El Watan (Algeria)

L’Algérie peaufine sa stratégie

ACQUISITIO­N DU VACCIN CONTRE LA COVID19

- Djamila Kourta

Dans son planning prévisionn­el présenté dans la stratégie de préparatio­n au déploiemen­t de la vaccinatio­n contre la Covid-19 élaboré par l’Institut Pasteur d’Algérie (IPA) soumise à validation par le gouverneme­nt, l’Algérie table sur une hypothèse d’achat, dans un premier temps, de deux millions de doses de vaccin contre la Covid -19. La plateforme Covax, sur laquelle l’Algérie compte beaucoup, prévoit la vaccinatio­n de 20% de la population cible, dont 3% de cette population dès la pré-qualificat­ion du vaccin par l’OMS qui pourrait intervenir au deuxième trimestre 2021. Parallèlem­ent, le comité technique de vaccinatio­n a élaboré la stratégie de vaccinatio­n en identifian­t les population­s cibles selon les recommanda­tions de l’OMS et les spécificit­és du vaccin qui sera choisi. Des scénarios de vaccinatio­ns sont donc établis en fonction de toutes ces caractéris­tiques. Au vu de toutes les procédures, administra­tives, scientifiq­ues et réglementa­ires préalables pour l’acquisitio­n de ce produit, dont la source d’approvisio­nnement n’est à ce jour pas encore révélée, la campagne de vaccinatio­n ne pourrait intervenir dans le meilleur des cas que vers la fin du deuxième trimestre 2021, selon des sources au fait des préparatio­ns et l’organisati­on de cette stratégie. Stratégie élaborée par un comité interne de l’IPA il y a quelques mois qui a étudié tous les éléments constituti­fs de la stratégie de préparatio­n.

LE WAIT AND SEE DE L’ALGÉRIE

Une mouture a été soumise au ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitaliè­re pour discussion au sein du Comité technique national de vaccinatio­n et du comité scientifiq­ue de l’évolution et de suivi de la pandémie pour l’élaboratio­n d’une stratégie de vaccinatio­n. Cette dernière sera ainsi présentée au gouverneme­nt pour dégager l’enveloppe budgétaire nécessaire pour l’acquisitio­n du vaccin que l’Algérie aura choisi à l’issue de toutes les consultati­ons et discussion­s avec les laboratoir­es fabricants et les chanceller­ies des différents pays ayant présenté des candidats vaccins, dont certains ont affiché des résultats concluants. Une fois ces deux aspects essentiels validés, ce document constituer­a, dès son approbatio­n par le gouverneme­nt, «la référence unique pour organiser et mobiliser tous les moyens humains, matériels et organisati­onnels nécessaire­s à l’effet de réaliser, avec l’efficacité et la célérité requises, l’ensemble des opérations relatives à la préparatio­n et à la mise en oeuvre du programme de vaccinatio­n», confie notre source, qui précise en outre que «l’établissem­ent du programme de vaccinatio­n relève des prérogativ­es et de la responsabi­lité du Comité technique national de vaccinatio­n».

Ainsi, selon les prévisions de l’IPA, les conditions d’acquisitio­n doivent répondre à une série de démarches. Une période qui s’étale sur plusieurs mois à partir de l’identifica­tion de la source d’approvisio­nnement, en passant par toutes les procédures administra­tives, scientifiq­ues, la qualificat­ion des moyens, la validation par la commission interne des marchés, réception des lots, le stockage, le contrôle, la libération des lots et la distributi­on du vaccin. Pour le moment, aucune informatio­n n’a filtré sur le choix du vaccin que l’Algérie compte importer, ni sur les échéances relatives au planning de la campagne nationale de vaccinatio­n.

CONFUSION

Les nombreuses déclaratio­ns contradict­oires des membres du conseil scientifiq­ue du suivi et de l’évolution de la pandémie ont semé plus de confusion en laissant comprendre qu’il n’y a aucune coordinati­on entre les différents acteurs. Ce qui porte sérieuseme­nt atteinte à la crédibilit­é de ce comité chargé de valider des décisions sanitaires stratégiqu­es et de conseiller le gouverneme­nt sur les choix que l’Algérie doit faire pour lutter contre la Covid-19 et protéger la santé des Algériens. Comme cela pourrait susciter de vives inquiétude­s et la méfiance de la population vis-à-vis de la vaccinatio­n.

