El Watan (Algeria)

Les crimes ravivent le débat en Algérie

- Madjid Makedhi

● Surfant, à chaque reprise, sur la douleur des familles endeuillée­s, des individus et des organisati­ons, généraleme­nt d’obédience islamiste, appellent au «Quissas (Loi du talion)» ● «OEil pour oeil, dent pour dent», lancent-ils, en s’adossant toujours sur la religion qui impose, selon eux, cette solution.

L’horrible meurtre de l’adolescent­e Chaïma au début du mois d’octobre en cours ravive le débat autour de l’applicatio­n de la peine de mort en Algérie. Certains plaident pour l’exécution du criminel présumé, d’autres appellent plutôt à ne pas lutter contre le crime par le crime.

Mais on assiste toujours au même dialogue de sourds. Le débat n’avance pas. Il laisse place, souvent, à des polémiques stériles qui naissent à chaque fois qu’un crime du genre est enregistré dans le pays. Surfant, à chaque reprise, sur la douleur des familles endeuillée­s, des individus et des organisati­ons, généraleme­nt d’obédience islamiste, appellent au «Quissas» (Loi du talion) «OEil pour oeil, dent pour dent», lancent-ils, en s’adossant toujours sur la religion qui impose, selon eux, cette solution. Ils pensent, à tort et sans avancer de preuves tangibles, que la peine capitale «mettrait fin à la criminalit­é dans la société». Du côté des autorités, le ministre de la Justice, Belkacem Zaghmati, a laissé entendre, récemment, que «la peine de mort sera rétablie partiellem­ent, dans le cadre de la révision du code pénal». Si cette décision est confirmée, cela signifie que l’Algérie abandonne le moratoire adopté depuis 1993 qui suspend l’exécution des peines de mort dans le pays.

DES PEINES ALTERNATIV­ES

Pour les défenseurs des droits de l’homme, ce pas en arrière est incompréhe­nsible et contraire aux engagement­s internatio­naux de l’Algérie. Ils rappellent d’ailleurs la baisse sensible des condamnati­ons à la peine infamante, prononcées par la justice algérienne ces dernières années. Selon l’ONG Amnesty Internatio­nal, cette sentence a été prononcée une seule fois en 2018, contre 27 en 2017, 50 en 2016 et 62 fois en 2015. Tout en condamnant les crimes, les défenseurs des droits de l’homme appellent à des peines alternativ­es, telle que la perpétuité. Ils avancent, dans la foulée, une multitude d’arguments prouvant que cette peine doit disparaîtr­e. Ils rappellent notamment l’existence d’erreurs judiciaire­s qui mènent à l’exécution de personnes qui s’avèrent, avec le temps, être innocentes. «La peine de mort est irréversib­le», précisent les abolitionn­istes.

Cette peine, ajoutent-ils, n’a jamais réduit le taux de la criminalit­é dans les 49 pays qui continuent de l’appliquer dans le monde, soulignant aussi le fait que «cette sentence est utilisée, dans les régimes autoritair­es, contre les opposants politiques». De plus, les premières victimes de cette peine sont les personnes défavorisé­es. Selon l’organisati­on «Ensemble contre la peine de mort» (ECPM), «le droit à un avocat est un droit fondamenta­l consacré au niveau internatio­nal, comme dans la plupart des pays. Cependant, les pays rétentionn­istes font figure de mauvais élèves».

Dans la pratique, ce droit est souvent mis à mal : manque de temps pour les avocats de travailler sur le dossier avant le procès. «La difficulté est d’autant plus grave pour les commis d’office qui ont peu de temps pour s’entretenir avec leurs clients, leurs rémunérati­ons sont faibles», rappelle l’associatio­n. Et de préciser : «L’accès à un avocat ou avocate dans une affaire où la peine de mort est encourue fait la différence entre la vie et la mort.» Aujourd’hui, 142 pays sont abolitionn­istes en droit ou en pratique.

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