CARRIÈRES : DES ACTIVITÉS ET DES ATTEINTES
Dans la région de Constantine, la situation est un peu plus compliquée, vu que cette wilaya est classée parmi les premières à l’échelle nationale en matière d’activité minière. En 2019, selon les chiffres officiels, la wilaya comptait 101 carrières, dont 90 sont exploitées par le privé. Les nuisances générées par l’exploitation de ces champs à ciel ouvert étaient nombreuses, notamment les vibrations suite à l’utilisation des explosifs, les nuisances sonores, le trafic des camions mobilisés sur place, les rejets de poussière dans l’air, l’atteinte à la faune et la flore, la dégradation des sols, le gaspillage de l’eau et probablement une contamination des eaux de surface ou souterraines. La liste semble très longue ! Systématiquement, l’écosystème est agité, même si la majorité des carrières à Constantine est implantée en dehors du tissu urbain. Une partie de la population était victime de ces risques, dont plusieurs habitants se sont plaints en 2019 auprès de la direction des mines. Ce constat inquiétant a poussé, donc, les autorités locales à agir à la fin de l’année écoulée. La direction de l’industrie et des mines de la wilaya de Constantine avait organisé, en décembre 2019 et en collaboration avec la direction de l’environnement, une journée d’études sur «Les effets des activités
minières sur l’environnement». Lors de cette journée, le secrétaire général de la wilaya de Constantine, Saïd Akhrouf, avait adressé un ultimatum de 6 mois aux opérateurs du secteur minier. Ce délai incontestable exige des intervenants concernés de se conformer à la loi, en établissant des audits sur l’impact de l’exploitation des carrières et les techniques préventives à adopter.
QUE PRÉVOIT LA RÉGLEMENTATION ?
Cet ultimatum est un aveu cru des responsables, que ces carrières exerçaient depuis des années dans le non-respect des lois. L’ouverture d’une carrière n’est pas un projet anodin et doit faire l’objet d’une enquête menée par les autorités compétentes afin que l’exploitant bénéficie d’un permis comme stipule le décret exécutif n°18-202 du 5 août 2018 fixant les modalités et les procédures d’attribution des permis miniers. Le même texte exige dans la plupart des dossiers standards de demandes de permis miniers «une étude d’impact sur
l’environnement» ou «une étude
des dangers». Cependant, cette loi n’a jamais pu être mise en oeuvre sur le terrain par les nombreux opérateurs de cette activité, dont la protection de l’environnement est leur dernier souci. Le nombre des carrières se pliant à l’ultimatum du secrétaire général de la wilaya était faible. Durant l’année en cours, la direction de l’environnement a inspecté 87 carrières, dont uniquement 10 étaient conformes en matière de traitement des poussières. Les mêmes services ont décidé la fermeture de deux champs et ont adressé des mises en demeure pour 29 exploitants. Ils ont également établi des recommandations pour 24 carrières. «Nous leur avons donné un délai jusqu’à la fin de l’année. Ces exploitants seront obligés de se conformer à la réglementation d’ici l’année 2021 et nous inspecterons encore une fois les lieux, pour vérifier s’ils ont appliqué les normes. Il y a également 4 carrières qui sont en phase d’étude et 5 autres ont été trouvées fermées», nous a déclaré une inspectrice de la même direction.
BRUMISATION POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT
La brumisation est un nouveau système d’abattage recommandé par les autorités locales, mais il est boudé par plus de 90% des exploitants des carrières, selon un expert de brumisation interrogé par
El Watan. «Pour se débarrasser de la poussière, les exploitants utilisent l’arrosage de l’eau par pulvérisation. Cette ancienne méthode n’est pas efficace pour la protection de l’environnement, la santé des travailleurs et celle des habitants. Cela, sans oublier les grandes quantités d’eau gaspillées», a expliqué notre interlocuteur, en précisant que la technique de la pulvérisation consomme plus d’eau, à titre d’exemple environ 1000 l/h, contrairement à la brumisation qui est plus économique. Selon ses dires, la brumisation permet d’utiliser 100 l/h. Le même expert souligne que les exploitants rejettent cette nouvelle technique, à cause de son coût, sans prendre en considération la diminution de la qualité du produit à force d’utilisation de l’arrosage. «Ces anciennes méthodes altèrent la qualité du produit, fragilisent le sol et le rocher à force d’être toujours humides. Ce n’est pas performant. Cependant, la brumisation garde le sol et les matériels secs. Même pour le coût, ça leur revient au même prix. Il faut se pencher vers ses nouvelles techniques qui protègent
l’environnement», a-t-il détaillé.
En dépit de l’existence de plusieurs textes réglementaires, la propagation anarchique des activités minières un peu partout dans le pays continue de faire des siennes, causant d’irréparables préjudices à l’environnement. Elles se sont multipliées ces dernières années, malgré la baisse de la production enregistrée depuis 2017.