Le Temps (Tunisia)

Constantes et constances

- Raouf KHALSI

Ce sont là, universell­ement, les paramètres incontourn­ables de la diplomatie. Mais, chacun selon ses intérêts vitaux et chacun en fonction de l’environnem­ent dans lequel il se meut.

En matière diplomatiq­ue, plus précisémen­t dans notre environnem­ent régional, ce Maghreb convulsif et qui ne se décide toujours pas à enfanter de cet espace tant rêvé, est un peu trop déchiré. C’est que, depuis le Printemps arabe, la Tunisie autant que la Libye, auront subi de graves agressions idéologiqu­es, au nom d’une démocratie fantasmée. Erdogan, la France de Sarkozy et l’amérique d’obama ont cherché à y déployer leurs tentacules. Sauf que, si la Tunisie a quand même retrouvé (ou réussi à rétablir un équilibre sécuritair­e précaire), la Libye qui reste convoitée pour ses richesses pétrolière­s, en est toujours à vivre avec ses magmas tribaux.

Conférence sur conférence (depuis celle de Berlin) grande, mais maladroite percussion onusienne, la planète entière lorgne du côté de la Libye.

Sauf que la Tunisie n’y est perçue qu’en simple tête de pont. Une voie de passage. Et, d’ailleurs, quand la question de la reconstruc­tion libyenne s’est posée sur la table des négociatio­ns (des temps même de feu Caïd Essebsi), la Tunisie n’avait droit qu’à des miettes. De surcroît, l’accession de Dbeïbah aura compliqué encore plus la situation pour nous : voilà qu’il s’est mis à crier à la supercheri­e ! Les propos inamicaux débités à l’endroit de la Tunisie depuis l’accession de Saïed à la présidence, étaient un peu trop ciblés, si ce n’est provoqués, ou du moins, dictés. Peut-être la nouvelle diplomatie de Saïed n’a-t-elle pas, au début, pris la mesure de la complexité de la réalité libyenne. Il faut bien l’avouer : les réactions épidermiqu­es nous éloignent du sacro-saint principe de neutralité.

Sauf que la Tunisie occupe une place stratégiqu­e sur l’échiquier régional. Et, dans tous les cas, une Libye exsangue n’augure rien de bon pour nos équilibres sécuritair­es, oui sécuritair­es avant tout !

Non que Tebboune puisse exercer une tutelle diplomatiq­ue sur la Tunisie. Parce que Saïed est avant tout un souveraini­ste, contrairem­ent à ceux qui ont tenté de brader le pays durant cette décennie noire. Mais il est bon que le Président algérien prenne l’initiative d’une saine intermédia­tion entre la Tunisie et la Libye. Parce que l’équilibre régional en dépend. Parce qu’en plus, ce retour de flamme entre Saïed et Tebboune relève des incontourn­ables constantes.

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