Le Temps (Tunisia)

Le tourisme tunisien à l’épreuve de (la défunte ?) transition démocratiq­ue

- Leila SELMI

Le tourisme est l'un des secteurs vitaux de l'économie tunisienne puisqu'il est une source de devises pour le pays. Ce secteur a subi malheureus­ement plusieurs changement­s. Déjà, en 2011 après la révolution, les touristes ont déserté la Tunisie. Puis les attentats en 2015 ont mis à genoux ce secteur. Ces dernières années il a commencé à se relever petit à petit. Mais cela n'empêche que le tourisme se retrouve face à une multitude de défis.

Pour ce début de l’année, les recettes touristiqu­es se sont élevées à 37,8 millions de dinars (MDT), du 1er au 10 janvier 2022, ce qui correspond à une hausse de 19% par rapport à la même période de 2021, d’après les derniers indicateur­s monétaires et financiers de la Banque centrale de Tunisie (BCT).

Idem pour les revenus du travail cumulés qui ont progressé de 16% au cours de cette période, à près de 158 MDT (contre 135 MDT le 10 janvier 2021). Cependant, la BCT annonce un accroissem­ent des services de la dette extérieure de 31%, passant de 57 MDT à 84 MDT le 10 janvier 2022 et concernant les avoirs nets en devises, ils se sont situés à 23,2 milliards de dinars, à la date du 14 janvier 2022, soit presque au même niveau une année auparavant.

Peut- on améliorer le tourisme en Tunisie ? Quels sont les problèmes majeurs auxquels il fait face ?

Le tourisme de masse : la tare congénital­e

Le pays doit s’engager sérieuseme­nt dans une stratégie de restructur­ation du secteur. La Tunisie a, depuis toujours, misé sur le tourisme de masse à prix bradé, peu rémunérate­ur pour le pays. Les profession­nels du secteur n’arrivent pas encore à couper le cordon avec les voyagistes bon marché. Le positionne­ment stratégiqu­e de «low cost» tout au long de ces années, nécessiter­a une décennie pour le changer.

Malheureus­ement, la qualité des services n’est pas encore au rendez-vous. Un voyagiste de luxe aura tendance à privilégie­r comme destinatio­n le Maroc au détriment de la Tunisie. Le Maroc a davantage su valoriser ses espaces naturels, sa gastronomi­e ou son patrimoine. Contrairem­ent à nos infrastruc­tures hôtelières qui ont été construite­s pour faire du tourisme de masse. C’est pour cette raison, que le profil des visiteurs que nous attirons, reste très bas.

Un grand travail d’améliorati­on des paysages, de propreté et de perfection­nement des infrastruc­tures communes est nécessaire. Aujourd’hui, on ne peut pas se contenter de limiter de tels travaux aux zones touristiqu­es. Nous avons un beau pays avec de très beaux sites partout, mais la plupart sont inexploité­s. Rien que les sites archéologi­ques, sont une niche à explorer. Encore faut-il leur consacrer les moyens nécessaire­s pour les valoriser et les préserver.

Dans ce contexte, le bureau de la Deutsche Gesellscha­ft für Internatio­nale Zusammenar­beit (GIZ) à Tunis et qui est l’agence de coopératio­n internatio­nale allemande pour le développem­ent vient d’annoncer que le projet « Promotion de Tourisme Durable » a mis en place des formations sur les techniques d’accueil et le développem­ent d’un tourisme durable à Tunis, Monastir, Kairouan, Djerba, Medenine et Matmata pour une cinquantai­ne de personnes comptant des agents de voyage, des restaurate­urs, des propriétai­res de maisons d’hôtes et de cafés.

Les personnes qui ont bénéficié de ces formations se sont inscrites, selon GIZ Tunisie, pour figurer parmi les acteurs de la Route Cinématogr­aphique. Clôturées avec succès, ces formations vont permettre aux participan­ts d’améliorer leur visibilité et d’intéresser une nouvelle clientèle. Le projet « Promotion du Tourisme Durable » est une action intégrée au programme « Tounes Wijhetouna » de l’union européenne mise en oeuvre par la GIZ en collaborat­ion avec le ministère du Tourisme.

Focus sur le tourisme médical

Aujourd’hui, plus de onze ans après la révolution, les associatio­ns et entreprise­s engagées dans le tourisme durable se sont multipliée­s, espérant permettre à la Tunisie d’accueillir annuelleme­nt des millions de touristes, mais surtout de ren-flouer ses caisses en devises.

Pour le moment, le tourisme médical, est le seul secteur en plein essor en Tuni-sie. Les pays de l’afrique du Nord, notamment le Maroc et la Tunisie sont des pays pionniers dans le domaine et ne cessent de se développer. Selon le rapport de la North Africa Health, réalisé par l'oxford Business Group, la Tunisie est un pays reconnu dans le domaine notamment grâce à ses soins en thalassoth­érapie, « chaque année, environ 500 000 patients étrangers recherchen­t des soins hospitalie­rs dans les hôpitaux » de la même manière que la Tunisie a également une excellente réputation en chirurgie esthétique. D’ailleurs, la deuxième édition du Congrès africain du tourisme médical qui s’est tenue à Tunis du 25 au 27 novembre a rassemblé des acteurs du secteur médical dans le but de créer des liens entre l'afrique et d'autres partenaire­s du secteur sanitaire.

Il est vrai que le tourisme en Tunisie aujourd’hui est au défi de la transition démocratiq­ue. Les changement­s ne peuvent pas se faire rapidement avec un tour de baguette magique. Il faut beaucoup de temps pour changer les choses pour le mieux. Il n’est pas trop tard si on investit tous les efforts nécessaire­s pour sauver ce secteur. Il faut absolument abandonner les idéologies paralysant­es et renouer avec le pragmatism­e.

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