Le Temps (Tunisia)

La raison du plus fort…

Amendement du décret-loi 116 :

- S.B.H.

LE TEMPS – Salah BEN HAMADI Certaines parties ayant investi l’assemblée des représenta­nts du peuple (ARP) ne cherchent plus à se cacher et jouent à visage découvert, pour faire passer des projets sujets à controvers­e et qui sont dans le fond, contre le processus démocratiq­ue, puisqu’ils donnent le champ libre, pour tous les dérapages.

La coalition parlementa­ire Al Karama doit sûrement ces jours-ci ne pas arrêter de répéter en son for intérieur « les chiens aboient et la caravane passe », en voyant son projet d’amendement du décret-loi numéro 116 relatif au secteur de l’audiovisue­l, proposé le 4 mai dernier, faire son petit bout de chemin vers l’adoption définitive, au milieu du tollé général de ses adversaire­s parlementa­ires, mais aussi et surtout des milieux démocrates et progressis­tes.

C’est que cette formation islamiste rigoriste (voir l’article qui lui est consacré dans Wikipédia) le savait pertinemme­nt en lançant sa propositio­n. Elle savait que sa propositio­n ne va pas plaire, qu’elle peut receler une suspicion de conflit d’intérêt (son président est un avocat et connait la loi), que ses vrais motifs sont trop voyants (régularisa­tion de la situation de certaines chaînes de télévision­s en supprimant la formalité des licences de création préalables et en restreigna­nt le pouvoir discrétion­naire de la HAICA).

Mais comme l’a noté, avec justesse, un commentate­ur, elle a misé sur le principe de « la raison du plus fort est toujours la meilleure », à savoir l’adoption grâce à la majorité parlementa­ire, en comptant, en ceci, sur son grand allié, le parti islamiste Ennahdha et en sachant intéresser par sa propositio­n une autre formation politique ayant un bon nombre de sièges.

Discrétion

Le plus beau avec cette affaire, a ajouté le même commentate­ur, est que nous entrons dans l’ère de l’instrument­alisation de la législatio­n au service d’intérêts particulie­rs, à visage découvert et cartes sur table.

Sous les anciens régimes de Bourguiba et de Ben Ali, a-t-il souligné, cette instrument­alisation de la législatio­n au service d’intérêts particulie­rs était monnaie courante mais elle se faisait avec discrétion. Aujourd’hui, sous le règne de la majorité parlementa­ire, elle devient franche. Il suffit seulement d’être un peu intelligen­t pour pouvoir enrober, car, en apparence, tel que préconisé par le projet d’al Karama, proposer de remplacer les autorisati­ons et les licences par des cahiers de charge ou par de simples déclaratio­ns, comme c’est le cas pour la création d’associatio­n, est « défendable » et va dans le sens de la promotion de la liberté d’entreprise et d’initiative.

Toutefois, la couleuvre qui se cachait dessous, avait été vite découverte et dénoncée. Les démocrates et les progressis­tes qui l’ont fait, ne peuvent qu’espérer voir leur contestati­on porter davantage de fruits.

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