Il y a 63 ans, le massacre de 14 Algériens à Bouhlal
En dépit d’un ciel menaçant, la cité Aïssa Harieche de Jijel a abrité, récemment, la célébration du 63e anniversaire du massacre de 14 martyrs, froidement assassinés par la soldatesque française le 21 novembre 1957. Organisée par l’association «Bouhlal Essakhra» de ce quartier de Hdjiret Ghoula, plus connu par la Crête, cette halte se veut un hommage à ces martyrs de Lazouine, situé plus bas et ce quartier, qui a vu passer par sa zaouïa plusieurs responsables de l’OS. Une exposition de photographies, de documents et de livres a été organisée pour les visiteurs. Djamal Lounis raconte dans l’ouvrage Récits de feu, des témoignages sur la guerre de Libération nationale, présentés par Mahfoud Kaddache (Sned, 1977) qu’une opération commando qualifiée de «manquée», pilotée par les chouhada Seddik Bouridah dit Bachir Lekhal et Kheiredine Khellafi, a réuni 14 volontaires pour la mener au centre-ville de Jijel contre le 2e bureau qui s’était établi de force dans la Médersa, construite par l’association des Ouléma avec les dons de la population. L’arrivée d’un capitaine à bord d’une Jeep chamboula l’opération menée en fin d’après-midi. Ce dernier s’arrêta devant le café, communément appelé aujourd’hui Saddam, où il réussit à tuer un fidaï qui l’a poursuivi. Djamel Lounis écrit qu’on «tenta de tuer» les clients du café, «mais le capitaine refusa de laisser faire ses soldats». Une heure après, un sinistre militaire, «le sergent Robert, réputé pour sa spécialisation en – torturologie» monte avec ses hommes à la Crête.
En route, au quartier Lazouine, la partie basse de l’actuelle rue Bouridah Seddik, «il tua pour commencer un vieil homme d’un coup de hache sur le crâne», avant de faire sortir tout le monde dans la rue, puis de choisir une vingtaine de personnes dont certains seront froidement assassinés. Ces martyrs avaient pour noms Boudjemaa Abdallah, Mokhtar Abdallah, Salah Affane, Mohamed Bouzida, Yacine Chelgham, Moussa Chouikh, Mokhtar Kebieche, Salah Kebieche, Abdelmadjid Kimouche, Ahmed Mechtar, Amar Messaoudene, Seddik Tabli, SmaïnTalbi et Abdellah Zekri. Deux jeunes avaient miraculeusement échappé à la boucherie en faisant le mort : Bachir Messaoudene, décédé, 59 ans, jour pour jour, après ce massacre, et Rachid Mechtar. Faisant le parallèle avec le massacre de protestants du 24 août 1572 à Paris, feu Da Salah Bousseloua intitulera un article sur ce douloureux épisode La Saint-Barthélemy de Jijel et de mentionner à la fin que le sergent Robert a été suivi lors d’une permission et abattu en France. Dans son ouvrage Erramadaniate wa ikhwatouha, le chanteur et parolier chaabi Abdelhalim Touhami rendra hommage aux 14 martyrs dans un poème en 80 vers intitulé La nuit des quatorze qui se termine par ces mots : La nuit des quatorze, mes frères/ qu’est-ce qui s’est passé à Bouhlal ?/ Pour ces trahis mes frères /Réconfortez-moi mes amis.