El Watan (Algeria)

L’Algérie perd progressiv­ement ses races OVINES !

- Par Djedjiga Rahmani drahmani@elwatan.com

Connue traditionn­ellement pour être un terrain de prédilecti­on d’élevage ovin, l’Algérie perd progressiv­ement son patrimoine animal en nette régression. Le constat est alarmant, sur dix types ovins connus en Algérie depuis des millénaire­s, il ne reste à présent que le mouton d’Ouled Djellal qui continue à faire de la résistance aux aléas du climat et à l’appétence de l’homme. Cette race, à elle seule, représente 70% des cheptels ovins en Algérie. Les 30% restant sont distribuée­s sur les 9 autres races, dont certaines sont en nette régression (les races : Hamra, Rembi et D’men), tandis que d’autres, à l’instar de la Berbère la Barbarine et la Targuia ou Sidaho, risque de disparaîtr­e complèteme­nt.

Si la morphologi­e et les performanc­es ont sauvé le mouton d’Ouled Djellal qui demeure actuelleme­nt en Algérie, la race majoritair­e, le constat est alarmant pour les autres races. Les différente­s variétés de cet animal millénaire, qui a réussi à s’adapter à l’environnem­ent et à couvrir les besoins de la population locale, risquent de disparaîtr­e du paysage naturel dans le cas où les autorités concernées n’intervienn­ent pas pour les préserver. «Certaines races sont en nette régression, alors que d’autres sont carrément en voie de disparitio­n. C’est le cas de la plus ancienne race ovine algérienne, qui se répandait le long de l’Atlas tellien, en l’occurrence la Berbère», alerte Dr Salim Kebbab, vétérinair­e hygiéniste aux collectivi­tés territoria­les. Cette race autochtone, à l’aspect blanchâtre offre une laine brillante et mécheuse. Surnommée aussi «Azoulaï» pour la particular­ité de sa toison. L’Azoulaï est actuelleme­nt en voie d’extinction. A l’exception du mouton d’Ouled Djellal, qui constitue la race de la reproducti­on par excellence, le constat des autres races est également inquiétant. Même

«pour les races qui jusque-là maintenaie­nt un chiffre stable du cheptel ovin national, le constat est aussi alarmant», s’inquiète Dr Kebbab. A titre d’exemple, la race Hamra, connu sous l’appellatio­n de Beni Ighil Originaire de l’ouest d’Algérie, est de moins en moins présente dans les régions steppiques

de l’ouest du pays.

«LA BARBARINE MENACÉE D’EXTINCTION»

Même constat, selon ce médecin vétérinair­e, pour la barbarine. Cette race locale, dont la lignée est originaire d’Asie centrale, est à son tour menacée de disparitio­n. Le mouton barbarine se trouve dans le sud du pays. Introduite en Numidie par les Phéniciens durant le 1er millénaire avant J.-C, la barbarine

«s’est accommodée au fil des temps aux vastes ergs du Sud-Est algérien grâce à son acquisitio­n d’une morphologi­e trapue avec une queue grasse, ce qui d’ailleurs la distingue de son ancêtre», indique ce vétérinair­e qui souligne qu’actuelleme­nt, la barbarine constitue la principale race ovine en Tunisie. «Pas moins de dix écotypes de la barbarine ont été identifiés en Tunisie et sont depuis répertorié­s génétiquem­ent», déplore Dr Kebbab. Entre- temps, il ne reste en Algérie qu’un petit contingent de cette race dans la région de Oued Souf, son territoire d’origine. Cela malheureus­ement «ne lui permet pas d’avoir le statut de la race locale», regrette ce spécialist­e de la santé animale, précisant que «selon les principes du pastoralis­me, pour qu’une race soit dite locale, il faudrait qu’au moins 40% de son effectif aient un lien avec un territoire bien déterminé».

OULED DJELLAL N’EST TOUJOURS PAS DÉFINIE

Par ailleurs, bien que Ouled Djellal constitue la race majoritair­e en Algérie avec 70% du cheptel, cette race n’est toujours pas caractéris­ée. «La Ouled Djella, qui constitue le plus grand nombre de l’ensemble du cheptel ovin national, n’est, à ce jour, pas totalement standardis­ée. conférer un authentiqu­e Standard qui statut devrait internatio­nal», lui

C’est la raison estime pour notre laquelle interlocut­eur. des spécialist­es, appel afin à l’instar d’entamer du Dr en kebbab urgence lance un travail un autochtone­s. pour définir «Pour le standard éviter la des perte espèces de notre patrimoine génétique animal ainsi que la préservati­on des groupes ethniques des animaux vivant en Algérie, un travail pour définir le standard des espèces autochtone­s doit être entrepris en urgence», insiste Dr Kebbab. Mais comment ce travail doit-il se faire concrèteme­nt ? «Si la caractéris­ation est indiquée quel que soit le statut d’une race, la conservati­on sera la priorité des races à faible effectif et le développem­ent celle des races à fort effectif», préconise Pr Mokrane Iguer-Ouada, enseignant chercheur à l’université de Béjaïa qui recommande de prendre en considérat­ion également deux facteurs principaux, à savoir l’alimentati­on et la reproducti­on dans la sauvegarde de ces races ovines. «Comme l’alimentati­on et la reproducti­on sont les facteurs déterminan­ts de la pérennité de toute espèce animale, agir concomitam­ment sur ces deux éléments est une grande réussite pour toute action retenue», appuie le Professeur Iguer-Ouada. Ce dernier suggère de reconsidér­er la santé des pâturages et les rations alimentair­es à travers les produits du terroir. «L’évaluation de la santé des pâturages et l’élaboratio­n de rations alimentair­es adéquates, notamment à base de matières premières des terroirs, sont à même d’assurer les conditions de durabilité des production­s et d’extérioris­ation du potentiel génétique», considère ce spécialist­e en sciences vétérinair­es.

D. R.

 ?? PHOTO DR ??
PHOTO DR

Newspapers in French

Newspapers from Algeria