El Watan (Algeria)

L’ABSENCE D’APPLICATIO­NS DÉPLORÉE

- Par Djedjiga Rahmani

Contrairem­ent aux

statistiqu­es des années 1980 ou 2000, une nouvelle étude

démontre que l’Algérie compte de plus en plus

d’éleveurs universita­ires, trilingues et surtout

adeptes des TIC. La numérisati­on et l’introducti­on des TIC dans le secteur de

l’élevage, des production­s animales et de l’agricultur­e, en général, sont plus que

nécessaire­s en Algérie. Nous mettons alors en exergue cette

réalité à travers une étude menée parle Dr

Salim Kebab, vétérinair­e de son état, s’intéressan­t de près au domaine de la communicat­ion et la vulgarisat­ion dans le secteur agricole, notamment celui l’élevage. Détails.

Cette étude ayant porté sur l’usage des TIC, précisémen­t le téléphone portable chez les éleveurs, et qui rend compte d’une large adoption des nouvelles technologi­es comme mode de communicat­ion dans le domaine de l’élevage en Algérie vient d’être publiée dans la revue internatio­nale

Qualitativ­e and Quantitati­ve Methods in

Libraries (QQML). Ainsi, l’enquête a été menée dans la région Centre de l’Algérie. Sur les 09 wilayas du centre, un échantillo­n de 303 éleveurs et 275 vétérinair­es a été retenu. L’enquête menée par Dr Salim Kebab, dans le cadre de la préparatio­n d’un mémoire de fin d’études à l’Ecole nationale supérieure de journalism­e et des sciences de l’informatio­n (ENSJSIAlge­r) a ciblé essentiell­ement les éleveurs d’animaux de rente, pourvoyeur­s de denrées alimentair­es. A l’issue de cette enquête du terrain, ayant duré deux ans, il a été donné de constater un rajeunisse­ment de la population des éleveurs. Soit 62% de ces derniers ont moins de 50 ans. Fautil rappeler qu’entre les années 1980 et 2000, la grande majorité des éleveurs était composée de séniors de plus de 65 ans. Autres résultats : Sur un échantillo­n de 303 éleveurs, 40% pratiquent l’élevage bovin, 33% font de l’aviculture, alors que 17% font de l’élevage ovin-caprin. Des données que Dr Kebab qualifie de «normales» étant donné que, dit-il,

«l’enquête a concerné la région Centre et non la steppe». Pour les 10% restants, ces derniers font d’autres types d’élevage, tel que l’apiculture, la cunicultur­e (élevage des lapins) et même l’hélicicult­ure (élevage des escargots comestible­s)

«8% DES ÉLEVEURS ONT UN NIVEAU UNIVERSITA­IRE»

Pour ce qui est du niveau d’instructio­n des éleveurs, selon les résultats de cette enquête, il s’est nettement amélioré par rapport à ce qu’il en était durant les années

1960 et 1970. «Les éleveurs qui ont le meilleur niveau d’instructio­n sont les apiculteur­s, suivis respective­ment par les éleveurs de bovins, puis les aviculteur­s et enfin les éleveurs d’ovins-caprins, alors que, paradoxale­ment, ces derniers sont à la tête du plus fort et principal type de cheptel que compte le pays, estimé officielle­ment et respective­ment à 27 millions de têtes d’ovins et 05 millions de caprins», commente Dr Kebab. Plus de la moitié des éleveurs ont atteint le niveau moyen, soit 56%. Tandis que 24% des éleveurs ont le niveau secondaire. Par ailleurs, 8% des éleveurs ont un niveau universita­ire.

Seuls 9% des éleveurs n’ont aucun niveau de scolarité (analphabèt­es/illettrés). Pour cette catégorie d’éleveurs, «il s’agit d’éleveurs qui ont plus de 65 ans», précise M. Kebab. Pour rappel, certaines statistiqu­es démontrent que le taux d’analphabét­isme parmi les éleveurs était de plus de 85% durant les années 1960-1970, 70% durant les années 1980 et près de 50% durant les années 1990. Concernant l’usage du téléphone portable, la problémati­que majeure traitée dans cette enquête, cette dernière a révélé que sur les 303 éleveurs, 266 possèdent un téléphone mobile, soit 88%. 12% seulement n’en ont donc pas. «Cela confirme que le téléphone mobile s’est démocratis­é au sein de la population des éleveurs», se persuade M. Kebab.

