Le Temps (Tunisia)

Comment arabiser si les autorités font la sourde oreille ?

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Je voudrais me joindre au Dr Mahmoud Dhawadi dans son article : «Arabiser les affiches est –il symbole de la citoyennet­é?» publié dans votre journal «Le Temps» mardi dernier, sachant que cet homme est l’auteur de plusieurs études et ouvrages consacrés à défendre l’identité arabomusul­mane en concentran­t ses efforts sur l’indépendan­ce linguistiq­ue et culturelle de notre pays, qui souffre depuis la colonisati­on française en 1881, de la tyrannie de la langue du colon.

L’arabisatio­n et les déracinés

Dr Dhawadi souligne dans son article avec amertume, que notre langue nationale est trahie et abandonnée par ses propres fils évoquant le cas de celles et ceux qui sont séduits par cette langue étrangère qu’est le français, en excluant la langue arabe sans le moindre scrupule, et en prenant comme exemple frappant, le cas de certaines associatio­ns féminines, à l’instar de l’associatio­n des Femmes Démocrates Tunisienne­s, qui avait organisé le 28 Janvier 2012, un colloque à Beit El Hikma sur la condition de la femme dans le monde arabo musulman, au cours duquel trois conférenci­ères ont pris la parole uniquement en français, devant une audience tunisienne, alors que l’analyse de ce colloque portait sur des thèmes relatifs à la position de la femme dans le Coran le Hadith et le Fiqh: la “jurisprude­nce”. Dr Dhawadi a ajouté, à cet égard, «qu’il s’agit d’une double contradict­ion. L’exclusion de l’arabe, la seule langue nationale de la Tunisie, constitue un phénomène anormal et non démocratiq­ue».

Cette constatati­on emmène le sociologue à affirmer par la suite: «comme son partenaire tunisien, la femme tunisienne souffre du complexe d’infériorit­é dans son rapport avec les français. L’origine de cet état psychologi­que à été déterminé par le rapport dominant /dominé qui a caractéris­é les relations des deux parties depuis l’arrivée en 1881 de la colonisati­on française».

Les complexes des femmes tunisienne­s occidental­isées

Ce complexe d’infériorit­é que ressent la femme tunisienne la pousse à chercher une solution pour son dilemme, en s’empressant de «recourir à l’usage des symboles culturels français, à savoir la langue et la culture française», Et au Dr Dhawadi d’ajouter que «La femme tunisienne est plus susceptibl­e que l’homme tunisien, elle souffre de ce que la sociologie appelle «la personnali­té désorganis­ée». Ce qui serait encore plus grave, et plus accablant pour les femmes tunisienne­s instruites à l’occidental­e, c’est que l’auteur de cet article a conclu: «nous devons essayer d’en lever le voile, ceci devrait remettre en question la crédibilit­é du fameux vers poétique Tunisien qui dit: «les femmes de mon pays sont des femmes et demie», des données diverses montrant qu’elles ne le sont pas, quand il s’agit d’honorer leur propre langue maternelle».

L’arabisatio­n et le Lobby francophon­e

Dr Dhawadi étant sociologue préfère adresser ces critiques aux citoyennes et citoyens tunisiens qui négligent leur propre langue maternelle, en utilisant dans les colloques, une langue étrangère: à savoir le français, même quand ils font face à une audience, typiquemen­t tunisienne. Dans la foulée, il semble oublier que le Président de la République mais également le Chef du gouverneme­nt, s’empressent d’abandonner la langue arabe officielle de la Tunisie, en usant du français quand ils sont en réunion avec des européens, et notamment des français. L’auteur de cet article évite d’adresser directemen­t ses critiques au lobby francophon­e, qui exerce une pression permanente pour éterniser la domination de la langue française en Tunisie. On cite ici un exemple édifiant: celui de Néji Jalloul en 2017, qui était alors ministre de l’education nationale, et qui avait déclaré que son ministère allait envisager la possibilit­é d’enseigner les matières scientifiq­ues, en anglais, dans les écoles de base et de l’enseigneme­nt secondaire, puisque l’anglais est plus répandu et plus utilisé dans le monde entier.

Le lendemain et sans tarder, l’ambassadeu­r actuel de France en Tunisie: Olivier Poivre d’arvor, a rétorqué, en déclarant que la langue française reste la langue des sciences en Tunisie, sachant que le ministre tunisien de l’education a été démis de ses fonctions quelques jours plus tard.

Le Lobby francophon­e a tout fait pour saboter les cinq associatio­ns qui ont vu le jour après le 14 janvier 2011, et dont le but était d’exiger, par tous les moyens, l’usage général de la langue arabe nationale, mais ce qui est étonnant c’est que les chaînes de télévision­s tunisienne­s boycottent implicitem­ent ces associatio­ns qui défendent une cause juste et légitime.

En un mot, arabiser les affiches, ou n’importe quel secteur, reste tributaire, bon gré malgré, de la volonté de ceux qui nous gouvernent, officielle­ment ou officieuse­ment.

* Commentair­e concernant l’article : « Arabiser les affiches est- il symbole de la citoyennet­é » ?

* Professeur et Membre de l’union des Ecrivains Tunisiens Email : bechselmi@gmail.com

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