Paris veut des sanctions contre les milices récalcitrantes
● Prenant acte des difficultés sur le terrain, la France semble ne plus pousser à la tenue d’élections en décembre, conformément à un calendrier adopté en mai à Paris, qui paraît de plus en plus intenable en raison des violences.
La France a appelé la communauté internationale à suivre l’exemple des Etats-Unis qui ont imposé, le 12 septembre dernier, des sanctions financières au chef de milice Ibrahim Jadhran, dont les forces ont attaqué en juin des terminaux pétroliers, et à sanctionner tous ceux qui sèment la violence en Libye et empêchent le pays d’avancer vers des élections. Il faut «nous montrer plus durs à l’égard de ceux qui souhaitent imposer le statu quo à leur seul bénéfice», a averti lundi le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, en marge de l’Assemblée générale annuelle de l’ONU à New York.
«Les sanctions prises récemment par le Conseil de sécurité contre un certain nombre de trafiquants doivent être suivies d’autres sanctions, je pense en particulier aux miliciens qui menacent Tripoli», a également déclaré Jean-Yves Le Drian, selon la presse française qui rapporte l’information. Le ministre français des Affaires étrangères s’est, ajoute-t-on, réuni dans la foulée avec ses homologues des pays voisins de la Libye (Algérie, Tunisie, Egypte, Niger et Tchad), ainsi que des représentants de l’Italie et des membres permanents du Conseil de sécurité afin d’obtenir un soutien en ce sens. Le chef du gouvernement d’«accord national» libyen, Fayez Al Sarraj, et l’envoyé spécial de l’ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, ont assisté à cette réunion par visioconférence depuis Tripoli. Selon Paris, tous ont exprimé «l’unité de la communauté internationale» face aux milices qui tentent de jouer sur des «divisions réelles ou supposées» entre acteurs régionaux et européens pour empêcher le processus électoral d’avancer.
VERS UN REPORT DES ÉLECTIONS
Consciente des difficultés du terrain, la France semble, par ailleurs, ne plus pousser à la tenue d’élections en décembre, conformément à un calendrier adopté en mai à Paris. «Le calendrier a été décidé par les Libyens eux-mêmes (…). Si Ghassan Salamé, si les quatre responsables libyens qui se sont engagés à Paris (sur cette chronologie) estiment qu’il faut reporter la date, pourquoi pas», ont révélé des sources du Quai d’Orsay à des titres de la presse française.
L’important est de maintenir une dynamique vers des élections, insiste Paris, selon la même source, assurant être sur la même longueur d’onde que Rome sur ce point et avoir une même «volonté de coopération» malgré les tensions des dernières semaines. L’Italie reproche à la France de vouloir faire cavalier seul en Libye et exprimé son «désaccord» sur l’organisation d’élections le 10 décembre, jugeant les conditions sécuritaires non réunies. Les Etats-Unis s’opposent aussi à toute précipitation en matière électorale. «Imposer de mauvaises dates butoir va se retourner» contre les Libyens, a ainsi averti récemment Jonathan Cohen, représentant adjoint de Washington aux Nations unies, en prédisant une «aggravation des divisions» dans le pays.
De violents affrontements entre milices à Tripoli ont fait au moins 115 morts et près de 400 blessés depuis le 27 août, selon un bilan du ministère libyen de la Santé, publié samedi. Un accord de cessez-le-feu avait été conclu le 4 septembre sous l’égide de l’ONU, mais il n’a pas tenu. De nouveaux combats ont eu lieu depuis. Les récentes violences ont forcé 1200 familles à quitter leurs maisons, portant le nombre total de déplacés à plus de 25 000, dont la moitié sont des enfants, selon l’Unicef. «Plus d’un demi-million d’enfants sont en danger immédiat» dans la capitale, a estimé le fonds onusien dans un communiqué publié cette semaine, ajoutant qu’ils sont «2,6 millions à avoir besoin d’aide à travers le pays».
Et rien n’indique pour le moment que le drame va bientôt s’arrêter.