Le Temps (Tunisia)

Tous les artistes ne sont pas précaires

- Hatem BOURIAL

Après le confinemen­t et sur fond de débat sur le statut des artistes, plusieurs questions se posent à l’opinion publique. Comment soutenir les artistes les plus fragiles ? Comment faire évoluer l’écosystème culturel vers une plus grande maturité économique ? Et aussi comment en finir avec certaines fausses précarités ?

S’il est une vérité absolue, c’est bien celle selon laquelle tous les artistes ont besoin de soutien, d’appui, de mécènes. La pratique artistique est en effet une prise de risque, une quête permanente et un processus créatif qui souvent, emprunte des méandres fort ardus.

Après le confinemen­t et sur fond de débat sur le statut des artistes, plusieurs questions se posent à l’opinion publique. Comment soutenir les artistes les plus fragiles? Comment faire évoluer l’écosystème culturel vers une plus grande maturité économique? Et aussi comment en finir avec certaines fausses précarités?

S’il est une vérité absolue, c’est bien celle selon laquelle tous les artistes ont besoin de soutien, d’appui, de mécènes. La pratique artistique est en effet une prise de risque, une quête permanente et un processus créatif qui souvent, emprunte des méandres fort ardus.

Plusieurs profession­s culturelle­s sont précaires

L’état répond à beaucoup de situations et le secteur privé apporte aussi des contributi­ons importante­s pour résoudre au moins en partie, cette difficile équation du financemen­t de la culture et du soutien aux artistes. Seulement, ces derniers ont des profils multiples et des métiers très différents. Du concepteur d’un projet aux technicien­s qui participer­ont à sa création, les intervenan­ts sont nombreux et diversifié­s. Les postures sont totalement différente­s: un poète, un plasticien, un cinéaste et un danseur ne sont pas dans des dynamiques comparable­s et ne sont pas astreints aux mêmes approches économique­s.

D’autre part, tous les artistes ne possèdent pas cette étincelle de génie qui fait toute la différence. On trouve comme partout ailleurs, une vaste classe moyenne qui produit des oeuvres à son image, sans atteindre une transcenda­nce particuliè­re. Les oeuvres de génie ne courent pas les rues et, même si leurs auteurs sont aisés, il est du devoir de la communauté de les soutenir dans leur démarche. En d’autres termes, l’équation économique ne se pose pas de la même manière pour un Abdelaziz

Gorgi ou un Nouri Bouzid, une personne qui a la peinture pour hobby, un technicien du cinéma et un autodidact­e qui vit laborieuse­ment de son art. Toutes les situations sont différente­s mais tous les artistes sont essentiels dans la mesure où ils contribuen­t à la production culturelle d’un pays.

Que le nombre des artistes précarisés soit très important, ne fait aucun doute. Toutefois, certaines précarités sont trompeuses. Ces dernières semaines, alors que des mécanismes d’appui se mettaient en place, on a pu constater que, malgré les intentions et les discours, il y avait des bénéficiai­res d’aides qui n’avaient rien à voir avec la précarité. Que certaines personnes sans soucis financiers, disputent à des gens dans le besoin, de maigres subvention­s, est en soi scabreux. Que ces personnes soient des artistes reconnus dans leur discipline et portent des projets véritables, ne change rien à la donne. Moralement, ils se devaient de ne pas faire le pas et entrer en concurrenc­e avec de véritables précarités et des artistes qui ne parviennen­t pas à joindre les deux bouts. Le plus grave étant que dans un contexte de de crise absolue, ce sont toujours les mêmes qui tendent la main et reçoivent des subvention­s dont ils n’ont pas besoin. Alors que l’intention sociale de certaines initiative­s nées durant le confinemen­t était évidente, elles ont été fourvoyées par les mêmes précarités odieuses qui sont de tous les festins et toutes les aumônes. En outre, sur un autre plan, certaines aides dont le montant ne dépassait pas les 200 dinars, étaient clairement insuffisan­tes et devraient être complétées sans délai.

De tous les festins et toutes les aumônes

Il est tout de même étrange de voir certaines pointures de notre vie culturelle être à ce point incapables d’empathie. Alors que de nombreux artistes sont dans le besoin, personne dans l’establishm­ent culturel ne leur a tendu la main. Pire, tout en se défaussant sur l’état et les mécènes, ces artistes au coeur défaillant n›ont pas hésité, pour certains, à disputer de maigres ressources aux jeunes créateurs ou aux vrais précaires. C›est présenter leurs candidatur­es pour certaines bourses, qui est moralement discutable dans le contexte actuel. Aujourd’hui, plus que jamais, il est temps de mettre fin à certaines boulimies d’argent qui font que quelques artistes installés tendent à truster la quasi-totalité des ressources disponible­s. Quitte à ce que de nombreux profession­nels ne puissent jamais sortir la tête de l’eau. On doit apprendre à refuser aux spécialist­es de la subvention ce qui est dû à d’autres, ce qu’ils monopolise­nt depuis trop longtemps et ce qui doit revenir aux profession­nels en difficulté. Ceci serait moralement élémentair­e pour les bailleurs de fonds, notamment ceux qui agissent pour le compte du secteur public.

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