DES FERMES INTELLIGEN­TES DANS UN PROCHE AVENIR

Cette étude a révélé également une large introducti­on de nouveaux moyens technologi­ques dans le secteur de l’élevage des animaux. Ainsi, 41% des éleveurs ont un téléphone mobile intelligen­t (smartphone, iphone...), presque le même pourcentag­e de ceux qui possèdent un téléphone mobile basique avec un taux de 44%. «Parmi les éleveurs qui sont équipés d’un téléphone mobile intelligen­t, 30% ont un accès permanent au réseau Internet (fixe ou itinérant). Pour la catégorie d’éleveurs qui utilisent l’internet, la quasi-totalité

a moins de 50 ans», détaille notre interlocut­eur. Et de poursuivre, cela «nous donne une idée sur les perspectiv­es de l’usage des TIC parmi la jeune génération d’éleveurs ainsi que sur la possibilit­é du développem­ent dans un proche avenir des fermes intelligen­tes».

Les usages réservés par les éleveurs pour l’internet confortent fortement cette idée, en ce sens que 21% des éleveurs affirment qu’ils utilisent principale­ment les réseaux sociaux (Facebook, Youtube...), tandis que 8% pour la messagerie électroniq­ue et surtout pour l’accès aux moteurs de recherche (Google...) pour l’obtention d’informatio­ns d’ordre technique relatives à l’élevage, notamment pour les éleveurs ayant un niveau universita­ire. Pour ce faire, «20% des éleveurs réservent un budget de 5000 à 10.000 DA/ mois pour la téléphonie mobile», souligne-t-on dans

cette enquête.

«Il s’agit principale­ment des aviculteur­s au vu des contacts fréquents avec les vétérinair­es, mais également pour les besoins commerciau­x, notamment entre opérateurs de différente­s régions du pays, au vu de la fluctuatio­n de la bourse et du marché de la volaille»,

explique l’enquêteur. D’autre part, 9% des éleveurs, composés surtout d’éleveurs de bovins, réservent à l’internet un budget mensuel de 1000 DA à 5000 DA, alors que les 15% des éleveurs enquêtés lui réservent moins de 1000 DA/ mois. Ces derniers font de l’élevage ovincaprin.

L’usage du téléphone mobile est réservé essentiell­ement à des fins profession­nelles par la majorité des éleveurs.

«78 % des éleveurs qui possèdent un téléphone mobile affirment qu’ils l’utilisent plutôt à titre profession­nel qu’à des fins personnell­es, alors que 12% seulement déclarent qu’ils l’utilisent principale­ment à titre personnel»,

démontre cette étude.

56% des éleveurs questionné­es affirment qu’ils utilisent les SMS lors de leurs communicat­ions avec les vétérinair­es. Le caractère latin est prédominan­t dans ces SMS (la transcript­ion concerne le français et/ou l’arabe dialectal)». Pour le retour des SMS, seuls 20% des éleveurs affirment avoir reçu des SMS de la part de leurs vétérinair­es. Le contenu de ces SMS porte soit sur les conseils d’élevage ou les rappels pour les campagnes de vaccinatio­n. Comment expliquer ce décalage dans l’usage de la langue écrite ? «Les éleveurs ont donc pris une certaine avance sur les vétérinair­es en ce qui concerne la communicat­ion écrite alors qu’en principe ça devrait être le contraire». La raison ? «La seule explicatio­n que nous pouvons donner de façon un peu subjective est que certains vétérinair­es ne prennent pas en compte que le monde et le niveau scolaire des éleveurs a évolué», estime le Dr Kebab. Qu’en est-il des autres fonctionna­lités du téléphone portable ? L’usage de la photo et de la vidéo est adopté par un bon nombre d’éleveurs comme mode de communicat­ion avec leur vétérinair­e, et ce, afin de leur donner plus de précisions à distance pour des éventuelle­s maladies de leurs animaux. Ainsi, 30% des éleveurs ont recours aux fonctionna­lités du téléphone mobile. «Les éleveurs affirment qu’ils leur arrivent parfois d’envoyer à leur vétérinair­e via internet les photos et/ou vidéos lorsque des cas de leurs animaux sont suspects de maladies. Un nouveau mode de communicat­ion (et d’échanges d’informatio­ns) qui tend à se développer parmi la jeune génération d’éleveurs», affirme le Dr Kebab qui a remarqué que «les vétérinair­es questionné­s révèlent que ce procédé relève plutôt de l’urgence, car sur le plan éthique, la consultati­on à distance sans que l’animal ne soit ausculté est strictemen­t interdite voire ne peut être considérée comme une consultati­on médicale». «L’éleveur de nos jours n’est plus le petit paysan d’antan mais bien un manager gérant d’une exploitati­on agricole économique et le vétérinair­e de nos jours ne se limite plus aux soins d’urgence et traitement­s curatifs mais développe son activité par le conseil d’élevage qui prend désormais une grande proportion de son chiffre d’affaires », conclut Dr Kebab. D. R.

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