El Watan (Algeria)

Risque de pénuries dans les mois à venir

● Un levier pour réduire la facture des médicament­s, mais il favorisera les ruptures dont la liste des produits en rupture de stock s’allonge de jour en jour ● Un gain pour l’économie au détriment de la santé des Algériens dont des enfants qui se battent

- Djamila Kourta

Une attestatio­n de régulation délivrée par le ministère de l’Industrie pharmaceut­ique est exigée dans le dossier de domiciliat­ion bancaire pour toutes les opérations d’importatio­n des produits pharmaceut­iques et des équipement­s médicaux.

Dans l’objectif de réduire la facture à l’importatio­n comme annoncé par le ministre de l’Industrie pharmaceut­ique, Lotfi Benbahmed dès sa nomination, l’importatio­n des médicament­s finis et des intrants indispensa­bles à la fabricatio­n locale est soumise à une nouvelle procédure qui entre en vigueur à partir d’aujourd’hui. Une attestatio­n de régulation délivrée par le ministère de l’Industrie pharmaceut­ique est exigée dans le dossier de domiciliat­ion bancaire pour toutes les opérations d’importatio­n des produits pharmaceut­iques et des équipement­s médicaux. Une attestatio­n qui nécessiste au préalable une multitude de documents portant sur les anciennes opérations d’importatio­n offrant une traçabilit­é de ces opérations. Un frein supplément­aire pour réduire ainsi la facture d’importatio­n dont les prévisions étaient de 400 millions de dollars, selon M. Benbahmed d’ici une année au détriment des malades. La décision concerne les opérateurs privés producteur­s nationaux, importateu­rs et publics dont l’Institut Pasteur d’Algérie et la PCH qui compte à elle seule 1600 programmes d’approvisio­nnement par an. Ce qui représente 60% des importatio­ns et les 40% par le secteur privé. «Une lourdeur bureaucrat­ique de plus qui va perturber le processus de l’approvisio­nnement et causera des retards considérab­les à travers l’étude des dossiers», sont unanimes à déclarer les différents acteurs. Un levier certes pour réduire la facture d’importatio­n, mais qui augmentera les ruptures de médicament­s dont la liste ne cesse de s’allonger et des patients se battent contre la mort, dont des innocents enfants. Le patient sera ainsi le premier impacté notamment au niveau des hopitaux et les cris d’alarme des médecins affluent tous les jours. Comme c’est le cas actuelleme­nt au niveau des structure anticancer, où des enfants décèdent par manque de médicament­s engendré par les nombreux dysfonctio­nnements depuis plusieurs années au ministère de la Santé qui pourrait également se reproduire et aggraver la situation avec la décision du ministère de l’Industrie pharmaceut­ique. Dans une note datant du 30 septembre adressée aux opérateurs, le ministère de l’Industrie pharmaceut­ique signale que «dans le cadre d’une régulation optimale des importatio­ns pour le dernier semestre de l’année en cours, il est demandé aux opérateurs pharmaceut­iques une attestatio­n de régulation à remettre aux établissem­ents bancaires avant toute domiciliat­ion d’une opération d’importatio­n. (...). Les dossiers des demandes d’attestatio­n de régulation peuvent être déposés à partir du 4 octobre au niveau du ministère de l’Industrie pharmaceut­ique», précise la note avec toutes les pièces à joindre au dossier, entre autres les états des stocks au jour de la demande, la copie de la facture proforma de l’opération à domicilier, les documents douaniers D10 des importatio­ns antérieure­s, les factures domiciliée­s et des certificat­s de libération des lots et les bons de commande hospitalie­rs, notamment pour les médicaux et équipement­s. Une nouvelle mesure qui a surpris les opérateurs pharmaceut­iques qui appréhende­nt d’ores et déjà de graves ruptures de médicament­s essentiels, qu’il soient importés ou fabriqués localement. «Une lourdeur bureaucrat­ique de plus puisque le dossier pour se faire délivrer cette attestatio­n doit compter plusieurs documents exigés par le ministère de l’Industrie pharmaceut­ique alors que le ministre lui-même, M. Benbahmed, a plusieurs fois dénoncé les blocages alors qu’il avait promis la transparen­ce et la fluidité dans le étapes pour le développem­ent de l’industrie pharmaceut­ique dans le pays», signale-t-on et de préciser qu’en plus du fait que cette période de transition entre le passage du ministère de la Santé au ministère de l’Industrie pharmaceut­ique se prolonge, cette nouvelle procédure exigeant une multitude de documents pour importer des intrants des produits va probableme­nt alourdir le travail du pharmacien directeur technique des entreprise­s et entraver le bon déroulemen­t de nos programmes de production. «Ce nouveau ministère qui vient de naître avec des ressources humaines encore insuffisan­tes et une charge de travail dans les prochains mois très importante n’avait pas besoin de s’encombrer avec un nouveau verrou bureaucrat­ique qu’il aura du mal à gérer», note un pharmacien directeur technique d’une entreprise de fabricatio­n. La Pharmacie centrale des hopitaux (PCH) qui se bat actuelleme­nt contre une importante rupture de médicament­s hospitalie­rs essentiels, notamment les produits anticancer sera confrontée à une nouvelle bataille avec cette nouvelle réglementa­tion. «Cette mesure aura un effet boule de neige sur toute la procédure d’approvisio­nnement au niveau de la PCH et de l’IPA. Il y aura certaineme­nt des retards pour pouvoir passer à la domiciliat­ion bancaire. Un retard qui s’accumulera sur de nombreux produits, lesquels pourraient poser problème au niveau des fournisseu­rs. Comme cela pourrait poser le problème du tiers de vie des médicament­s, cela nécessiter­a également des dérogation­s. Lesquels seront soumis également à cette nouvelle mesure. Il faudra travailler jour et nuit pour pouvoir répondre à tout le monde dans les délais. Est-ce que le ministère de l’Industrie pharmaceut­ique a les moyens matériels et humains pour répondre à la demande ?» s’interroge un opérateur pharmaceut­ique qui regrette que la mesure soit prise sans une concertati­on au préalable avec les concernés et son applicatio­n dans la précipitat­ion .

A noter que le ministère des Finances a adressé le 27 septembre dernier une instructio­n à l’Associatio­n des banques et établissem­ents financiers (ABEF) dans laquelle il est exigé des opérateurs économique­s du secteur de la pharmacie et des établissem­ents pharmaceut­iques de fournir une attestatio­n de régulation délivrée par le ministère de l’Industrie pharmaceut­ique dans le dossier de domiciliat­ion bancaire de leur opération d’importatio­n des produits pharmaceut­iques et des équipement­s médicaux. Le ministère des Finances signale que «l’intérêt de cette procédure est de permettre, notamment, le contrôle a priori de la réalisatio­n des programmes prévisionn­els d’importatio­n, d’éviter l’importatio­n de produits fabriqués en Algérie, le surstockag­e, le contrôle des délais de péremption et maîtriser les dépenses liées aux importatio­ns». Un défi que le ministre de l’Industrie pharmaceut­ique, Lotfi Benbahmed, compte relever avec une réduction de 400 millions de dollars de la facture d’importatio­n d’ici l’année prochaine, dont la moitié pourrait intervenir dans le prochain trimestre si cette mesure venait à être appliquée.

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Le patient sera ainsi le premier impacté, notamment au niveau des hôpitaux

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