La colère des diplômés
PLUS DE 20 000 TITULAIRES DE MAGISTÈRE ET DE DOCTORAT ATTENDENT UN EMPLOI PERMANENT DEPUIS DES ANNÉES
● La Coordination des enseignants vacataires annonce l’organisation d’un sit-in aujourd’hui devant l’APN ● Revendication principale : le recrutement dans des postes permanents ● Le ministre de l’Enseignement supérieur, Abdelbaki Benziane, a annoncé devant les députés de l’APN que le recrutement des titulaires de diplômes de mastère et de doctorat «sera renforcé dans les plus brefs délais avec 2800 nouveaux postes budgétaires» ● Il a précisé que la question des vacataires «fait actuellement l’objet d’un examen au niveau du secteur pour l’élaboration d’un projet de décret exécutif définissant le cadre général pour le recrutement et l’organisation des concours».
Des titulaires de diplômes de magistère et de doctorat, exerçant à titre d’enseignants vacataires, annoncent l’organisation, aujourd’hui, d’un rassemblement devant l’APN. Lancé à l’initiative de la Coordination nationale des enseignants vacataires, le sit-in permettra d’exiger le recrutement effectif de tous les enseignants. L’action prévue aujourd’hui intervient après le rassemblement organisé la semaine dernière, devant le siège du ministère de l’Enseignement supérieur, mais qui n’a «abouti à rien de concret», regrettent les organisateurs. «Le secrétaire général du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique s’est contenté de rassurer nos représentants, sans s’engager sur un programme pour le recrutement des enseignants vacataires, qui est
notre principale revendication», s’offusque Nadir Yahiaoui, membre de la Coordination nationale des enseignants vacataires.
A ce jour, ils seraient plus de 20 000 enseignants titulaires des diplômes de magistère et de doctorat à assurer des vacations au niveau des différents établissements universitaires du pays. Par endroit, ils sont plus nombreux que les enseignants permanents, mais ils ne bénéficient pas des mêmes avantages salariaux et autres. Il y a dans la seule faculté de Tamda, université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou (UMMTO), quelque 400 vacataires pour 500 permanents, «soit plus des deux tiers des
effectifs», nous a-t-on assuré. «Ces vacataires assurent les mêmes tâches d’encadrement, de correction et de soutenance et parfois plus que leurs collègues permanisés, avec des salaires modiques : 500 DA/heure. Les salaires versés annuellement ne dépassent pas les 30 000 DA», a indiqué, dans une déclaration
à El Watan, un enseignant, qui a regretté que l’université ouvre des postes budgétaires «au
compte-gouttes» (voir El Watan du 11 juillet
2017).
PROJET DE DÉCRET !
La situation est restée inchangée : arrivée de nouveaux diplômés, précarisation accélérée des enseignants… Intervenant lors d’une séance plénière de l’APN, consacrée aux questions orales adressées aux membres du gouvernement, le ministre de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche scientifique, Abdelbaki Benziane, a annoncé que le recrutement des titulaires de diplômes de mastère et de doctorat «sera renforcé dans les plus brefs délais avec 2800 nouveaux postes budgétaires». Le ministre, cité par l’APS, a assuré que la révision des conditions et règles de recrutement dans le secteur compte parmi
«les priorités», soulignant que la question des
vacataires «fait actuellement l’objet d’un examen au niveau du secteur pour l’élaboration d’un projet de décret exécutif définissant le cadre général pour le recrutement et l’organisation des concours sur la base des diplômes pour accéder au poste de maître assistant “A”, lequel sera soumis, dès la finalisation de la concertation en cours avec les différentes parties concernées de la communauté universitaire et scientifique, aux autorités compétentes
pour engager les mesures d’adoption et de validation».
Au niveau de la Coordination, on assure que les annonces du ministre «sont sans effet». «Les 2800 postes budgétaires annoncés seront absorbés par les diplômés en médecine. Les spécialistes en sciences humaines et les
autres resteront d’éternels vacataires», dénonce un enseignant de l’ENS de Constantine, qui a requis l’anonymat.
Une solution ? Les protestataires, qui se sont organisés en comités locaux à travers les universités du pays, exigent l’application de la loi : le décret 98-254 relatif à la formation doctorale, à la post-graduation spécialisée et à l’habilitation universitaire, notamment les articles 15 et 16, ainsi que l’arrêté 191 fixant l’organisation de la formation de troisième cycle en vue de l’obtention du doctorat.
Ces textes prévoient que les diplômes de magistère et de doctorat, «obtenus après une formation spécialisée et approfondie et après l’obtention d’un concours national d’accès à cette formation, sont des postes qui répondent aux besoins exprimés, au préalable, par les universités en matière d’enseignants et de chercheurs». Mieux, la Coordination des enseignants vacataires demande au ministère de bénéficier du même «régime» que les titulaires du contrat du pré-emploi, dont l’intégration progressive est annoncée ces derniers
mois par les autorités publiques. «Nous ne demandons pas le recrutement des 20 000 diplômés d’un seul coup. Nous savons que cela est irréalisable. Par contre, mettre en place des quotas pour un recrutement progressif de toute cette masse d’enseignants précarisés est possible», souligne Yahiaoui.