Le Courrier du Vietnam

Au Pérou, la précarité durable des déplacés climatique­s

Inondation­s. sanglote Marilyn Cahuana dans une cabane couverte de paille dans le Nord du Pérou. Comme des milliers d’autres déplacés, elle a tout perdu il y a cinq ans à cause d’El phénomène climatique aggravé par le réchauffem­ent.

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Niño,

D“Ici, nous avons dû partir de zéro”, ans le campement précaire, installé le long de la route Panamérica­ine, à 980 km au nord de Lima, Marylin, 36 ans, vit avec son mari et ses trois enfants, sans électricit­é ni eau potable. Elle se souvient avec nostalgie de sa vie d’avant dans le hameau de Santa Rosa, à une vingtaine de kilomètres de là, sur les rives fertiles de la rivière Piura.

“J’avais toutes mes affaires là-bas, nous vivions paisibleme­nt, mais tout a été emporté” après le débordemen­t de la rivière Piura en 2017, raconte-t-elle. “Avant, nous avions tous les services de base à proximité, une école, un centre de santé, nous avions nos cultures, tout à portée de main”, se souvient son mari, Leopoldo Namuche, 40 ans.

Comme Marylin et Leopoldo, quelque 2.000 familles vivent désormais à “Refugio Santa Rosa”, un campement de tentes et d’habitation­s précaires ouvert en urgence en 2017 par les autorités. “Nous n’avions jamais pensé vivre comme cela (...) c’est à cause d’El Niño”, souligne Leopoldo,

ses conséquenc­es. En 1982-1983, 9.000 personnes avaient trouvé la mort, victimes d’inondation­s, mais aussi d’épidémies.

Mais, souligne Manuel Pulgar Vidal, ex-ministre péruvien de l’Environnem­ent et membre de l’ONG WWF, “la science a de plus en plus de preuves montrant que ces événements” de variabilit­é climatique comme El Niño “sont plus fréquents et plus graves en raison du changement climatique”.

À 5 km du campement où vivent Marylin et ses proches, 600 autres familles vivotent à “Refugio San Pablo”. Là aussi, l’électricit­é et l’eau potable font défaut.

Les habitants puisent de l’eau dans des puits pour boire et arroser leurs petits potagers, alors que la températur­e peut atteindre 35oC et que les arbres sont rares pour fournir un peu d’ombre. La nuit, les températur­es chutent drastiquem­ent, mais il n’y a pas de chauffage. La cuisine se fait au feu de bois.

“Nous sommes quatre personnes à dormir là”, explique Carlos Javier Silupu Raimundo, en montrant une cabane de planches dans laquelle un matelas a été posé au sol. “Il faut faire attention, il y a toujours un danger, il peut y avoir un scorpion, un serpent”. Pour se faire soigner, les habitants doivent se rendre à Catacaos, à une demi-heure de route du campement.

Quant à la petite école, montée par les familles, elle est fermée depuis mars 2020 en raison de la pandémie. Et sans électricit­é, impossible pour les élèves de suivre les cours en ligne proposés par le gouverneme­nt.

De petits panneaux solaires ou des batteries de voiture permettent à quelques habitants d’avoir un peu de lumière le soir. Pour les autres, pas d’autre choix que la bougie.

Il n’y a pas de magasins dans le campement. Les habitants vendent des légumes qu’ils cultivent ou des animaux qu’ils élèvent. Quand une famille tue un cochon, elle avertit la population avec un mégaphone.

Selon l’OIM, cinq ans après les inondation­s, un quart des personnes hébergées dans les campements n’ont pas pu retourner chez elles, le chômage a grimpé en flèche et la moitié de ces déplacés climatique­s présentent des symptômes de stress posttrauma­tique.

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