Tous les artistes ne sont pas précaires
Après le confinement et sur fond de débat sur le statut des artistes, plusieurs questions se posent à l’opinion publique. Comment soutenir les artistes les plus fragiles ? Comment faire évoluer l’écosystème culturel vers une plus grande maturité économique ? Et aussi comment en finir avec certaines fausses précarités ?
S’il est une vérité absolue, c’est bien celle selon laquelle tous les artistes ont besoin de soutien, d’appui, de mécènes. La pratique artistique est en effet une prise de risque, une quête permanente et un processus créatif qui souvent, emprunte des méandres fort ardus.
Après le confinement et sur fond de débat sur le statut des artistes, plusieurs questions se posent à l’opinion publique. Comment soutenir les artistes les plus fragiles? Comment faire évoluer l’écosystème culturel vers une plus grande maturité économique? Et aussi comment en finir avec certaines fausses précarités?
S’il est une vérité absolue, c’est bien celle selon laquelle tous les artistes ont besoin de soutien, d’appui, de mécènes. La pratique artistique est en effet une prise de risque, une quête permanente et un processus créatif qui souvent, emprunte des méandres fort ardus.
Plusieurs professions culturelles sont précaires
L’état répond à beaucoup de situations et le secteur privé apporte aussi des contributions importantes pour résoudre au moins en partie, cette difficile équation du financement de la culture et du soutien aux artistes. Seulement, ces derniers ont des profils multiples et des métiers très différents. Du concepteur d’un projet aux techniciens qui participeront à sa création, les intervenants sont nombreux et diversifiés. Les postures sont totalement différentes: un poète, un plasticien, un cinéaste et un danseur ne sont pas dans des dynamiques comparables et ne sont pas astreints aux mêmes approches économiques.
D’autre part, tous les artistes ne possèdent pas cette étincelle de génie qui fait toute la différence. On trouve comme partout ailleurs, une vaste classe moyenne qui produit des oeuvres à son image, sans atteindre une transcendance particulière. Les oeuvres de génie ne courent pas les rues et, même si leurs auteurs sont aisés, il est du devoir de la communauté de les soutenir dans leur démarche. En d’autres termes, l’équation économique ne se pose pas de la même manière pour un Abdelaziz
Gorgi ou un Nouri Bouzid, une personne qui a la peinture pour hobby, un technicien du cinéma et un autodidacte qui vit laborieusement de son art. Toutes les situations sont différentes mais tous les artistes sont essentiels dans la mesure où ils contribuent à la production culturelle d’un pays.
Que le nombre des artistes précarisés soit très important, ne fait aucun doute. Toutefois, certaines précarités sont trompeuses. Ces dernières semaines, alors que des mécanismes d’appui se mettaient en place, on a pu constater que, malgré les intentions et les discours, il y avait des bénéficiaires d’aides qui n’avaient rien à voir avec la précarité. Que certaines personnes sans soucis financiers, disputent à des gens dans le besoin, de maigres subventions, est en soi scabreux. Que ces personnes soient des artistes reconnus dans leur discipline et portent des projets véritables, ne change rien à la donne. Moralement, ils se devaient de ne pas faire le pas et entrer en concurrence avec de véritables précarités et des artistes qui ne parviennent pas à joindre les deux bouts. Le plus grave étant que dans un contexte de de crise absolue, ce sont toujours les mêmes qui tendent la main et reçoivent des subventions dont ils n’ont pas besoin. Alors que l’intention sociale de certaines initiatives nées durant le confinement était évidente, elles ont été fourvoyées par les mêmes précarités odieuses qui sont de tous les festins et toutes les aumônes. En outre, sur un autre plan, certaines aides dont le montant ne dépassait pas les 200 dinars, étaient clairement insuffisantes et devraient être complétées sans délai.
De tous les festins et toutes les aumônes
Il est tout de même étrange de voir certaines pointures de notre vie culturelle être à ce point incapables d’empathie. Alors que de nombreux artistes sont dans le besoin, personne dans l’establishment culturel ne leur a tendu la main. Pire, tout en se défaussant sur l’état et les mécènes, ces artistes au coeur défaillant n›ont pas hésité, pour certains, à disputer de maigres ressources aux jeunes créateurs ou aux vrais précaires. C›est présenter leurs candidatures pour certaines bourses, qui est moralement discutable dans le contexte actuel. Aujourd’hui, plus que jamais, il est temps de mettre fin à certaines boulimies d’argent qui font que quelques artistes installés tendent à truster la quasi-totalité des ressources disponibles. Quitte à ce que de nombreux professionnels ne puissent jamais sortir la tête de l’eau. On doit apprendre à refuser aux spécialistes de la subvention ce qui est dû à d’autres, ce qu’ils monopolisent depuis trop longtemps et ce qui doit revenir aux professionnels en difficulté. Ceci serait moralement élémentaire pour les bailleurs de fonds, notamment ceux qui agissent pour le compte du secteur public.