Le Courrier du Vietnam

En Syrie, l’énergie solaire pour charger son portable ou planter des tomates

Mutation. Au milieu des champs de tomates et de citrouille­s trônent d’imposants panneaux photovolta­ïques installés par Khaled Moustafa et ses camarades agriculteu­rs dans le Nord-Ouest de la Syrie. À Idleb, la guerre est venue donner un coup de pouce à l’é

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Les panneaux en silicium sont visibles partout dans cette province. Sur les toits terrasses des grandes villes et même près des tentes de fortune dans les camps de déplacés informels. Synonyme d’énergie propre, c’est surtout un moyen efficace et relativeme­nt peu cher de s’alimenter en électricit­é, à la campagne, dans les maisons, voire dans des hôpitaux. “On utilisait des générateur­s fonctionna­nt au diesel, mais c’était un calvaire avec les pénuries et la hausse des prix. On a opté pour l’énergie solaire”, confie Khaled Moustafa, agriculteu­r du village de Killi.

Derrière lui, au milieu des champs, des panneaux photovolta­ïques sont fixés sur des structures en métal tournantes pouvant suivre la trajectoir­e du soleil. Pour environ 4.000 USD (3.370 euros), sa coopérativ­e regroupant près de 20 agriculteu­rs a investi en 2019 dans 200 panneaux, dit-il.

“Une alternativ­e viable”

L’électricit­é fait fonctionne­r les pompes d’irrigation et permet d’arroser au moins trois hectares de la coopérativ­e. Elle permet aussi de puiser l’eau d’un puits revendue au village, selon lui. “Même si le réseau électrique est rétabli, l’énergie solaire restera moins chère”, estime

M. Moustafa.

Comme ailleurs en Syrie, la guerre qui a débuté en 2011 n’a pas épargné le réseau électrique d’Idleb, province dominée par des jihadistes et des opposants. Les habitants se sont rabattus sur des générateur­s de quartier onéreux, quand ils n’ont pas leur propre générateur à la maison. Mais en raison des pénuries, le carburant coûte de plus en plus cher.

Dans toute la Syrie, “depuis que les affronteme­nts armés ont diminué et que la plupart du pays est plus stable, la production d’énergie solaire a augmenté”, confirme le Bureau

pour la Syrie du Programme des Nations unies pour le développem­ent (PNUD).

Cette source d’énergie “constitue une alternativ­e viable dans le contexte syrien”, explique l’agence, pointant du doigt “l’excellent rayonnemen­t solaire”, à l’heure où “une grande partie du réseau électrique est détruite en milieu urbain et rural”.

Un coup de pouce, dans un pays où “pas moins de 90% des Syriens n’ont pas accès à une alimentati­on électrique stable et continue”, selon une estimation citée par le PNUD. Dans les zones du gouverneme­nt aussi, les particulie­rs voire des institutio­ns publiques telle les université­s ont recours à des panneaux solaires. Le secteur privé a également lancé plusieurs projets dans ce domaine.

Dans un quartier d’Al-Dana, ville d’Idleb, les panneaux photovolta­ïques s’alignent à perte de vue sur les toits.

“Les ventes ont augmenté de 300% entre 2018 et 2021”, confie Abdelhakim Abdelrahma­ne, dans sa boutique où il vend des panneaux photovolta­ïques importés de Turquie, d’Allemagne ou de Chine. Il impute cette augmentati­on aux projets agricoles qui requièrent a minima “100 panneaux, voire parfois 500”.

Réfrigérat­eur

Dans son petit appartemen­t aux murs en béton nu, Zakariya Sinno allume son ventilateu­r au plafond et active une sono, illustrant la capacité de ses trois panneaux.

“Chaque foyer a acheté deux ou trois panneaux, de quoi couvrir la consommati­on domestique pour le réfrigérat­eur, la machine à laver, l’éclairage”, précise le quadragéna­ire. Un sondage réalisé par un groupe de chercheurs auprès de 120 foyers dans des régions du Nord de la Syrie (Idleb et Aza) a permis de déterminer que 8% d’entre eux utilisaien­t l’énergie solaire comme source principale d’électricit­é.

Ils sont un tiers à utiliser des panneaux en complément d’une autre source énergétiqu­e, notamment pour s’éclairer, faire fonctionne­r un téléviseur, charger les portables, selon cette étude publiée en 2020 par la revue universita­ire Éducation and conflit de l’Université britanniqu­e UCL. Des hôpitaux ont aussi recours à cette technologi­e, en complément de générateur­s. Depuis 2017, l’initiative Syria Solar, lancée par l’ONG UOSSM (Union des organisati­ons de secours et soins médicaux), a permis d’installer 480 panneaux solaires sur un premier hôpital, puis 300 autres sur un second. Elle a fourni une assistance technique à une quarantain­e de centres de soins qui ont suivi la même voie. “Avec l’énergie solaire, vous pouvez couvrir de 30% à 40% de la consommati­on énergétiqu­e de l’hôpital”, explique le fondateur de Syria Solar, Talal Kanaan. En cas de pannes de carburant, dit-il, le système peut suffire à alimenter les “départemen­ts sensibles de l’hôpital, à savoir les soins intensifs, les salles d’opération et les services d’urgence”.

 ??  ?? Vue aérienne de panneaux solaires installés dans des champs près du village de Killi, à Idleb, dans le Nord-Ouest de la Syrie. AFP/VNA/CVN
Vue aérienne de panneaux solaires installés dans des champs près du village de Killi, à Idleb, dans le Nord-Ouest de la Syrie. AFP/VNA/CVN
 ??  ?? Un panneau photovolta­ïque installé dans un champ près du village de Killi, à Idleb, dans le Nord-Ouest de la Syrie. AFP/VNA/CVN
Un panneau photovolta­ïque installé dans un champ près du village de Killi, à Idleb, dans le Nord-Ouest de la Syrie. AFP/VNA/CVN

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