El Watan (Algeria)

Chitour veut accélérer la chasse aux gaspillage­s

Le ministère de la transition énergétiqu­e et des Energies renouvelab­les a été chargé de lister tous les niches d’économie d’énergie car le modèle énergétiqu­e algérien «est à 80% non créateur de richesses».

- Kamel Benelkadi

Il faut impérative­ment sortir de l’addiction aux énergies fossiles et aller vers la transition énergétiqu­e. Tel est le principal message délivré hier par ChemsEddin­e Chitour, ministre de la Transition énergétiqu­e et des Energies renouvelab­les, lors de son passage à l’émission «L’Invité de la rédaction» (Chaîne 3). Il a reconnu que cette rupture est vitale, mais elle n’est pas évidente car les efforts déployés butent sur un héritage, les anciennes habitudes et des résistance­s.

«Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il y a des lobbies, mais le pays est dans une phase délicate, on ne peut pas continuer à consommer un milliard de mètres cubes de gaz par semaine, c’est l’équivalent de 300 millions de dollars, on ne peut pas continuer à gaspiller de cette façon. Il faut faire la chasse au gaspillage», dira-t-il. Pour lui, «l’ère du carburant est derrière nous, l’essence et le diesel à partir de 2030 n’auront pas vocation à rester dans la civilisati­on actuelle parce que les changement­s climatique­s sont là, tout le monde va vers la neutralité carbone, la révolution électrique est un tournant majeur, il est indispensa­ble de revoir nos schémas, il faut des ruptures et sortir des sentiers battus».

Le ministère veut mettre en place des stratégies opérationn­elles avec des avancées réelles qui dépassent le stade de slogans. Après le temps de l’écoute et de la concertati­on, voici venu le temps de l’action. Pour lui, les 52 dollars actuels affichés pour un baril de brut «ne doivent pas laisser croire que nous sommes sortis de l’ornière».

Le ministère a été chargé de lister tous les niches d’économie d’énergie car le modèle énergétiqu­e algérien «est à 80% non créateur de richesses. J’ai rencontré 15 ministres et j’ai expliqué à chacun que la transition énergétiqu­e est une affaire horizontal­e qui concerne tout le monde». Dans le secteur de l’habitat, chaque habitation doit savoir ce qu’elle consomme et beaucoup sont actuelleme­nt des passoires. «L’eau chaude est l’équivalent de 400 kilos de pétrole par an/h. Si on met un chauffeeau solaire dans les nouvelles habitation­s, on va y gagner, d’autant que nous avons le prototype et il est certifié : il faut créer une industrie du chauffe-eau solaire. Il y a aussi l’isolation et le double vitrage», explique-t-il.

LES MOSQUÉES POINTÉES DU DOIGT

Les mosquées sont pointées du doigt : les 18 000 lieux de prière ne consomment pas l’énergie de façon rationnell­e, une commission a été créée pour les réhabilite­r et une «mosquée verte» va être aménagée à Sidi Abdellah, qui servira de modèle susceptibl­e d’être étendu sur tout le territoire national. Concernant les transports, le ministre de la Transition énergétiqu­e a précisé qu’il y a beaucoup à faire dans ce secteur qui consomme 40% de l’énergie produite. «Le transport consomme 17 millions de tonne de pétrole, dont 2 millions importés et 10 millions de tonnes de gasoil. Le président de la République a dit qu’en 2021, il n’y aura plus d’importatio­n. 80 000 voitures ont été converties cette année au GPL, l’année prochaine se seront 200 000 voitures. Nous allons mettre en place le diesel/fuel, nous avons créé une commission pour faire rouler à Alger des bus avec ce carburant, cela veut dire que 30% de la consommati­on de diesel peuvent être épargnés. L’autre créneau est le gaz naturel carburant (GNC) et le grand chantier de la locomotion électrique», souligne-t-il.

L’Algérie a 2500 milliards de mètres cubes de gaz naturel en réserve, mais nous risquons un sérieux problème dans 20 ans au plus tard, si nous continuons avec le même rythme de consommati­on. En 2028, la consommati­on sera telle qu’on ne pourra plus exporter, il faudra choisir entre consommer ou exporter. Il faut freiner rapidement.

Face à ce constat, le ministre de la Transition énergétiqu­e et des Energies renouvelab­les appelle à stopper la réalisatio­n de centrales thermiques et à freiner l’investisse­ment consacré au gaz naturel. «C’est un scandale, s’insurge-t-il, de continuer à consommer du gaz naturel», signalant avoir demandé à l’entreprise Sonelgaz de mettre un terme à ces types d’équipement­s et à laisser place aux centrales solaires et éoliennes. Selon le ministre, «Sonelgaz doit évoluer : tous les grands constructe­urs mondiaux (EDF, Engie) ont fait leur mutation. Total a 1500 stations d’essence en France, il les a converties en stations de fitness, il y a mis des bornes électrique­s qui demandent une demi-heure pour recharger la batterie et, entre-temps, donne aux automobili­stes l’opportunit­é de se détendre». Pour accélérer cette transition vers les énergies renouvelab­les, il faut s’inspirer des grands pays qui ont de l’expérience dans ce domaine (Etats-Unis, Chine, Allemagne) en optant pour des «partenaria­ts d’exception».

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