Le Temps (Tunisia)

Les élections en Israël et le processus de paix

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Le processus de paix palestino-israélien est presque totalement absent de la campagne pour les élections législativ­es en Israël, prévues le 9 avril. Les négociatio­ns avec les Palestinie­ns et la paix au Proche-orient n’ont plus de place ni dans les pro¬grammes des partis politiques israéliens, ni dans les débats sur le prochain scrutin. Ce qui en dit long sur les priorités de la classe politique et de l’opinion publique en Israël.

A commencer par le premier ministre et son parti le Likoud (droite), favoris des élections. Benyamin Netanyahu est favo¬rable à gérer le conflit avec les Palestinie­ns plutôt que de le résoudre, au moins à court et moyen termes. Le principal parti d’opposition, Résilience d’israël (centre), dirigé par l’ancien chef d’étatmajor de l’armée Benny Gantz a, quant à lui, gardé le silence presque total sur le sujet, alors que le chef du Parti tra¬vailliste (centre gauche), Avi Gabbay, est resté vague sur ses intentions. D’autres partis mino¬ritaires du centre gauche, comme celui de Hatnua, dirigé par Tzipi Livni, soulignent la nécessité d’engager des négociatio­ns avec l’autorité palestinie­nne du prési-dent Mahmoud Abbas, dans le but de se séparer des Palestinie­ns. Cette séparation est présentée comme étant un intérêt majeur pour l’avenir d’israël, afin de se défaire du danger que pose la croissance démographi­que des Palestinie­ns et de préserver le caractère juif de l’etat. Seule la «liste commune », un parti palestino-israélien dirigé par Ayman Odeh, évoque les droits du peuple palestinie­n et l’oppres¬sion qu’il subit sous le gouverne¬ment de Netanyahu. La tendance à négliger le pro¬cessus de paix et à le déclasser dans l’échelle des priorités des politiques israélienn­es ne date pas d’aujourd’hui. Elle était observable aux dernières législa¬tives de 2015. A cette époque, la recherche de la « paix » entre Palestinie­ns et Israéliens s’est estompée dans le jargon des par¬tis politiques israéliens.

Cette absence d’intérêt et de débat sur le sort du processus de paix avec les Palestinie­ns, qui traduit une volonté politique israélienn­e de geler toute recherche de paix, s’est appro¬fondie au cours de l’actuelle campagne électorale pour diverses raisons. La première est que, contrairem­ent aux législa¬tives précédente­s, l’actuel prési¬dent américain, Donald Trump, ne fait pas de pression sur Israël pour qu’il relance les négocia¬tions sur le statut définitif des Territoire­s palestinie­ns. Trump a inversemen­t mis en suspens son initiative de paix, qu’il avait appelée « marché du siècle», jusqu’au lendemain des élections en Israël, au lieu de presser Netanyahu d’aller de l’avant, à l’instar des anciens présidents Bill Clinton et Barack Obama. La conjonctur­e dans le monde arabe depuis 2011 est également en partie responsabl­e de cette situation. La propagatio­n des conflits armés et de l’instabilit­é politique et sécuritair­e dans plu¬sieurs pays arabes, dont certains sont centraux pour un règlement de la question palestinie­nne, a réduit la pression sur Israël et, par conséquent, rendu moins pressant à ses yeux la recherche de la paix avec les Palestinie­ns. Les gouverneme­nts israéliens sous Netanyahu ont en profité pour imposer leur vision qui est de reporter à l’infini une solu¬tion, tout en imposant sur le ter¬rain des faits accomplis qu’ils entendaien­t irréversib­les.

Cette situation risque de se poursuivre à en croire les son¬dages d’opinion en Israël, don¬nant la victoire à Netanyahu au prochain scrutin. Ces sondages montrent que le parti du premier ministre, le Likoud, recueille beaucoup plus de soutien que n’importe quelle autre formation et que les partis politiques qui composent la coalition actuelle gagneront suffisamme­nt de sièges pour former le prochain gouverneme­nt. Dans les son¬dages où l’on demande aux Israéliens qui est le mieux quali¬fié pour diriger le pays, Netanyahu occupe la première place pour une raison compré¬hensible: il se démarque de tous ses rivaux en matière de sécurité.

Un seul challenger est toutefois susceptibl­e de le menacer sur ce terrain: Benny Gantz. Nouveau visage dans la politique israé¬lienne, doté d’une excellente car¬rière militaire, il est l’antidote idéal contre la fatigue des élec¬teurs israéliens de Netanyahu. Même les partisans de ce dernier, qui pensent que les différente­s tentatives de le poursuivre pour des accusation­s de corruption sont motivées par des raisons politiques, s’inquiètent de la pos¬sibilité d’un premier ministre avec un éventuel acte d’accusa¬tion pesant sur lui. Quant aux électeurs de gauche qui détestent le chef du Likoud et ne suppor¬tent plus son maintien au pou¬voir, ils pourraient voter « utile », en faveur de Gantz, juste pour se débarrasse­r de Netanyahu qui, s’il est réélu, battra le record de longévité de David Ben Gourion en tant que premier ministre d’is¬raël…

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