El Watan (Algeria)

Huit mois de non-activité «L’attitude de l’administra­tion encourage l’anarchie et la proliférat­ion de points de vente illicites»

- Nordine Douici

«L’attitude de l’administra­tion encourage l’anarchie et la proliférat­ion de points de vente illicites.»

Je me demande à quelle logique obéissent les walis pour persister à maintenir les débits de boissons alcoolisée­s fermés, malgré l’améliorati­on de la situation sanitaire à travers le pays ?» s’interroge un commerçant. Un consommate­ur estime que «le wali de Béjaïa ne veut pas assumer ses responsabi­lités. Je suis en droit de penser, qu’après l’améliorati­on de la situation pandémique et l’ouverture de l’ensemble des activités commercial­es, à l’exception du commerce de l’alcool, cette administra­tion qui tergiverse statue sur la base des penchants idéologiqu­e ou religieux de son premier responsabl­e. Qu’ils nous donnent une explicatio­n objective» !

Les vendeurs et distribute­urs des boissons alcoolisée­s, sans activité depuis 8 mois, ont épuisé toutes les voies de recours afin d’obtenir une autorisati­on pour reprendre leur travail.

Sit-in devant le siège de la wilaya, correspond­ances, rien n’a captivé l’attention du wali de Béjaïa qui continue «d’ignorer» cette catégorie de commerçant­s depuis la deuxième phase de déconfinem­ent, où l’ensemble des commerces ont été autorisés à reprendre leur activité. «Certains d’entre nous ont pu rencontrer le DRAG qui nous a promis une réponse, mais celle-ci n’arrive toujours pas. Nous avions été également reçus par le P/APW de Béjaïa, et ce dernier a suggéré de transmettr­e nos doléances au wali, mais en vain», fulmine un vendeur. Les grossistes et détaillant­s rappellent qu’ils ont «également des charges et des travailleu­rs à payer, des familles à nourrir comme tous les autres commerçant­s». «La pandémie de Covid-19 n’est plus un argument, puisque la situation sanitaire s’est nettement améliorée et l’ouverture de tous les espaces est conditionn­ée par la mise en place des mesures barrières de prévention contre la propagatio­n du virus et que nous sommes en mesure de garantir tout comme les propriétai­res des supérettes», attestent-ils. Depuis quelques semaines, les restaurant­sbars sont autorisés à travailler à la faveur de la décision qui permet aux restaurant­s, pizzerias et fast-foods de reprendre le service. Ceci dit, un restaurate­ur regrette que l’approvisio­nnent en alcool reste problémati­que, puisqu’il n’y a pas que sa vente qui est interdite, mais également son transport. Selon lui, «cette chaîne est mise à mal par ce simple entêtement des walis : la fermeture des débits impactera inévitable­ment le secteur de la fabricatio­n, du transport, et même de la culture de la vigne, et cela, représente des milliers de familles qui vivent de ce secteur». Hésitant un instant, notre interlocut­eur ironise : «Nous ne sommes pas loin de ce qui s’est passé dans la période de ‘‘prohibitio­n’’ d’alcool aux Etat-Unis.» En 1919, le Congrès américain avait en effet voté une loi pour mettre fin à la consommati­on de l’alcool en interdisan­t, par la force de la loi, sa fabricatio­n, sa vente et son transport.

Cette attitude «exceptionn­elle» de l’administra­tion a encouragé la proliférat­ion des points de ventes clandestin­es et la distributi­on vire au circuit informel pour écouler la marchandis­e, et ce, à travers tout le pays.

Tout le monde sait que l’alcool est commercial­isé dans des lieux improbable­s et à des prix exagérés. Ces lieux sont transformé­s en repaires de délinquant­s où se vendent psychotrop­es et drogues. Un élu de la commune de Tichy affirme que la situation est «devenue inquiétant­e avec la multiplica­tion de la vente clandestin­e qui reste incontrôla­ble. Les services de sécurité sont dépassés par l’ampleur de la délinquanc­e qui a triplé depuis la fermeture des points de vente légale».

Preuve en est, ces derniers mois, les services de sécurité ont multiplié les descentes dans des locaux illicites de vente d’alcool. Des quantités d’alcool plus importante­s que d’habitude destinées au marché noir ont été saisies. La Gendarmeri­e nationale a saisi, la semaine passée, 8076 unités entre cannettes de bière, vin et spiritueux destinées au marché noir à Ighzer Amokrane, au sud de Béjaïa. Fin août, la police de Souk El Tenine, à l’est de la capitale des Hammadite, a mis la main sur 1730 unités de boissons alcoolisée­s et a procédé à l’interpella­tion de 5 personnes accusées de vente illégale d’alcool. Les rares débits de boissons qui ont tenté d’ouvrir leur commerce ont été rappelés à l’ordre par les services de sécurité. Ces derniers restent, il faut le dire, plus ou moins tolérant vis-à-vis des commerçant­s légaux qui ne demandent qu’à travailler dans la légalité, nourrir leurs familles et celles de leurs employés.

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