Les jeunes «touchés» par le sort des Ouïghours surtout sur les réseaux sociaux
Pourquoi cette cause plutôt qu’une autre ? De nombreux jeunes Français sont bien en peine de l’expliquer, mais ils se passionnent pour le sort des Ouïghours depuis des mois, même avant que la cause ne fût portée par de célèbres footballeurs. C’est par son professeur d’histoire-géographie qu’Akim Djibril, alors âgé de 15 ans, a pris connaissance en 2019 de la sévère répression dont fait l’objet, en Chine, cette minorité ethnique de langue turcique et majoritairement musulmane. Après, «je me suis documenté, sur le site d’Amnesty international, à travers des reportages. J’ai vu des images de prisonniers regroupés, des témoignages de parents qui n’avaient pas vu leurs enfants depuis des années. Cela m’a beaucoup touché», «indigné» même. «Nul sur Terre ne devrait subir de telles violations de leurs droits». Pour «agir», Akim choisit ce thème l’année dernière pour un concours de plaidoirie des lycéens, puis participe à une soirée de solidarité organisée par l’Institut ouighour d’Europe (IODE). Etait présent notamment l’eurodéputé français Raphaël Glucksmann qui, en se faisant le chantre de cette cause, est devenu la coqueluche de nombreux jeunes. «La vidéo de cette soirée a été postée sur Instagram et a été vue par des milliers de personnes», souligne le jeune homme. Car si pour lui un cours a été le déclencheur, beaucoup ont découvert les Ouïghours via les réseaux sociaux, sur lesquels s’expriment des personnalités considérées d’influence, comme Alix, une star de téléréalité, des rappeurs, footballeurs... Dernier en date, Antoine Griezmann, dans un geste fort, a annoncé sur Instagram rompre son partenariat avec le chinois Huawei. Sur Instagram et Youtube, réseaux des jeunes, ou même Twitter, le sujet passionne. «Des
milliers de questions» ont été adressées sur ce thème au média en ligne Brut pour une récente interview du président Macron. Une vidéo sur «l’horreur des camps
en Chine», mise en ligne sur Youtube le 4 décembre par «Le roi des rats», totalisait le 15 décembre quelque
660 000 vues. Matteo (pseudonyme), 18 ans, étudiant, militant de Youth for Climate, découvre les Ouïghours via les réseaux, «leur enfermement, leur exploitation pour de grandes marques». Avec ses amis de YFC, ils décident l’été dernier de cibler de grandes marques de prêt-à-porter : ils épinglent sur les vêtements de
fausses étiquettes : «Ce produit a été conçu par des esclaves ouighours (...)» ; «-50% sur une vie. (...) Acheter c’est être complice du génocide». «Ça s’inscrit dans notre action. On a toujours dénoncé le +fast fashion+, l’exploitation des personnes racisées. Ca ne prenait pas vraiment mais là, oui. (...) Beaucoup de personnes musulmanes sont venues nous dire que c’était super ce que l’on faisait. Des salariés des magasins nous soutenaient», affirme-t-il. «Sur mon téléphone, ça défilait (sur) les Ouïghours. J’ai regardé et vu la souffrance, le travail forcé, les enfants kidnappés, les musulmans obligés de manger du porc et de boire (de l’alcool)», raconte aussi Kalash MQS, un rappeur de 21 ans, originaire du Congo et musulman. Il «se sent
obligé de faire passer un petit message». Ce sera un
clip, «sans phrases explicites, seulement avec des paraboles, pour pousser les gens à chercher, s’intéresser». Pourquoi ce sujet et pas les Rohingyas par
exemple ? «Je ne sais pas ; ça m’a touché...» De nombreux rappeurs ont pris fait et cause, comme par exemple Médine, qui avait déjà consacré un titre aux Rohingyas de Birmanie.