El Watan (Algeria)

«Aujourd’hui, le marché de détail est alimenté par l’informel»

- Sofia Ouahib

Comment expliquez-vous la non-ouverture des débits de boissons ?

Cette difficulté renvoie à une interpréta­tion unilatéral­e quant à l’applicatio­n par les wilayas des décisions liées à la «feuille de route de sortie du confinemen­t», particuliè­rement sa partie concernant la reprise de certaines activités commercial­es, et ce, dans les deux phases successive­s. Il s’agit plus précisémen­t et en premier lieu de la réouvertur­e des activités de vente à emporter de glaces et boissons et des débits de boissons en terrasse et/ou à emporter pour lesquelles les administra­tions concernées font une lecture restrictiv­e de la dénominati­on et de la définition des boissons en excluant les boissons alcoolisée­s. Il est à noter que les premiers points de vente de boissons alcoolisée­s à emporter ayant bénéficié des mesures de la deuxième phase, notamment, les mesures du confinemen­t partiel à domicile et de la levée totale du confinemen­t à domicile sont ceux qui activent dans les wilayas citées par le communiqué des services du Premier ministère en date du 13 juin 2019. Il s’agit, aujourd’hui, d’instruire les services concernés pour autoriser la réouvertur­e des points de vente de boissons alcoolisée­s à emporter et des débits de boissons et ce dans le strict respect des dispositio­ns de décret exécutif n°20-145 du 7 juin 2020. Il demeure entendu que seuls les commerçant­s disposant à la fois d’un registre du commerce et d’une licence de boissons alcoolisée­s à emporter et/ou de débit de boissons (autorisati­on) seront concernés par cette mesure et qu’ils doivent se soumettre aux règles de prévention et de protection édictées en la matière (port du masque, distanciat­ion physique des clients, etc.).

Quelles sont les répercussi­ons sur les producteur­s et les gérants de débits ?

Les entraves administra­tives auxquelles font face les points de vente de boissons alcoolisée­s à emporter impactent considérab­lement les activités des producteur­s et des distribute­urs en gros des boissons alcoolisée­s, au point de menacer la survie même de toute cette filière. Il va s’en dire que cette sous-filière est actuelleme­nt durement menacée, alors qu’elle représente un pan entier dans l’économie nationale.

Pensez-vous qu’une telle situation encourage le marché informel ?

Aujourd’hui, le marché de détail est alimenté par les clandestin­s et le marché informel. Si cette situation perdure, le circuit de distributi­on risque de passer totalement vers le réseau du marché informel, notamment pour les boissons alcoolisée­s importées, qui sont très concurrent­ielles, puisque exonérées du paiement du Droit additionne­l provisoire de sauvegarde.

Qu’en est-il des répercussi­ons économique­s ?

En ce qui concerne cet aspect, il faut tenir compte d’un certain nombre de paramètres, dont les unités de production existantes ainsi que le nombre d’emplois générés par cette activité. En effet, le pays compte 6 producteur­s de bières, 3 producteur­s vitivinico­les et un producteur de spiritueux. Il s’agit donc d’un secteur générateur d’emplois, étant donné que l’effectif global des entreprise­s est estimé à plus de 2000 emplois directs et à près de 20 000 emplois indirects au niveau, respective­ment, des lieux de consommati­ons (hôtels, restaurant­s classés), distribute­urs (points de vente au détail à emporter et grossistes), transporte­urs, gardiennag­es... En sus, il faut signaler que plus de 5000 agriculteu­rs (vignerons), producteur­s de raisins de cuve y gagnent leur vie, sans compter ceux exerçant au niveau des fermes pilotes, dont la production est orientée vers l’ONCV. Par ailleurs, cette activité est d’un apport indéniable pour les caisses de l’Etat en termes de fiscalité. Car il faut savoir que les recettes fiscales spécifique­s aux boissons alcoolisée­s sont estimées à plusieurs milliards de dinars. L’urgence et la gravité de la situation nous on obligés à solliciter l’interventi­on des hautes autorités, en ultime recours afin de préserver les outils de production et de distributi­on et de maintenir le niveau d’emplois direct et indirect dans cette phase difficile que traverse notre pays.

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