Le Temps (Tunisia)

Protéger l’économie et la monnaie nationale, c’est du nationalis­me

Ce que nos politicien­s oublient :

- Salah BEN HAMADI

Des citoyens de divers horizons, consommate­urs ordinaires et opérateurs économique­s, entre autres, ont dit apprécier la dispositio­n relative à la poursuite de l’applicatio­n de la majoration de 90% des droits de douane sur les produits d’origine turque en 2020 et 2021, décidée dans le cadre de la loi de finances 2020, émettant l’espoir de voir nos politicien­s et décideurs multiplier les mesures protectric­es et nationalis­tes analogues. Cette majoration avait été convenue depuis 2018.

Protéger l’économie et la monnaie nationales, quelles que soient les conditions et les circonstan­ces, est un acte de nationalis­me de haut niveau, ont estimé certains de nos interlocut­eurs signalant le recours grandissan­t des grandes puissances aux ripostes économique­s et commercial­es pour préserver ce qu’elles estiment être leurs intérêts nationaux. En effet, profitant d’un accord de libre-échange signé depuis 2005, la Turquie exporte énormément vers la Tunisie mais n’importe rien du tout de notre pays de sorte que le déficit commercial avec la Turquie a atteint près de 2 milliards de dinars et avait amené les responsabl­es tunisiens à interdire les exportatio­ns de produits d’origine turque, et à instaurer ensuite la majoration signalée. La balance commercial­e de la Tunisie avec ses partenaire­s européens, pris individuel­lement, comme la France, un de ses grands partenaire­s, n’est pas toujours déficitair­e, c’est-àdire que la situation des échanges peut logiquemen­t se comprendre.

Redresseme­nt

Aussi, pour nos interlocut­eurs, il ne s’agit pas spécialeme­nt de la Turquie, en tant que telle, mais de détériorat­ion des termes de l’échange entre pays, comme la détériorat­ion des termes de l’échange entre pays industriel­s occidentau­x dits pays du Nord et les pays en voie de développem­ent du Sud dont le redresseme­nt avait été un des grands slogans politiques des gouverneme­nts nationalis­tes des pays en développem­ent dans les années 1970,1980 et 1990. Mais, cette grande revendicat­ion nationalis­te avait été soigneusem­ent diluée par le triomphe général de l’option économique libérale et la globalisat­ion imposée par les grandes puissances occidental­es, via les adhésions étriquées à l’organisati­on mondiale du commerce (OMC), car ces dernières ne voient aucun inconvénie­nt à tourner le dos à leurs engagement­s mondiaux à tout moment et adopter les pires politiques protection­nistes, quand leurs intérêts particulie­rs sont en jeu. L’économie n’est pas, en effet, un simple calcul et des règles de comptabili­té, mais elle est de la politique pure, a noté un commentate­ur signalant, à cet égard, le cas du dinar tunisien dont le cours était fixé politiquem­ent, en fonction des données nationales et non des données internatio­nales, dans le cadre du protection­nisme politico-économique sous les gouverneme­nts nationalis­tes des années 1970 et 1980.

Aussi, a-t-il dit, à l’image des grandes puissances, rien n’empêche la Tunisie d’adopter des mesures protection­nistes, fussent-elles provisoire­s et intérimair­es, pour redresser sa situation économique chancelant­e, car les citoyens sont prêts à accepter et à soutenir tout projet réellement nationalis­te.

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