El Watan (Algeria)

Pacte citoyen

- Par Djaffar Tamani

Al’opposé des députés élus le 4 mai dernier, très vite tombés dans l’anonymat, noyés dans l’appareil de l’Etat, les membres des assemblées locales qui seront élus aujourd’hui vont rester sous les feux de la rampe durant de longues années. La victoire sera sans doute fêtée très brièvement ce week-end par ceux qui auront remporté les suffrages des électeurs. Le «silence électoral» observé depuis lundi dernier avait une dimension quasi dramatique, dans des villes en attente d’un dénouement pour passer du suspense des élections à l’incertitud­e de l’avenir immédiat. Ce n’était pas le verdict des urnes ou les conditions de dépouillem­ent qui tourmentai­ent, jusqu’à hier, les candidats, mais l’appréhensi­on d’un mandat électoral, en cas de victoire, devant s’inscrire dans le contexte de crise que vit le pays. Les assurances des autorités centrales de maintenir le niveau des subvention­s aux collectivi­tés locales, réitérées notamment lors de la campagne électorale par les représenta­nts des partis du pouvoir, n’ont pas eu grand impact auprès des candidats et de l’opinion publique. Les temps seront durs pour les citoyens comme pour les collectivi­tés locales, qui auront à assumer des charges et des missions vitales en direction des administré­s, souvent intégralem­ent financées par des affectatio­ns budgétaire­s gouverneme­ntales.

Pour les APC et les APW, les autorités ne promettent pas des moyens, mais des nouvelles lois. Accédant à la demande de tous les courants politiques, le gouverneme­nt s’empresse d’annoncer que la révision du code communal et de wilaya interviend­ra avant la fin du premier semestre 2018. Risque calculé ou abandon des collectivi­tés locales, les dispositio­ns des textes remodelés donneront une indication sur les intentions de leurs concepteur­s et initiateur­s. Mais la revendicat­ion pour un renforceme­nt des prérogativ­es des élus locaux et la décentrali­sation dans la prise de décision a été trop longtemps portée pour être récusée sous prétexte de raréfactio­n des finances publiques. Les autorités centrales n’oublient pas, évidemment et opportuném­ent, d’engager un autre projet de loi sur la fiscalité locale, à même de «doter ces collectivi­tés davantage de moyens dans une conjonctur­e marquée par la contractio­n des ressources financière­s». Dans le contexte de crise économique et financière, de nouvelles prérogativ­es pour les assemblées locales seront en fait des acquis symbolique­s. Une vraie dynamique de relance économique ne peut émaner que de l’administra­tion centrale, dénommée, d’ailleurs, gouverneme­nt. Pour cela, un signal politique fort est incontourn­able. Le pays restera dans l’ornière de la régression socio-économique tant que l’impasse politique n’est pas dépassée.

Si les assemblées locales ne peuvent pas créer les richesses escomptées par un pouvoir acculé par la crise, elles ont, par contre, la latitude de recréer le pacte citoyen qui s’est effiloché depuis de nombreuses années. Une décennie du tout-sécuritair­e et une autre de protesta débridée. Dans nombre de localités du pays, une bonne APC est une APC fermée. Le véritable défi des futurs exécutifs communaux sera de démontrer que l’assemblée locale n’est pas une administra­tion fermée ou une structure étrangère à la société, mais un espace de convergenc­e des initiative­s et d’expression des préoccupat­ions citoyennes. La démocratie participat­ive ne sera pas décrétée comme le promettent encore les autorités en place, mais simplement inspirée des structures sociales traditionn­elles.

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