Affûter les garde-fous
Il est vrai que le voleur arrive toujours à tromper la vigilance du gardien le plus zélé, comme le dit un adage de chez nous, mais ceci n’empêche de redoubler de vigilance, ce qui est recommandé spécialement aux structures publiques chargées de la sauvegarde du patrimoine archéologique et historique dans notre pays, face à la multiplication du trafic d’antiquités.
Elles font de leur mieux, mais, les tout récents rapports de contrôle administratif à ce sujet ont recensé des lacunes dans leur tâche.
On se rappelle le réseau démantelé à Sfax en mars 2020, et impliqué dans le vol d’objets antiques de très grande valeur d’un palais présidentiel dont un diamant de 1 kg estimé à 45 millions dinars, 500 pièces de monnaies antiques, des manuscrits, 13 bagues et par-dessus le marché, des détecteurs de métaux.
Une opération sécuritaire avait permis en mai 2019 de saisir des manuscrits religieux hébreux écrits sur parchemin (peau de chèvre) et remontant au 20ème siècle.
Justement, toutes les activités relatives au patrimoine archéologique et historique en Tunisie dont la sauvegarde relèvent de l’etat et des structures publiques concernées. Le seul commerçant privé d’objets antiques disposant d’une autorisation en bonne et due forme était décédé en 2000, et sa boutique sise à l’avenue Habib Bourguiba à Tunis avait été fermée, au milieu de manquements à la réglementation décelés dans ce commerce. C’est dire que le trafic d’antiquités alimente en définitive des acquéreurs étrangers.
Or, plusieurs lacunes ont été relevées dans le travail de sauvegarde mené par les structures publiques comme l’institut national du patrimoine ou encore l’agence de promotion et de valorisation du patrimoine, par le dernier rapport numéro 32 de la Cour des comptes, en revenant sur la suite donnée par ces structures à des recommandations que la Cour leur avait prodiguées en 2014. Selon le rapport, jusqu’à juin 2020, la majorité des recommandations de 2014 n’ont pas été suivies d’actions concrètes. Il s’agit notamment du renforcement des opérations de recensement, d’enregistrement et de dépôt des pièces et objets antiques anciennement et nouvellement collectés. Pourtant, des vols avaient été commis à cause des carences observées dans ce domaine.
Libéralisation !
Il n’existe pas non plus une réglementation concernant la sauvegarde des objets antiques des collections privées, tandis que la règlementation relative à la sauvegarde des collections publiques n’englobe pas les trésors et les manuscrits rares. Une affaire de vente en France de pièces antiques d’une collection privée appartenant à la famille Jallouli avait défrayé la chronique en 2019, parallèlement à la saisie en 2020 de manuscrits que les trafiquants s’apprêtaient à faire passer à l’étranger.
Aussi, malgré les réserves de tous les milieux concernés par la sauvegarde du patrimoine archéologique et historique, dont les scientifiques, quelques experts sont en faveur d’une libéralisation conditionnée du commerce des antiquités afin de limiter leur sortie illégale à l’étranger.