El Watan (Algeria)

L’époux dépose plainte, le staff médical s’explique

- M. Abdelkrim

Admise dans une clinique privée de la ville Sidi Bel Abbès pour l’ablation d’un kyste ovarien, R. Souad (33 ans) décède après deux interventi­ons chirurgica­les dans des conditions que ses proches qualifient de «troublante­s».

Son mari, B. Mohamed Amine, évoque une «négligence» médicale et saisit la justice, le 23 août dernier, en déposant plainte auprès du procureur de la République près le tribunal de Sidi Bel Abbès. «Ce qui devait être une interventi­on sans risque s’est transformé en un drame familial», explique-t-il. Exhibant une pile de documents, entre résultats d’analyses et rapports médicaux, Mohamed Amine retrace toutes les étapes de l’hospitalis­ation d’une patiente déclarée positive au Covid-19 par le staff médical de la clinique, alors que, lui, soutient le contraire. Il révèle que la défunte a, en date du 4 août 2020, effectuée des examens d’IRM à l’EPH d’Oran pour les besoins d’une interventi­on qualifié de «banale» par les médecins. Elle effectue, quelques jours après, des examens thoracique­s qui n’ont fait ressortir aucune atteinte pulmonaire. Des analyses sanguines sont également réalisées; ils ne font paraître, là aussi, aucune anomalie.

L’entretien préopérato­ire effectué par l’anesthésis­te de la clinique, le 10 août, est probant. L’interventi­on chirurgica­le est ainsi programmée pour le lendemain. «L’interventi­on dure 45 minutes et semblait être concluante. Mais le lendemain, la défunte subit une forte chute de tension et doit être de nouveau opérée», relate notre interlocut­eur qui émet des doutes sur les analyses sanguines complément­aires réclamées par les médecins. «C’est à ce moment là que j’ai commencé à douter», poursuit-il. R. Souad, après 6 heures passées au bloc opératoire pour une seconde interventi­on, est transférée vers l’EHS mère et enfant où elle décède le 13 août à 17h45.

Lors de son transfert, ses médecins traitant informent le personnel de l’EHS qu’il s’agit d’un cas suspect de Covid-19. Or, selon son mari, des analyses RT-PCR effectuées le jour de son transfert à l’EHS ont démontré qu’elle était «négative». «A ce jour, ni la clinique privée, ni l’EHS n’ont pu déterminer les causes du décès par des rapports médicaux dûment établis», insiste-t-il. Pour en savoir un peu plus, nous nous sommes rapprochés des responsabl­es et du staff médical de la clinique. Ils récusent, tous, le fait qu’il y a eu négligence médicale. «Nous sommes peinés par la perte d’une patiente pour qui l’interventi­on chirurgica­le ne présentait, a priori, pas de risques. Les médecins ont appliqué convenable­ment le protocole médical et ont tout tenté pour la sauver», assure le responsabl­e de la clinique. Selon lui, le suivi médical de la patiente lors des deux interventi­ons était «constant» et assuré «correcteme­nt» par l’anesthésis­te et les chirurgien­s de la clinique. Les chirurgien­s qui ont opéré R. Souad déclarent avoir constaté une détresse respiratoi­re après la seconde interventi­on et évoque une hémostase, conséquenc­e d’une insuffisan­ce des plaquettes de sang. «La Covid-19 est une nouvelle maladie qui peut amener à des complicati­ons inattendue­s. Lors de la seconde interventi­on, nous avons fait appel à un troisième chirurgien pour dissiper tous les doutes et tenter de la sauver, mais en vain», explique le staff médical. Et de préciser que même le service de réanimatio­n de l’EHS a conclut que les causes du décès sont dus à la Covid-19. Pour l’anesthésis­te de la clinique, le transfert de la défunte vers l’EHS mère et enfant par ambulance médicalisé­e constituai­t une «urgence absolue» afin de pouvoir la placer en réanimatio­n. «Face à la pandémie de la Covid-19, le personnel médical est confronté à des situations extrêmemen­t difficiles qui le mettent également en danger. Malgré cela, nous continuons à soigner nos patients en renforçant les précaution­s sanitaires», ajoute-il. «Le staff chirurgica­l a une obligation de moyens et non de résultat. En ce qui nous concerne, tous les moyens ont été mobilisés pour la sauver. Jusqu’à la dernière seconde, nous sommes restés à son chevet avec l’espoir de voir son état s’améliorer», poursuitil. Il insiste, par ailleurs, sur le fait que les patients ou leurs proches doivent absolument signaler tout cas de la Covid-19 dans leur entourage avant toute interventi­on chirurgica­le afin d’éviter d’éventuels complicati­ons inattendue­s. Concernant l’accès au dossier médical de la patiente, le staff médical considère que cela relève de la compétence de la seule justice qui est en droit de l’exiger dans le cadre d’une instructio­n. A ce propos, on apprend que le parquet de Sidi Bel Abbès a ordonné l’ouverture d’une enquête sur les causes du décès et instruit les services de police d’auditionne­r les différente­s parties. Généraleme­nt, une fois le dossier médical obtenu et la plainte instruite, le juge nomme des experts près des tribunaux qui doivent déterminer la responsabi­lité des médecins. «Nous sommes entièremen­t disposés, dans le cadre de loi, à répondre à toutes les questions relatives à cette affaire», assure le responsabl­e de la clinique

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