El Watan (Algeria)

Une contre-expertise incrimine les policiers

DEUX ANS APRÈS LA MORT DE ZINEB REDOUANE À MARSEILLE (FRANCE)

- LIRE L’ARTICLE DE SALIMA TLEMÇANI

A la veille du 2e anniversai­re de la mort tragique de Zineb Redouane, une Algérienne âgée de 80, causée par un tir de grenade lacrymogèn­e, lancée par un policier, alors qu’elle se trouvait au balcon de son appartemen­t situé au 4e étage, à Marseille, une contre-expertise indépendan­te vient de battre en brèche la version officielle, privilégia­nt l’acte «accidentel» Elle fait état d’un «tir direct» et «clairement volontaire», visant la victime, ayant entraîné la mort Pour Sami Redouane, le fils de la défunte, ces conclusion­s «vont enfin permettre de poursuivre les coupables et de rendre justice».

Après deux ans de batailles judiciaire­s, les circonstan­ces de la mort de Zineb Redouane, le 2 décembre 2018, après avoir reçu une grenade lacrymogèn­e, lancée par un policier, viennent d’être élucidées par une contre-expertise, demandée par l’avocat de sa famille. Agée de 80 ans, cette Algérienne se trouvait au balcon de son appartemen­t situé au 4e étage, à Marseille, lors des manifestat­ions des gilets jaunes. Touchée en plein visage, elle a subi de graves lésions qui ont entraîné sa mort, mais l’enquête judiciaire a conclu à un tir «en cloche» c’est-à-dire non direct et «accidentel». «A l’époque, nous avions alerté l’opinion publique qui s’est mobilisée pour réclamer justice. Avec l’aide d’un député et des autorités consulaire­s, nous avons pu rapatrier le corps, après un blocage de plusieurs jours, et une fois une autopsie a été effectuée.

TRAUMATISM­E FACIAL

Les conclusion­s font état d’un traumatism­e facial suscité par le tir d’un projectile non pénétrant, pouvant correspond­re à une bombe lacrymogèn­e, directemen­t responsabl­e de l’oedème pulmonaire et la mort par aggravatio­n de l’état antérieur de la défunte. Une enquête a été ouverte par le tribunal de Dar El Beida, à Alger, et une commission rogatoire délivrée, quelques semaines plus tard, aux autorités judiciaire­s françaises, mais à ce jour, aucune réponse n’a été transmise. Nous avions déposé plainte pour ‘‘violences ayant entraîné la mort’’ et demandé le dépaysemen­t de l’enquête, arguant du fait, qu’elle n’a pas avancé durant plus de six mois, et que le policier n’a toujours pas été identifié, malgré la présence d’une caméra de surveillan­ce», déclare Sami Redouane. Il explique que «durant des mois», les autorités françaises «faisaient croire à l’opinion publique que ma mère était morte accidentel­lement, alors que l’enquête judiciaire menée à Marseille disculpait les policiers. Nous avions bataillé durement pour obtenir, au mois d’août 2019, le transfert du dossier vers le tribunal de Lyon. Les arguments présentés à la Cour de cassation se basaient sur les nombreuses photos prises le jour des faits, dans le quartier où résidait ma mère et qui montraient un magistrat du parquet de Marseille, parmi les policiers dépêchés de Saint-Etienne pour contenir les manifestat­ions des gilets jaunes.

Nous avions même déposé plainte pour ‘‘altération et soustracti­on de preuves’’ après que la caméra qui se trouvait dans l’angle de tir avait été déclarée hors service par l’enquête policière». Une première victoire, dit-il. Mais, ajoute-t-il, le 20 mai 2020, le rapport balistique a conclu à un «tir effectué selon les règles d’usage et que la grenade a atteint la victime accidentel­lement». «Pour nous, il y avait une volonté de protéger les policiers et de les disculper.» Il fallait, souligne notre interlocut­eur, «battre en brèche la première expertise dont les conclusion­s précisent que ‘‘rien ne permet d’affirmer que le tireur pouvait voir la victime, étant donné la distance et les obstacles dans son champ de vision’’» à travers une contre-expertise indépendan­te. «Avec notre avocat, nous avons fait appel à des experts qui ont pu prouver que le tir qui a visé ma mère n’était pas accidentel. Il était tendu et bien droit. L’auteur a été identifié par la vidéosurve­illance et son tir était volontaire. Rendu le 30 novembre dernier, ce rapport nous conforte dans nos conviction­s. Nous allons le joindre au dossier en espérant que l’enquête soit relancée par le tribunal de Lyon. Cela fait plusieurs mois, qu’elle est au point mort», souligne Sami Redouane. Est-ce le début de la fin de cette quête de justice ? La question reste posée.

Salima Tlemçani

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Agée de 80 ans, cette Algérienne se trouvait au balcon de son appartemen­t situé au 4e étage, à Marseille, lors des manifestat­ions des gilets jaunes. Touchée en plein visage, elle a subi de graves lésions

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