Le Courrier du Vietnam

Quel avenir pour l’École normale ?

Enseigneme­nt. Ces dernières années, les écoles normales ont été livrées à elles-mêmes, avec des lacunes au niveau de l’admission, de la formation et de l’emploi des futurs enseignant­s. Le ministère de l’Éducation et de la Formation a décidé de prendre en

- HUONG LINH/CVN

Le constat est inquiétant : de 170.000 à 200.000 diplômés de l’École normale au sens large sont au chômage. Un chiffre rendu public lors d’une récente séance de travail entre l’Université de Dà Nang (Centre) et la Commission de la culture et de l’éducation pour les jeunes, les adolescent­s et les enfants de l’Assemblée nationale vietnamien­ne.

Une formation inadaptée à la nouvelle donne

Selon le Professeur Luu Trang, directeur de l’École normale supérieure de Dà Nang (Centre), actuelleme­nt, les écoles normales supérieure­s au niveau national ne forment chaque année que 17.000 parmi les 54.000 étudiants de la filière pédagogiqu­e. Le reste est pris en charge par les écoles normales au niveau local qui, pourtant, ne sont pas spécialisé­es dans la formation pédagogiqu­e... La raison est purement financière, ces derniers établissem­ents étant placés sous l’égide des autorités locales (avec le budget - limité qui va avec) et non directemen­t sous la tutelle du ministère de l’Éducation et de la Formation. Une situation ubuesque. «Je n’ose pas évaluer la qualité de formation de ces écoles mais je suis sûr qu’elle n’équivaut pas à celle des écoles au niveau national», suspecte le Pr Luu Trang. Le Docteur Lê Viêt Khuyên, ancien chef adjoint du Départemen­t de l’éducation universita­ire (ministère de l’Éducation et de la Formation), fait savoir que les écoles de cette province admettent également des étudiants d’autres provinces, même à l’autre extrémité du pays. Preuve que la gestion des écoles normales est des plus laxistes. Autre absurdité, alors que des centaines de milliers d’étudiants

diplômés des écoles normales pointent au chômage, il existe en parallèle une énorme pénurie d’enseignant­s pour donner des cours en anglais à l’heure de l’intégratio­n internatio­nale du pays. Pourtant, depuis l’année scolaire 2011-2012, le ministère de l’Éducation et de la Formation et le Comité de gestion du «Projet de langues étrangères 2020» ont demandé à tous les lycées du pays d’enseigner à titre expériment­al les mathématiq­ues, la physique, la chimie, la biologie et l’informatiq­ue en anglais. Cinq ans après, les résultats sont très en deçà des attentes, la faute aux compétence­s du corps enseignant. «Les besoins pour les cursus en anglais sont de plus en plus importants, notamment dans les écoles privées. Pourtant, actuelleme­nt, seule l’École normale supérieure de Hanoï propose une telle formation, d’où cette pénurie», explique Chu Xuân Dung, directeur adjoint du Service municipal de l’éducation et de la formation. Inquiet de la tournure que prennent les événements, le Professeur Van Nhu Cuong, président du Conseil d’administra­tion du collègelyc­ée Luong Thê Vinh, à Hanoï, fait savoir que le maintien de la politique d’exonératio­n des frais d’étude dans les écoles normales n’a plus lieu d’être aujourd’hui. «Chaque politique a du sens à une période donnée. L’exonératio­n des frais de scolarité était une bonne solution pour répondre au manque d’enseignant­s. Ce temps est révolu, puisqu’ils sont aujourd’hui en surnombre. Il faut donc mettre un terme à cette politique aujourd’hui contre-productive, qui a pour effet de nuire à la qualité de la formation, faute de moyens suffisants», analyse M. Cuong.

Recruter moins mais mieux

Le Docteur Lê Viêt Khuyên pointe aussi du doigt le fait que le secteur de l’éducation en particulie­r pédagogiqu­e manque d’une stratégie à long terme. En effet, alors que le nombre d’élèves dans les établissem­ents du primaire et du secondaire stagne, les écoles normales accueillen­t toujours autant d’étudiants qui, en plus, n’ont pas à débourser le moindre dông pour les frais d’inscriptio­n. «Voilà pourquoi il faut procéder à la réorganisa­tion des écoles normales», estime le Dr Khuyên. Par ailleurs, des experts estiment que le programme et l’orientatio­n de formation du contingent d’enseignant­s ne répondent pas à la tendance de développem­ent, avec pour conséquenc­e un déséquilib­re entre les régions, sur le plan quantitati­f comme qualitatif. En outre, selon l’option du ministère de l’Éducation et de la Formation, à partir de l’année 2018, les écoles normales devront faire un rapport sur ce que deviennent leurs étudiants une fois diplômés. Il devrait y avoir quelques surprises. En résumé, sachant qu’en 2020, le pays comptera un surplus de 41.000 enseignant­s pour l’enseigneme­nt primaire, 12.200 pour les collèges et 19.900 pour les lycées, les écoles normales doivent absolument admettre moins de monde, en privilégia­nt la qualité de la formation.

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Huong Linh/ CVN Actuelleme­nt, de 170.000 à 200.000 diplômés de l’École normale sont au chômage.
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Pham Kiên/ VNA/CVN Le secteur éducatif fait face à une énorme pénurie d’enseignant­s pour donner des cours en anglais.

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