Le parquet de Relizane dément, les avocats persistent et signent
Selon ses avocats, le procès de Abdellah Benaoum a été avancé au 27 octobre au lieu du 18 novembre, au tribunal criminel de Relizane.
L’état de santé du détenu d’opinion Abdellah Benaoum, arrêté le 9 décembre 2019 et placé en détention préventive à la prison de Relizane avant d’être transféré à Oran, est jugé «préoccupant» par ses avocats et ses proches. Sur les réseaux sociaux, le portrait de l’activiste de Relizane est de plus en plus visible sur les fils d’actualité, assorti du hashtag «Sauvez Abdellah Benaoum !». Une inquiétude relayée par plusieurs médias dont El Watan. En réponse à cette campagne, le parquet général près la cour de Relizane est sorti de sa réserve pour apporter des éclaircissements sur l’état physique du militant et les soins qui lui sont prodigués. Dans un communiqué daté du 4 octobre, le parquet a tenu ainsi à préciser que «l’établissement pénitentiaire de Relizane a pris médicalement en charge le détenu et l’a transféré à Oran dès que le médecin en a émis la demande, dans le but de lui faire une coronographie et non pas pour subir une intervention chirurgicale comme cela a été avancé». La même autorité ajoute que le prévenu «fait l’objet d’un suivi médical continu à Oran, et ce, depuis son transfert le 30 juin». Le parquet de Relizane affirme que «l’administration de l’établissement pénitentiaire d’Oran a tenté à plusieurs reprises de le transférer au service cardiologie afin de le faire examiner par un médecin spécialiste, mais il a à chaque fois refusé». «On a tenté à six reprises de le conduire à l’hôpital», soutient le représentant du ministère public, mais Benaoum campait toujours sur sa position, selon la même source.
Le procureur général près la cour de Relizane précise, en outre, que «le détenu a exigé d’être transféré à Alger pour se faire examiner par le docteur Salim Benkhedda, alors que le CHU d’Oran dispose de moyens médicaux importants».
Le parquet indique, par ailleurs, que c’est le prévenu «qui n’a pas voulu voir son avocat», le 1er octobre, lorsqu’il lui a rendu visite en prison, «en avançant comme prétexte son état de santé». «Et cela s’est répété lors de la visite de sa famille le 2 octobre, en refusant de se présenter au parloir sous le même prétexte», poursuit le communiqué. Le parquet de Relizane assure qu’un «certificat médical et le certificat d’une psychologue, datés du 3 octobre, attestent que son état physique et psychologique sont stables». La même instance souligne que le détenu «est constamment à l’infirmerie de l’établissement pénitentiaire», en ajoutant qu’il est sous surveillance médicale «en permanence, de jour comme de nuit».
Réagissant à son tour aux clarifications du parquet de Relizane, le collectif de la défense de Abdellah
Benaoum a répondu par un long communiqué à travers lequel les avocats insistent sur l’urgence d’accéder à la demande de M. Benaoum de se faire soigner conformément au protocole qu’il a choisi. Ils indiquent qu’ils ont commencé à observer une dégradation de l’état de santé du militant politique «au cours de leurs visites répétées au détenu, à la prison de Belacel, depuis avril 2020». Ils ont alors introduit une demande de remise en liberté pour permettre à Abdellah Benaoum de se faire soigner. La demande essuie un refus. Le 12 mai 2020, M. Benaoum «a été examiné par le Dr Benhaddou, cardiologue exerçant dans une clinique privée à Relizane, et qui a consigné dans son rapport que son état nécessitait une intervention chirurgicale d’urgence», relève le collectif. Devant ce diagnostic, la défense a demandé que l’intervention soit programmée au mois de juin. «Le parquet n’a pas accédé à notre requête, et le détenu a été transféré suite à cette demande de la prison de Belacel à la prison de Gdyel (Oran).» Le 16 juillet, le procès de Benaoum s’ouvre à Relizane. Durant l’audience, «l’état de santé du détenu d’opinion s’est brusquement détérioré», affirment les avocats. Le juge a exigé l’expertise d’un médecin pour décider du report ou non du procès. Selon le récit de la défense, «le médecin a établi que M. Benaoum souffrait d’une obstruction des artères coronaires et d’hypertension artérielle». Il conclut que le procès ne pouvait se poursuivre dans ces conditions. Le 26 août, la défense revient à la charge et introduit une nouvelle demande de liberté provisoire. «Le 3 septembre, la chambre d’accusation a examiné cette demande.» Celle-ci est de nouveau rejetée. Le 27 septembre, la défense saisit cette fois la cour d’Oran «pour une autre demande d’hospitalisation». Sans réponse.
Défendant le droit de Abdellah Benaoum à choisir son médecin, ses avocats déclarent : «En citant le professeur Salim Benkhedda, la défense précise que la relation entre le patient et son médecin est une relation de confiance, et il est du droit du malade de choisir son médecin traitant, surtout si l’on prend en compte le caractère délicat de cette intervention. (…) La demande de notre client est parfaitement fondée et le refus d’y accéder est une atteinte à sa dignité après avoir porté atteinte à sa liberté.» Selon Me Mohamed Kerma, l’un des avocats du détenu, le procès de Benaoum a été avancé au 27 octobre. «L’affaire de Abdellah Benaoum et ses coprévenus est programmée le 27 octobre au lieu du 18 novembre au tribunal criminel de Relizane», a posté l’avocat hier sur sa page Facebook.