Le Temps (Tunisia)

Et rebelote ?

- Des entreprise­s hors la loi Défaillanc­e et laxisme Ce sont les citoyens qui écopent Ahmed NEMLAGHI

L’affaire des déchets est un scandale tant sur le plan judiciaire que politique. Cette affaire est actuelleme­nt examinée par la Chambre de mise en accusation de la Cour d’appel de Sousse qui vient de décider dernièreme­nt, le renvoi du dossier devant le juge d’instructio­n près le Tribunal de première instance de Sousse avec la prolongati­on des mandats de dépôts pour les accusés. Plusieurs arrestatio­ns ont eu lieu dans cette affaire, dont l’ancien ministre des Affaires locales Mustapha Aroui, son chef de cabinet, plusieurs hauts cadres de l’administra­tion publique ainsi que des cadres de la Douane. Depuis que Hamza Belloumi avec son émission les « quatre vérités » a diffusé un reportage sur l’import des déchets domestique­s italiens, tout le monde a été au courant de cette affaire qui a fait couler beaucoup d’encre, à cause de cet accord scandaleux d’une entreprise tunisienne avec une entreprise italienne pour importer 120 tonnes de déchets par an et ce, pour 48 Euros la tonne, soit 150 dinars, le montant total étant de 18 millions de dinars par an.

Les services de la douane tunisienne qui ont découvert en juillet 2020, que le contenu d’environ 70 conteneurs n’avait rien à voir avec les produits déclarés par la société spécialisé­e dans le recyclage des déchets plastiques. Il s’agit d’une entreprise privée qui a pourtant fermé ses portes en 2012 et qui vient de reprendre ses activités récemment. En outre, selon le contrat signé entre les deux entreprise­s il n’est pas question de recyclage. Car si c’était le cas ls déchets recyclés seraient de nouveau acheminés vers le pays d’origine.

Les deux entreprise­s en question ont violé la législatio­n tunisienne qui interdit l’importatio­n des déchets dangereux, ainsi que les convention­s internatio­nales telles que la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfront­aliers des déchets dangereux et de leur éliminatio­n, ainsi que la Convention de Bamako que la Tunisie a ratifiée et qui interdit « l’importatio­n vers l’afrique de tous les types de déchets dangereux, y compris les déchets radioactif­s ». Selon un expert et président de l’associatio­n de l’environnem­ent et du développem­ent durable Khaled Kabbous, qui a précisé à un journal de la place que : « le marché des déchets importés à des fins de recyclage est lucratif, mas il n’est pas à la portée de certains pays comme la Tunisie ».

Il y a deux agences au sein du ministère des Affaires locales et de l’environnem­ent qui sont responsabl­es de la vérificati­on de tout ce qui se rapporte aux déchets, à savoir l’agence nationale pour l’environnem­ent (ANPE) et l’agence nationale de gestion des déchets (ANGED).

L’ANPE, qui a été créée en 1988 a un rôle de réduction des sources de pollution afin de protéger l’environnem­ent. Elle agit tant sur le plan préventif que curatif. Elle intervient pour évaluer les études d’impact environnem­ental des projets qui lui sont soumis. Elle assure également le suivi pour les activités qui ont été autorisées.

L’ANGED pour sa part, elle a pour mission d’étudier les cahiers des charges et les approuver et d’assurer des contrôles continus.

Les deux agences ont dans cette affaire failli à leur devoir de contrôle et de vérificati­on. Par ailleurs cela donne une idée également sur le manque de gouvernanc­e et de communicat­ion entre les responsabl­es, au sein du ministère des Affaires locales et de l’environnem­ent

Ces défaillanc­es ont des conséquenc­es fâcheuses sur le pays et surtout sur les citoyens avec les risques de maladies et d’infection, par les déchets qui ont été importés illégaleme­nt. Sans parler du mal que cela cause à l’environnem­ent.

On se demande si tous les déchets sont restés au port dans les fameux conteneurs ou si d’autres déchets ont pu être transporté­s ailleurs, l’on ne sait où. C’est très grave et tous ceux qui ont collaboré à cette opération sont des criminels qui ont nui sciemment aux citoyens pour quelques dollars de plus. Le goût du lucre l’a emporté sur l’amour de la Patrie.

Maintenant que le dossier de l’affaire est entre les mains du juge d’instructio­n, il est nécessaire que les experts maritimes commis par ce dernier, procèdent à l’évaluation des dégâts causés à l’administra­tion. A la lumière de ces expertises les accusés seront auditionné­s afin de limiter leur responsabi­lité dans ces dégâts.

En tout état de cause, et malgré la décision du Conseil d’etat italien sommant la société exportatri­ce des déchets de récupérer ses conteneurs, ces derniers sont encore au port de Sousse. En fait, à côté des dégâts d’ordre matériel, causés à l’administra­tion, il y a un préjudice causé aux citoyens à cause de la gravité de ces déchets et également un préjudice moral causé aux pays et à l’etat tunisien.

En attendant ceux qui sont impliqués répondront de leurs négligence­s, leur laxisme ou leur forfait pour ceux qui ont agi directemen­t et en connaissan­ce de cause. C’est désormais au juge d’instructio­n de se prononcer.

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