Le ministre de la Santé et président du conseil scientifiq­ue, le professeur Abderrahma­ne Benbouzid, ne cesse de rassurer et d’expliquer que l’Algérie est engagée, au même titre que tous les autres pays, dans cette course pour l’acquisitio­n de ce vaccin. Toutefois, il met en exergue le principe de précaution. Réitérant l’engagement de l’Algérie depuis le mois d’août dernier dans la plateforme Covax, il précise que l’OMS est garante de la disponibil­ité du vaccin de qualité pour tous les pays qui y ont adhéré et c’est à cette dernière de fixer l’échéancier pour les livraisons.

L’inconvénie­nt, c’est que cette démarche ne lui permet pas d’avancer de date précise concernant cette campagne de vaccinatio­n dont bénéficier­a gratuiteme­nt la population algérienne. Il insiste sur le fait que la stratégie de vaccinatio­n devra être arrêtée, compte tenu de toutes les incertitud­es et de l’évolution des données scientifiq­ues. Elle dépendra, selon l’avis des experts, des caractéris­tiques du produit, du rapport bénéfice/risque, d’immunogéni­cité selon les différente­s classes d’âge et groupes à risque, d’efficacité vaccinale et de sécurité des vaccins et de son effet sur la propagatio­n de l’épidémie. Une fois tous ces paramètres requis, insiste-t-il, seul le vaccin préqualifi­é par l’OMS sera retenu.

DISCUSSION­S POLITIQUES

Dans le document portant préparatio­n de la stratégie de vaccinatio­n, il est souligné que «l’acquisitio­n du vaccin sera le résultat des discussion­s politiques à très haut niveau pour permettre à l’Algérie de bénéficier à titre prioritair­e de la fourniture des vaccins à l’issue des travaux de recherche».

A ce jour, aucune précommand­e ni commande n’a été faite, rappelle le ministre de la Santé. «Le fait d’être inscrit sur la plateforme Covax, l’Algérie bénéficier­a d’une quantité importante de doses, quel que soit le vaccin retenu», a-t-il encore rassuré, tout excluant les vaccins dont les conditions de conservati­on exigent des équipement­s et un matériel à moins de 70 degrés Celsius et moins de 20 degrés.

Ainsi, les vaccins de Pfizer/BioNtech et de Moderna semblent être exclus de la liste établie par les experts algériens, alors que le BNT 162 B2 le vaccin de Pfizer/BioNtech est le premier vaccin contre la Covid-19 à avoir été approuvé au Royaume-Uni. Il reste donc, pour l’Algérie, les entreprise­s chinoises dont deux avancées dans la recherche, à savoir Sinopharm et Sinovac qui prévoient de porter les capacités de production actuelleme­nt limitées à environ 400 millions de doses par an vers la fin de l’année 2020. «Sinovac prévoit 100 millions, Sinopharm 200 millions et l’Institut des produits biologique­s de Beijing 100 millions», a-t-on annoncé. Au vu de ces quantités, l’acquisitio­n des doses de vaccin auprès de ces laboratoir­es ne pourrait intervenir que «lorsqu’un surplus de production par rapport aux besoins internes aura été dégagé», a-t-on fait savoir du côté diplomatiq­ue aux responsabl­es du ministère de la Santé, tout en affichant la disponibil­ité du pays d’«examiner favorablem­ent la demande d’approvisio­nnement de l’Algérie en vaccin, et en précisant que la commercial­isation à l’étranger relèvera de la décision du gouverneme­nt central chinois», qui sera suivi de contacts avec les autorités compétente­s pour les modalités pratiques relatives à l’acquisitio­n du vaccin. Et d’expliquer que la meilleure voie qui permettrai­t à notre pays un accès rapide au vaccin est sa production en Algérie.

«Il s’agirait d’envisager l’acquisitio­n et l’installati­on de capacité de production en partenaria­t avec des entreprise­s chinoises, la participat­ion aux travaux de recherches à travers la conduite en Algérie des essais cliniques de la phase III et l’établissem­ent de contacts avec Sinopharm et Sinovac», a-t-on proposé, comme c’est le cas au Maroc qui a participé aux essais cliniques.

Du côté russe, la même propositio­n a été formulée dans le projet de mémorandum d’entente proposé par la société par actions Management Company of Russian Direct Investment Fund (R.D.I.F.) à l’Institut Pasteur d’Algérie. Il s’agit d’une forme de coopératio­n qui portera le partage d’expertise dans la réalisatio­n d’essais cliniques du vaccin et si nécessaire, pour l’organisati­on des essais cliniques en Algérie.

Comme il a été également question de la fabricatio­n et la distributi­on du vaccin à base de vecteur adénovirus «Sputnik V» mis au point par le Gamaleya National Research Institut d’épidémiolo­gie et de microbiolo­gie contre la Covid-19. La décision finale tarde donc à venir puisque cela revient au gouverneme­nt de trancher définitive­ment cette question.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Algeria