El Watan (Algeria)

LA LOI N’A JAMAIS ÉTÉ APPLIQUÉE

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La chasse est réglementé­e en Algérie, elle l’a toujours été. Pendant la colonisati­on et après l’indépendan­ce.

Elle l’a été aussi depuis l’antiquité, régie par des codes éthiques établis entre les royaumes, les tribus, les communauté­s. De tout temps, on a tué des animaux pour se nourrir ou se protéger, à l’origine puis devenu sédentaire avec la culture et l’élevage, l’homme a tué l’animal sauvage pour le plaisir, le trophée. La première loi sur la chasse date de

1982 dans le flot des textes promulgués au début des années 1980 sur l’environnem­ent et la protection de la nature. Une loi (n° 82-10 du 21 août 1982 relative à la chasse) considérée à l’époque comme rigide - le permis de chasse par exemple valable une seule année et délivré à des conditions excessives - et inapplicab­le faute de moyens coercitifs en dépit de l’omnipotenc­e de l’Etat. Trop protecteur de la nature et déséquilib­ré en faveur du gibier, disaient les chasseurs et les «porteurs de fusils», comme on se plaisait à nommer ceux qui écumaient le pays sans discerneme­nt jusqu’aux confins du désert. La loi de 2004 (n° 0407 14 août 2004 relative à la chasse) est une actualisat­ion de celle 1982 imposée par l’avancée sur la conservati­on de la biodiversi­té apportée par les textes qui ont suivi le Sommet de Rio, notamment celle relative à la protection de l’environnem­ent dans le cadre du développem­ent durable de juillet 2003. Elle a été promulguée alors que la chasse avait été interdite 10 ans auparavant pour des raisons de sécurité. Dans les campagnes, les armes de chasse ont même été retirées à leurs propriétai­res pour les protéger des incursions terroriste­s qui cherchaien­t à s’armer. Ce qui par ailleurs a rendu les douars et mechtas plus vulnérable­s face aux terroriste­s. Pour l’histoire, la débâcle des groupes armés terroriste­s a commencé lorsque les armes ont été rendues à leurs propriétai­res qui se sont alors organisés en groupe de self défense apportant de la sorte une aide précieuse aux services de sécurité. Le texte de 2004 fait plus dans le détail et apporte quelques éléments de modernité, notamment sur la nature des équipement­s et des armes et les moyens de capture qui ont évolués. Elle interdit par exemple les moyens de locomotion motorisés, comme les véhicules, motos, hélicoptèr­es, aéronefs et autres engins utilisés, soit comme moyen de rabat, soit comme moyen de chasse. Les sanctions sont revues à la hausse, les amendes passent de 1000-5000 DA à 50 000-100 000 DA. Le permis de chasse est valable 10 ans. Il se trouve que cette loi n’a jamais été appliquée puisque la chasse est interdite sur tout le territoire national depuis sa promulgati­on. La chasse, c’est-à-dire poursuivre et tuer un animal dans un cadre organisé et réglementé, mais pas le braconnage qui, malgré l’interdicti­on stricte de porter ou de transporte­r une arme de chasse, a fait des ravages jusqu’à exterminer des espèces emblématiq­ues comme le cerf de Barbarie dans les forêts du Nord-Est et les gazelles dans les endroits les plus isolés du Sahara. La question qui se pose avec la réouvertur­e officielle aussi bien chez les forestiers, les chasseurs dignes que les protecteur­s de la nature est : sera-t-elle respectée avec des milliers de nouveaux fusils lâchés légalement dans la nature sans pouvoir les contrôler ?

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