et invités ont été conscients de la difficulté de ce challenge. Nous avons pris note des points de vue et nous les prendrons en considération pour améliorer la prochaine édition.
Si ces bruits s’avèrent réels, quelle serait votre réaction ?
Je souhaiterais bonne chance au prochain directeur, continuerais mes projets et partagerais mon petit savoirfaire avec d’autres organismes en dehors de la Tunisie.
Comment JMC 2018 ? se sont déroulées les
Les journées Musicales de Carthage est une importante expérience dans mon parcours artistique. Cette édition m’a vraiment marqué sur tous les plans. Et c’est grâce à l’ambition, la soif de la réussite, et l’unité de ma petite équipe de jeunes que nous avons pu surmonter toutes les difficultés et réussir à mettre en place ce projet.
Oui, c’était une édition difficile quand on a des idées et une vision artistique originale dans un poste qui est très envié et convoité… et surtout quand trois directeurs se sont succédé à la tête de L’ENPFMCA, qui est notre vis-à-vis administratif durant la période des préparatifs entre février et septembre…
Ma stratégie de travail se basait sur l’analyse des points défaillants des éditions précédentes et l’originalité du contenu en utilisant des outils de gestions professionnels de grand projet, SWAT, mindmanager et copyice… Un nouveau slogan «De la place pour tout le monde». Trois pôles d’activités. D’abord artistique, avec six compétitions (kids, live bands, pop.tn, virtuoses, Rap et hiphop, musique électronique), accompagné par des concerts, les soirs, qui affichaient complets, tels que ceux de Tarak al Arabi Tarkan, Lucky Peterson, Murat Sakaryali, Trio Bollywood, David Vendetta, Orakle, et une soirée hommage à Hassan Dahmani.
Le deuxième pôle d’activités était le marché international de l’industrie de la musique avec nombre d’exposants et un large meeting des promoteurs et des directeurs du secteur musical, avec une série de conférences sur la bonne gouvernance de la culture et l’art, et la création de la ligue digitale du développement de l’art. Le troisième était le premier symposium international de l’oud. Une nouvelle stratégie de communication a était mise en place avec la création du concept «le collectif des journalistes». Bilan des JMC 2018 : 20 pays invités, 256 candidats pour la première fois dans l’histoire des Journées, dont 49 ont concouru aux compétitions, la participation remarquable de 17 détenus musiciens de la prison de Borj Erroumi. Plus que 300 retombées presse locale et internationale. Le festival a bénéficié d’environ 200 mille dinars d’entrées en nature et argent, et c’est grâce à nos partenaires.
Si vous êtes maintenu à la tête des JMC, comment voyez-vous la prochaine édition ?
Sachez que la visio et le projet JMC 2019 sont déjà prêts. Et tous ceux qui me connaissent peuvent vous confirmer que je vais lever la barre, très haut. Je vais, encore plus, aller dans l’utilisation de la technologie, et la création de plateforme et des start-up utiles pour l’industrie artistique.
Au sortir des JMC 2018, vous avez été victime de propos racistes de la part de certains «artistes». Que s’est-il passé ?
Il est vrai que j’ai remarqué d’une vague de jaloux et des propos de quelques personnes qui n’ont même pas assisté au festival et ont contribué à salir l’image des JMC. Effectivement, j’ai été victime de propos racistes et d’incitation à la haine de la part de quelques pseudo «artistes», à savoir Ezzedine Ayachi et Mohamed Lassoued, directeur de la Troupe nationale de Musique, et cela sur le réseau social Facebook. J’ai chargé un avocat de l’affaire et j’ai déposé une demande auprès de L’ENPFMCA, mon vis-à-vis, afin que des mesures nécessaires soient prises. Mais, jusqu’à présent, il n’y a eu aucune réaction de la part de cet établissement.
Vous avez participé à différents événements d’importance sur le continent : Visa for music (Maroc), MASA (Côte d’ivoire), et, plus récemment, Ségou’art (Mali). Qu’en retenez-vous ?
J’ai eu la chance d’être invité à ces différentes manifestations culturelles et d’autres. Ce que je retiens c’est cette solidarité avec peu de moyens et cet engagement de tous les responsables, les artistes musiciens et les organisateurs pour un seul but : la réussite de l’événement, image de leur pays.
Je suis en train de construire une plateforme digitale pour le développement de l’art, et cela avec le soutien de mes partenaires africains. Grâce à ce genre de rencontres, j’ai pu trouver des soutiens et des encouragements pour construire ce projet,
Il faut noter que, généralement, la participation tunisienne est très faible à ce genre de manifestations malgré son utilité surtout pour le développement du marché de l’art et de l’industrie de la musique mondiale.