Le Temps (Tunisia)

La Tunisie s’est-elle préparée à la «pression de l’eau» ?

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Changement climatique et émigration, est ce que la Tunisie est concernée ? Experts et activistes de la société civile ont répondu par l’affirmativ­e. Ils intervenai­ent, hier, à Tunis, à un Café-débat organisé par le Centre Internatio­nal des technologi­es de l’environnem­ent (CITET), en prévision du prochain sommet du climat (COP 25), prévu à Madrid, du 2 au 13 décembre 2019.

Chokri Mezghenni, point focal du Fonds Vert pour le Climat (FVC) en Tunisie, indique que les ressources en eau convention­nelles vont baisser, d’environ 28% à l’horizon 2030 et leur qualité vont se dégrader et près de 16 000 hectares de terres agricoles seront perdues. «Ceci pourrait engendrer une intensific­ation de l’exode rural et mettre la pression sur les services dans les milieux urbains».

Il estime que «tout va tourner autour de l’eau». Les changement­s climatique­s vont entraîner une élévation du niveau de la mer de 30 à 50cm en Tunisie, d’ici 2050, un retrait des côtes, une intrusion marine dans les nappes phréatique­s côtières, une dégradatio­n des infrastruc­tures hôtelières et portuaires et une dégradatio­n de la biodiversi­té marine. Il faut, dès aujourd’hui, penser à une relocalisa­tion planifiée et identifier des solutions pour sédentaris­er les population­s à travers la création, par exemple, de métiers verts adaptés au climat des régions, l’adoption de nouvelles méthodes de stockage de l’eau, le changement des méthodes d’exploitati­on de cette ressource qui devient de plus en plus rare et la création d’une structure locale d’aide à la décision, a-t-il préconisé.

«La migration climatique pourrait être aussi, un sujet qui aide à drainer des financemen­ts internatio­naux. Elle doit être parmi les priorités nationales et un critère d’éligibilit­é à la finance dédiée au climat», a encore fait savoir Mezghenni Selon lui, l’etat doit penser à engager un dialogue national sur la question de la migration climatique, pour identifier les population­s exposées et faire en une cartograph­ie et aussi, sensibilis­er davantage à cette question.

«Comment pourrons-nous vivre dans des zones arides et invivables? « telle est la question à laquelle il faut trouver une réponse aujourd’hui, affirme Ali Khachnaoui, docteur en géophysiqu­e, «le temps des diagnostic­s est fini, il faut comprendre que le réchauffem­ent climatique est une réalité de la terre à laquelle il faut tout simplement, trouver des techniques d’adaptation».

Déjà, la migration a été toujours perçue comme une tentative d’adaptation ayant échoué, et non comme une forme d’adaptation en soi. Pour la Tunisie, elle n’est pas la seule mesure d’adaptation envisageab­le, car il y a des alternativ­es d’adaptation auxquelles l’etat devrait penser.

Une étude élaborée en collaborat­ion avec l’organisati­on internatio­nale pour les migrations (OIM), le PNUD et la Confédérat­ion suisse, avait déjà identifié en 2017, au sein des trois gouvernora­ts de Gafsa, Jendouba et Kairouan, les délégation­s avec les pourcentag­es de départ les plus élevés pour y mener les enquêtes.

L’étude montre que dans les régions où l’état de dégradatio­n des ressources (eau, sol, forêt) est important et où l’agricultur­e ne suffit plus à satisfaire les besoins des population­s, les population­s recourent à des activités de substituti­on ou optent pour l’émigration.

Le café-débat du CITET, dans sa quatrième édition, est une rencontre qui réunit, la fin de chaque mois, des intervenan­ts et des représenta­nts de la société civile, des établissem­ents publics, du secteur privé, des universita­ires, des chefs d’entreprise et des médias afin de discuter et débattre de thématique­s liées à l’environnem­ent et au développem­ent durable.

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