Béances de la mémoire et de l’imaginaire
Réalisé par Kaïs Chekir, « Rebelote» est le dernier film comique qui a vu le jour depuis « Farda walkatokhtha ». De manière assez fine, le réalisateur traite les déboires d’une société en crise où la joie se mêle à l’amertume pour critiquer une Tunisie pré et postrévolutionnaire.
Réalisé par Kaïs Chekir, « Rebelote » est le dernier film comique qui a vu le jour depuis « Farda walkatokhtha ». De manière assez fine, le réalisateur traite les déboires d’une société en crise où la joie se mêle à l’amertume pour critiquer une Tunisie pré et postrévolutionnaire. Les jeux incarnés par Jaafar Guesmi, Bassemhamraoui et Karim Gharbi témoignent de l’obscurantisme et de l’hypocrisie sociale dans laquelle sombrent ces personnages.
En fait, vivant un déséquilibre flagrant, ces derniers souffrent de l’ignorance et du manque d’instruction qui les amène à commettre des fourberies démesurées. Les figures féminines, quant à elles, reflètent l’insouciance et l’inconscience d’une certaine catégorie qui court, à n’importe quel prix, derrière l’assouvissement des besoins. Si aigue qu’elle soit, la critique d’une société névrotique, artificielle, générée par des lois superficielles que l’on n’applique point, est assimilée à un rire plaisant et amusant.
C’est ce qui a attiré le public, curieux de découvrir ce qui se cache derrière les esprits absorbés par les appartenances religieuses et politiques. Le réalisateur y associe des figures incompatibles pour mieux faire éclater les tensions qu’elles véhiculent : du croyant à l’escroc, de l’extrémiste à l’homosexuel, et c’est là où réside, effectivement, l’harmonie du jeu. Le film s’organise comme un ensemble d’images disposées sur un axe où la durée et l’ordre initial sont affectés par des troubles obscurs. Cependant, le passage d’un tourbillon tragique et maléfique, par le biais d’un phénomène naturel mystérieux qui paralyse les êtres, affecte leurs âmes pour enfin leur procurer une béatitude enchantée qui se présente comme un simulacre visant à chambouler la vie du trio qui figure sur l’affiche publicitaire du film. « Mes amis et moi venons d’atterrir, déclare une jeune fille à la sortie de la salle, ce film est un couteau à double tranchant : il est tantôt poignant, tantôt drôle. Nous avons erré pendant deux heures dans un large labyrinthe sans pourtant perdre nos repères ». D’autres ont, à leur tour, validé l’accès du film ; autrement dit, ce film s’imprègne certes de la réalité mais s’épargne de la médiocrité et de la vulgarité récurrente, c’est une arme qui conscientise et éveille les esprits ensevelis pour signaler haut et fort les injustices, les caprices et les vices d’une société boiteuse. « Rebelote »prouve parfaitement la valeur esthétique et thérapeutique de l’art cinématographie, en perpétuelle lutte contre l’indicible et l’insaisissable… Mais, en dépit du succès, connu dès son apparition, certains usent de leurs idées préconçues et jugent mal le film avant de le voir ou, pour ainsi dire, de le savourer. A ces derniers, nous disons que l’affiche ne reflète pas le contenu et qu’il serait préférable de fréquenter les salles de cinéma tunisiennes en vue de booster les talents des réalisateurs et artistes tunisiens et d’encourager davantage la production artistique.