L’effet de laisse
• Le prix moyen du mètre carré des appartements s’élève à 2500 dinars
Devenir propriétaire d’un petit nid bien à soi est devenu un doux rêve hors de portée le pour la plupart des Tunisiens, selon le dernier baromètre publié par Mubawab, le portail immobilier leader en Tunisie.
Ce baromètre fait ressortir que le prix moyen du mètre carré des appartements a atteint 2500 dinars à l’échelle nationale durant le deuxième semestre 2021, ce qui représente une hausse de 5,45% par rapport au premier semestre de la même année (2350 dinars). La hausse des prix a concerné aussi bien les appartements neufs (2500 dinars le mètre carré) que les appartements anciens (2400 dinars).
Ces prix cachent cependant de fortes disparités entre les régions et le standing des divers quartiers au niveau d’une même région.
La Marsa (3300 dinars), Ezzahra (1850) et Les Jardins de Carthage (3450) sont les villes ou les quartiers qui ont enregistré les plus fortes hausses des prix pour les appartements, enregistrant des augmentations situées entre 5% et 10% sur six mois.
Khezama (2500 dinars), El Menzah (2600) sont les quartiers qui affichent les prix les plus stables pour les appartements, avec des des évolutions de prix insignifiantes comprises entre 0% et +1%.
Un léger recul des prix a été cependant observé à El Mourouj (1600 dinars), à Carthage (2650) à Ariana ville (2350).
Des baisses plus prononcées des baisses variant entre -5% et -10% ont été enregistrées à Akouda (2700 dinars) et Boumhel Bassatine (2100).
Ainsi, la crise liée à la pandémie de la Covid-19 n’a pas stoppé l’envolée des prix. D’autant plus que l’offre sur les appartements neufs et anciens a connu une baisse vertigineuse de -30,95% durant le deuxième semestre de 2021 alors que la demande a évolué de +12,8% durant cette même période.
Déconnexion entre les prix et le revenu des ménages
Alors que les prix de l’immobilier deviennent de plus en plus déconnectés du pouvoir d'achat des citoyens, et le rêve de posséder un toit s’évanouit pour de larges pans de la population.
Le ratio global prix du logement/revenu annuel du ménage est estimé à 14 à l'échelle nationale. En d'autres termes, chaque ménage doit dépenser en moyenne 14 fois l'équivalent de son revenu annuel pour pouvoir acquérir un logement. Ce ratio varie selon les régions. Dans la région du Grand Tunis, le ratio prix du logement/revenu annuel s'élève à 22. Il n'est cependant que de 12 % dans le Nord-est, et de 9 % au Sudouest.
D’après les experts, le ratio moyen du prix du logement par rapport au revenu du ménage pour lequel l'accessibilité au logement est jugée bonne est un ratio de 1 à 5, c'est-à-dire que le ménage investit en moyenne dans l'acquisition de son logement l'équivalent de 1 à 5 fois l'équivalent de son revenu annuel.
L’envolée des prix s’explique essentiellement par la rareté et le renchérissement des prix des terrains constructibles, la hausse du coût de la main d’oeuvre et surtout de l’envolée des prix des matières premières dans un contexte de dépréciation de la monnaie nationale par rapport aux devises fortes et de hausse. Ainsi, les prix des briques destinées à la construction a connu une augmentation de 300% au cours des dix dernières
Ruée des promoteurs sur le segment du haut standing
Ces facteurs endogènes et exogènes n’expliquent pas cependant tout. La majorité des promoteurs immobiliers se ruent sur le segment du haut standing, dans lequel la marge bénéficiaire est plus intéressante. Très peu d’entre eux construisent des logements sociaux. Le taux moyen des logements de haut standing à hauteur représente bon, an mal an 65% du total des logements construits. Les promoteurs construisent des logements économiques à hauteur de 33% des logements et quasiment pas de logements sociaux (2%).
Les opérateurs publics intervenant dans le secteur de la promotion immobilière, notamment la Société de promotion des logements sociaux (SPROLS) et la Société nationale immobilière de Tunisie (SNIT) ont également levé le pied dans le segment du logement social en raison du faible stock de terrains aménagés que l’etat met à leur disposition et de leurs déséquilibres financiers.
Pour améliorer l’accès à la propriété immobilière, les promoteurs immobiliers suggèrent un paquet de mesures urgentes. Il s’agit d’abaisser le taux d’autofinancement exigé par les banques de 20 % à 10 % de la valeur du logement, de prolonger la durée du remboursement des crédits jusqu’à 30 ou 35 ans, d’augmenter la base de calcul de la capacité d'emprunt remboursement à 50 % des revenus de l'emprunteur au lieu de 40 % seulement actuellement et d’abaisser les taux d’intérêt.
La Chambre syndicale nationale des promoteurs immobiliers propose également l’abaissement des frais d’enregistrement des biens immobiliers neufs et l’ouverture du marché de l’immobilier aux étrangers à travers la suppression de la fameuse autorisation du gouverneur.
Les experts recommandent par ailleurs l'augmentation de l'offre de terrains constructibles par la création de villes nouvelles autour des grands centres urbains en s’inspirant des expériences du Maroc et de l’egypte, le développement de l'offre de logements sociaux en imposant aux promoteurs privés la réservation d'un quota minimum de ce genre de logements destinés aux ménages à faibles revenus, et le lancement d'un compartiment réservé aux valeurs immobilières au niveau de la Bourse de Tunis en vue d'améliorer le système de financement et la bonification des taux d'intérêt pour les couches sociales les plus modestes de la société.