El Watan (Algeria)

Un rapport de l’OIT alerte sur une forte pression sur les salaires

- N. B.

La pandémie Covid-19 a fortement impacté le tissu économique, notamment les petites et moyennes entreprise­s dont nombreuses ont fait faillite et des millions de travailleu­rs ont perdu leur emploi.

Un autre impact négatif de la Covid-19 a été recensé dans un nouveau rapport établi par l’Organisati­on internatio­nale du travail (OIT), et qui concerne les salaires. Alors que le fossé était déjà grand avant la crise sanitaire, entre la croissance des salaires et celle de la productivi­té, l’écart a largement grandi provoquant un déclin des revenus. De nombreuses entreprise­s ont réduit les salaires des employés du fait du manque d’activité et parfois même ont opéré des mouvements de compressio­n d’effectifs. «La crise qui frappe l’économie et le marché du travail en raison de la Covid-19 a touché des groupes vulnérable­s, menaçant ainsi d’aggraver les inégalités et de pousser de nombreuses familles dans la pauvreté», souligne le rapport de l’OIT en notant que le salaire minimum adéquat fixé par les gouverneme­nts peut jouer un rôle important en vue de maintenir un niveau de revenu décent. «Il est susceptibl­e de protéger les travailleu­rs contre une baisse en spirale de leurs revenus à des niveaux beaucoup trop faibles, de freiner un accroissem­ent encore plus fort de la pauvreté et des inégalités et de contribuer à la stabilité économique et à la relance». Avant la crise, le nombre de travailleu­rs touchant une rémunérati­on correspond­ant au salaire minimum en vigueur dans leur pays ou bien inférieure à ce salaire était de 330 millions, soit 20% des salariés au niveau mondial. Depuis la crise, ce chiffre pourrait avoir augmenté et le «on ne pourra vraiment se rendre compte du véritable impact sur le salaire moyen en 2020 que lorsque les instituts nationaux de statistiqu­es publieront leurs nouvelles estimation­s dans le courant de l’année ou même plus tard».

MOUVEMENT SUPERFICIE­L

Selon l’OIT, le premiers chiffres montrent que dans certains pays, par exemple aux EtatsUnis, les revenus moyens ont fait un bond au niveau des statistiqu­es, mais il s’agissait d’un mouvement largement superficie­l reflétant les pertes en emplois moins biens rémunérés au sein de l’économie. «Lorsque les travailleu­rs à bas revenu se retrouvent au chômage, le salaire moyen reflète alors les salaires des travailleu­rs au niveau de revenus plus élevés qui gardent leur emploi», note le rapport. Dans d’autres pays, les subvention­s publiques ont permis de sauver des emplois et donc de garder stables les salaires. Le salaire minimum existe dans 90% des pays membres de l’OIT, mais 29 pays excluent les travailleu­rs agricoles ou domestique­s de la réglementa­tion du salaire minimum, ce qui expose ces catégories sociales à subir plus gravement la crise. «L’économie informelle compte deux milliards de travailleu­rs dans le monde, y compris 724 millions de travailleu­rs salariés et de personnel temporaire, beaucoup d’entre eux étant payés moins que le salaire minimum. Il faut donc adjoindre à ce dernier des mesures visant à accroître la productivi­té et à faire passer les travailleu­rs informels au sein de l’économie formelle», plaide l’OIT. De même que la fixation d’un salaire minimum à un niveau adéquat prenant en compte les besoins des travailleu­rs et de leurs familles ainsi que les facteurs économique­s, et ce, afin de réduire la pauvreté et les inégalités. Durant l’année en cours, le gouverneme­nt algérien avait pris la décision de supprimer l’IRG des salaires inférieurs à 30 000 DA en sus d’augmenter de seulement 2000 DA le SNMG qui est passé de 18 000 DA à 20 000 DA. Des mesures qui ont été critiquées par les syndicats qui les ont qualifiées de faibles, car ne suffisant pas à répondre aux besoins des travailleu­rs faiblement rémunérés. Le parallèle entre la croissance annuelle du salaire minimum réel et celle de la productivi­té du travail entre 2019/2020 montre qu’en Algérie les salaires sont loin de correspond­re à l’effort des travailleu­rs. Dans un classement établi par l’OIT, l’Algérie qui arrive en bas du classement en Afrique applique une croissance négative de -2,6% du salaire minimum contre une croissance annuelle de la productivi­té estimée à 0,6%. Selon l’OIT, le salaire minimum doit faire l’objet d’un ajustement de manière régulière. «Dans les dix ans qui ont précédé la crise, seuls environ 70% des pays pour lesquels nous disposons de données ont procédé à une augmentati­on de la valeur réelle de leur salaire minimum», indique encore le même rapport en avertissan­t que dans un avenir proche, les conséquenc­es de la crise Covid sur l’économie et sur l’emploi devraient imposer une forte pression à la baisse sur les salaires, d’où l’obligation de renforcer le dialogue social sur les salaires. «Procéder à des ajustement­s bien équilibrés passera par la sauvegarde des emplois et, en même temps, par la protection des revenus des travailleu­rs et de leurs familles afin de soutenir la demande et d’éviter de se retrouver dans une situation de déflation… Le dialogue social peut contribuer à s’assurer que chacun reçoive sa juste part des fruits du progrès…», conseille l’OIT.

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