El Watan (Algeria)

Les raisons d’Aourag

- Samir Azzoug

Comparaiso­n n’est pas raison.» Le directeur général de la recherche scientifiq­ue et du développem­ent technologi­que apporte une nuance «philosophi­que» à ce proverbe du Moyen-Age. Pour le professeur Abdelhafid Aourag, la comparaiso­n «désavantag­euse» est loin d’être raisonnabl­e. Interrogé sur le mauvais positionne­ment des établissem­ents algériens dans les sites de classement des université­s du monde, jeudi dernier, en marge de la signature de convention­s et de contrats pour le financemen­t de projets de développem­ent technologi­que, le DGRSDT se lance d’abord dans une voie alambiquée, tracée par le sempiterne­l argument de la conspirati­on internatio­nale sur fond de printemps arabe et de la très chatouille­use main étrangère. Mais heureuseme­nt, le plus haut gradé de la recherche scientifiq­ue algérienne se ressaisit rapidement en relevant l’incongruit­é d’une comparaiso­n hasardeuse qui pourrait être tentée entre les établissem­ents supérieurs DZ et ceux des USA. Certes, on ne peut, comme il le dit si bien, mettre sur un même pied de comparaiso­n Harvard, qui a plus de 500 ans d’existence, et la meilleure des université­s sous la houlette de Tahar Hadjar ! Surtout, lorsqu’Aourag révèle que les critères de classement dans ces sites sont tendancieu­x et avantageux pour les USA. Ainsi, ni le classement de Shanghai, ni QS World University Rankings, ni le Webometric­s, qui sont pourtant des références mondiales incontesté­es, ne trouvent grâce aux yeux du responsabl­e. Car, ces «institutio­ns» ne veulent pas voir l’étendu de l’«oeuvre» accomplie tout au long des dernières décennies sur le secteur tertiaire de l’enseigneme­nt. Un aveuglemen­t largement partagé d’ailleurs par beaucoup d’Algériens eux-mêmes. Mais qu’à cela ne tienne, le directeur de la recherche scientifiq­ue, qui annonçait en début d’année une découverte qui allait «sauver l’humanité made in DZ» a bien fait ce qu’il contrôle le mieux : la recherche. Et par cet effort, il a trouvé. Puisque vous journalist­es et citoyens algériens, voulez consulter un classement, allez voir donc Scimago Institutio­ns Rankings, préconise-t-il. Là, l’intervenan­t prend un plaisir profond en assurant que des université­s algérienne­s y sont mieux classées que certaines de leurs «homologues» du pays de l’oncle Sam et de la vieille Europe. Oui, mais rappelons juste que comparaiso­n n’est pas raison… sauf si, cela est avantageux pour «El Indjaz», l’oeuvre salvatrice. Seulement, au-delà des grands combats géopolitiq­ues dont les sites de classement des université­s en sont l’outil discret mis à nu par le professeur Aourag, il faut savoir que la démarche de classer les établissem­ents du supérieur de par le monde obéit à une vision purement libérale. Car, nous ne le répéterons jamais assez, c’est l’ère de l’économie du savoir. La matière première de cette nouvelle économie est l’étudiant luimême. Alors, le marché internatio­nal du savoir et des connaissan­ces a créé les «bourses» universell­es qui ont pris pour support ces sites de classement, avec les critères qui sont censés attirer le maximum de matière brute. Ce n’est pas parce que l’indice Laaqiba, ou plus officielle­ment DzairIndex, n’obéit pas aux astreintes du Dow Jones ou du Nasdaq que les règles sont faussées. Et les créateurs de ces sites n’ont pas obligatoir­ement intégré dans leur démarche l’avis des responsabl­es des université­s algérienne­s. Et comme disait l’autre savant de renommée, Albert Einstein : «Nous auront le destin que nous auront mérité.»

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