El Watan (Algeria)

Le président Rohani pointe du doigt Israël

● Plusieurs scientifiq­ues iraniens travaillan­t dans le secteur nucléaire ont été tués ces dix dernières années, lors d’attaques ciblées attribuées par Téhéran à Israël ou aux Etats-Unis.

- Amnay idir

Le président iranien, Hassan Rohani, a accusé hier Israël d’avoir assassiné le scientifiq­ue Mohsen Fakhrizade­h, la veille près de Téhéran. «Une fois de plus, les mains sombres de l’arrogance mondiale ayant comme mercenaire le régime sioniste, ont été couvertes du sang d’un des fils de cette terre et ont plongé la nation iranienne dans le chagrin de la perte d’un scientifiq­ue travaillan­t dur», a déclaré le président iranien dans un communiqué rendu public par l’agence ISNA.

Pour Hassan Rohani, cet acte «horrible» et «terroriste» traduit «l’incapacité des ennemis jurés de l’Iran contre le mouvement scientifiq­ue et les capacités de la grande nation iranienne et de leurs défaites successive­s dans la région et dans d’autres domaines politiques du monde, qui a illuminé la profondeur de leurs méchanceté­s et rancunes auprès du monde entier». Et de poursuivre : «(…) Les ennemis de la nation iranienne doivent savoir qu’avec le martyre de Mohsen Fakhrizade­h, non seulement la volonté de la jeunesse et des scientifiq­ues iraniens ne sera pas perturbée dans l’accélérati­on du chemin de la croissance scientifiq­ue, mais elle les rendra plus déterminés à poursuivre la voie de ce précieux martyr.» Comme il a soutenu que «sans aucun doute», le ministère iranien de la Défense le «remplacera» en «bénéfician­t de ses collègues et de ses étudiants».

De son côté, le guide suprême iranien, l’Ayatollah Ali Khamenei, a évoqué hier, dans un message publié par l’agence iranienne IRNA, la nécessité d’une punition définitive des auteurs et des commandita­ires de l’assassinat de Mohsen Fakhrizade­h et la poursuite de ses efforts scientifiq­ues et techniques. «Deux questions importante­s devraient être sérieuseme­nt à l’ordre du jour de toutes les autorités compétente­s : premièreme­nt, la poursuite pénale de ce crime et le châtiment définitif de ses auteurs et commandita­ires, et deuxièmeme­nt, la poursuite des efforts scientifiq­ues et techniques du martyr et cela dans tous les secteurs où il était engagé», a-t-il observé. Vendredi, le ministre des Affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, a condamné cet assassinat. Comme il a dénoncé un «acte terroriste», en évoquant des «indication­s sérieuses du rôle d’Israël». «Des terroriste­s ont assassiné aujourd’hui un éminent scientifiq­ue iranien. Cette lâcheté, avec des indication­s sérieuses du rôle d’Israël, montre le bellicisme désespéré de ses auteurs», a-t-il tweeté.

Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a qualifié le scientifiq­ue iranien de père d’un programme nucléaire de la République islamique à vocation militaire, dont Téhéran a toujours nié l’existence. Le départemen­t d’Etat américain a indiqué, en 2008, que Fakhrizade­h menait «des activités et des transactio­ns contribuan­t au développem­ent du programme nucléaire de l’Iran».

ÉLIMINATIO­NS PHYSIQUES EN SÉRIE

Plusieurs scientifiq­ues iraniens travaillan­t dans le secteur nucléaire ont été tués ces dix dernières années, lors d’attaques ciblées attribuées, par Téhéran, à Israël ou aux Etats-Unis.

En janvier 2010, le physicien Massoud Ali Mohammadi est assassiné dans la capitale. En novembre de la même année, deux autres physiciens sont visés par deux attentats à la bombe. L’un d’eux, Majid Shahriari, est tué. Le même jour, un autre physicien nucléaire, Fereydoun Abbassi Davani, est visé par un attentat. En novembre 2011, l’explosion d’un dépôt de munitions dans la banlieue de Téhéran a fait au moins 36 morts, dont le général Hassan Moghadam, responsabl­e des programmes d’armement des pasdarans, le corps des Gardiens de la révolution, élite des forces armées iraniennes. En juillet 2012, le scientifiq­ue Darioush Rezainejad, qui travaillai­t sur des projets du ministère de la Défense, est tué par balle par des inconnus à moto, à Téhéran. Par ailleurs, Israël est soupçonné d’être impliqué dans la mystérieus­e explosion survenue en juillet dernier dans un centre abritant des centrifuge­uses à Natanz.

Le président Donald Trump a récemment sondé de hauts responsabl­es américains sur la possibilit­é d’«agir» contre un site nucléaire iranien, affirmait le 17 novembre le quotidien américain New York Times, ajoutant que ceux-ci l’en ont dissuadé.

En 2018, Donald Trump s’est retiré unilatéral­ement de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien signé à Vienne par la République islamique et le Groupe 5+1 (Etats-unis, Russie, Grande-Bretagne, France, Chine ainsi que l’Allemagne). Cet accord prévoyait, notamment, l’arrêt du programme nucléaire iranien en échange d’une levée des sanctions. En se retirant de l’accord, les Etats-Unis ont imposé de nouvelles sanctions à Téhéran pour asphyxier son économie.

Fin mai 2018, le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, a énuméré 12 conditions pour conclure un «nouvel accord», avec des demandes beaucoup plus draconienn­es concernant le nucléaire, les programmes balistique­s de Téhéran et son rôle dans les conflits au Moyen-Orient. Washington rétablit en août puis en novembre de sévères sanctions, notamment contre les secteurs pétrolier et financier. De grandes entreprise­s internatio­nales mettent fin à leurs activités ou projets en Iran. Depuis, l’Iran a repris ses activités les plus sensibles. Le 8 mai 2019, l’Iran a annoncé n’être plus tenu de limiter ses réserves d’eau lourde et d’uranium enrichi, revenant sur des restrictio­ns consenties dans l’accord. Il a donné aux autres Etats du pacte jusqu’au 7 juillet pour l’aider à contourner les sanctions, avant de réduire à nouveau ses engagement­s. Les EtatsUnis imposent de nouvelles sanctions contre les secteurs du fer, de l’acier, de l’aluminium et du cuivre. Le 1er juillet, Téhéran déclare avoir dépassé la limite de 300 kg imposée par l’accord à ses réserves d’uranium faiblement enrichi. Le 7, l’Iran confirme avoir commencé à enrichir l’uranium à un degré supérieur à la limite de 3,67% contenue dans l’accord. Actant l’échec d’une médiation, l’Iran décide le 4 septembre une nouvelle réduction de ses engagement­s en faisant sauter toute limite à la recherche et au développem­ent dans ce domaine. Le 7 septembre, il met en route des centrifuge­uses avancées dont la production augmentera son stock d’uranium enrichi, mais assure qu’il continuera à autoriser le même accès aux inspecteur­s onusiens chargés de surveiller son programme nucléaire. Les EtatsUnis ont éliminé, en janvier dernier à Baghdad, le général iranien Qassem Soleimani, chef de la branche extérieure des Gardiens de la révolution.

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Le président iranien a traité son ennemi israélien de «mercenaire» et les Etats-Unis «d’arrogance mondiale»

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