El Watan (Algeria)

L’arrivée de déchets italiens illégaux fait craindre une affaire de corruption

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Comment les poubelles d’une région du Sud italien sont-elles arrivées en bateau en Tunisie, pays déjà en difficulté avec ses propres déchets ? La question fait rage alors que la saisie de centaines de conteneurs laisse supposer une vaste affaire de corruption. Depuis que des douaniers du port de Sousse, ville de l’est de la Tunisie, ont saisi 70 grands conteneurs, puis 212 autres au début de l’été, la douane et le ministère de l’Environnem­ent se renvoient la balle. Des têtes ont commencé à tomber : dimanche soir, le ministre de l’Environnem­ent, Mustapha Aroui, a été limogé. Aucun motif officiel n’a été fourni, mais cette décision est bien liée à l’affaire des déchets, a affirmé à l’AFP une source gouverneme­ntale sous le couvert de l’anonymat.

La justice a pris le relais hier, avec l’interpella­tion de 12 personnes, à savoir Mustapha Aroui lui-même, des cadres des douanes et un directeur de l’Agence nationale de recyclage des déchets (Anged), a indiqué le porte-parole du tribunal de première instance de Sousse (est), chargé de l’affaire, Jabeur Ghnimi. Les cargaisons mises en cause contenaien­t des déchets ménagers. Elles ont été importées par une entreprise locale, Soreplast, quelques semaines seulement après que cette société en sommeil a relancé ses activités, avec pour seule autorisati­on de recycler des rebuts plastiques industriel­s destinés à l’exportatio­n.

Les déchets ménagers sont interdits à l’exportatio­n par la législatio­n tunisienne et les convention­s internatio­nales, qui les jugent «dangereux». Cette affaire semble illustrer les ramificati­ons du commerce illégal des déchets, qui augmente face au durcisseme­nt des normes européenne­s et à la réticence grandissan­te de l’Asie, longtemps dépotoir des déchets occidentau­x.

Dans un rapport en août, Interpol a alerté sur l’augmentati­on considérab­le des chargement­s de déchets plastiques illégaux depuis 2018. Un phénomène d’autant plus préoccupan­t que les infrastruc­tures tunisienne­s ne permettent pas au pays de surmonter ses propres besoins : seuls 61% des déchets de la capitale sont collectés, selon un rapport récent de la Banque mondiale, et la majorité aboutit dans des décharges à ciel ouvert. R. I.

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