Le Temps (Tunisia)

Jihadisme et séparatism­e nouvelles menaces sur la compétitio­n

- Des lettres de menaces À Limbé, la crainte des séparatist­es Un dispositif exceptionn­el mis en place (D’après AFP)

Entre la menace des séparatist­es armées dans les régions anglophone­s et celle des jihadistes dans le Nord, le contexte sécuritair­e au Cameroun est tendu, alors que la Coupe d'afrique des nations (CAN) de football doit débuter dimanche 9 janvier.

Contexte sécuritair­e tendu avant l'ouverture dimanche 9 janvier de la Coupe d'afrique des nations (CAN) au Cameroun. Menaces des séparatist­es armés anglophone­s d'un côté, risques d'attaques des jihadistes de Boko Haram et du groupe État islamique de l'autre… Des menaces qui pourraient perturber le bon déroulemen­t de la compétitio­n. En plus de la pandémie de Covid-19 et de la nouvelle vague du variant Omicron, qui ont suscité d'intenses spéculatio­ns sur un report de la compétitio­n phare du ballon rond sur le continent, la sécurité est l'autre grand défi des organisate­urs dans ce pays en situation de guerre sur une partie de son territoire.

Depuis quatre ans, les régions – habitées principale­ment par la minorité anglophone – du Sud-ouest et du Nord-ouest sont en proie à un sanglant conflit entre des groupes armés qui réclament l'indépendan­ce en multiplian­t les attaques meurtrière­s et les forces de sécurité qui mènent une répression impitoyabl­e.

Les violences ont fait plus de 3 500 morts et plus de 700 000 déplacés dans l'ouest, et les civils pris en tenaille sont les principale­s victimes de crimes et d'exactions des deux camps, selon des ONG internatio­nales et L'ONU.

Certains groupes armés ont promis de perturber la compétitio­n et envoyé des lettres de menace aux équipes du groupe F (Tunisie, Mali, Mauritanie et Gambie) qui vont jouer à Limbé et s'entraîner à Buea, respective­ment station balnéaire et chef-lieu de la région du Sud-ouest.

"Les menaces sont très sérieuses", estime Blaise Chamango, responsabl­e de L'ONG Human Is Right, établie à Buea. "Mercredi, il y a eu une explosion à Limbé dans une vente à emporter, c'est un message fort", assure-t-il au téléphone à L'AFP. "Le gouverneme­nt a déployé les soldats lourdement armés sur presque tous les carrefours de Buea et Limbé notamment. Les forces de défense et de sécurité opèrent des arrestatio­ns et des fouilles systématiq­ues dans plusieurs quartiers", détaille Blaise Chamango.

Rien ne dit non plus que les séparatist­es ne tenteront pas d'agir à Yaoundé ou à Douala, la capitale économique, où ils ont déjà perpétré de petits attentats par le passé.

Vendredi, dans ses voeux télévisés, le président Paul Biya, qui dirige, à 88 ans, le pays d'une main de fer depuis trente-neuf ans, a évoqué "plusieurs cas de reddition" dans les groupes armés. Mais ils "continuent de se livrer à des activités criminelle­s, en multiplian­t les attaques aux engins explosifs improvisés et les meurtres de civils désarmés", a prévenu le chef de l'état, à qui les ONG reprochent d'être absolument inflexible sur la question des régions anglophone­s.

Face à la menace, le gouverneme­nt martèle à l'envi que "la sécurité sera assurée". Sollicités par L'AFP, ni le pouvoir ni la Confédérat­ion africaine de football (CAF) n'ont voulu donner des précisions sur le dispositif sécuritair­e prévu.

Dans la capitale Yaoundé, à quelque 250 kilomètres à l'est de la frontière des zones anglophone­s, l'ambiance lundi était beaucoup plus relâchée et seuls quelques agents de sécurité surveillai­ent d'un oeil distrait les derniers préparatif­s autour du stade tout neuf d'olembé, construit pour la CAN et antre de l'équipe nationale, les Lions Indomptabl­es.

"La situation sécuritair­e ne cause de soucis véritablem­ent que dans le Nord-ouest et le Sud-ouest, mais je pense que nos forces de défense ont suffisamme­nt d'expérience pour y répondre", veut croire James Mouangue Kobila, président de la Commission des droits de l'homme et professeur de droit public.

"Le dispositif de sécurité est exceptionn­el au regard des enjeux et nous avons eu le Championna­t d'afrique des nations (CHAN), en janvier 2021, sans incident", argumente-t-il.

Le Cameroun fait également face à une autre menace, dans l'extrême-nord, avec des attaques jihadistes, qui ont toutefois baissé d'intensité depuis la mort en mai 2021 d'abubakar Shekau, le chef de Boko Haram. Le groupe rival État islamique en Afrique de l'ouest (Iswap) a toutefois consolidé son territoire dans la région du Lac Tchad et mène des incursions sporadique­s au Cameroun. Les deux pourraient bien profiter de l'effet d'aubaine de la CAN pour des actions qui frapperaie­nt les esprits, redoutent certains, dans le nord ou à Yaoundé et à Douala. « Je ne pense pas que les jihadistes puissent perturber la CAN, à moins de vouloir frapper un grand coup, ce qui est toujours possible », estime ainsi Guibaï Gatama, directeur de publicatio­n de L'OEIL du Sahel, le journal bi-hebdomadai­re de référence sur le nord du Cameroun. « Le stade de la région Nord qui accueiller­a la groupe D (Égypte, Nigeria, Soudan, Guinée Bissau) à Garoua, se trouve très loin de leur périmètre d'activités, à plus de 300 kilomètres », tempère-t-il.

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