Une responsabilité partagée
Le décevant parcours de la sélection U20 au tournoi UNAF Tunis 2020, qualificatif à la phase finale de la catégorie qui sera organisée par la Mauritanie en 2021, a fait réagir le directeur technique national (DTN), Amer Chafik, et son adjoint Abdelkrim Benaouda, après le flot de critiques qui se sont abattues sur le sélectionneur de la catégorie et les joueurs. Les deux responsables de la DTN ont avancé leurs arguments pour «expliquer» les raisons de la contre-performance de la sélection. Une partie de leur argumentaire est juste et il a été mis en avant sur ces colonnes le lendemain de la décevante première sortie contre la Tunisie (1-1), à savoir le peu d’intérêt accordé aux jeunes catégories par les dif- férentes parties en charge de ce volet (clubs, ligues). Là dessus, ils ont raison. Mais là où ils se sont écartés en partie du sujet, c’est lorsqu’ils ont évoqué la qualité des pelouses, le manque de préparation, les conditions difficiles dans lesquelles la sélection a préparé le rendez-vous de Tunis en raison du coronavirus. Cet argumentaire, même s’il est en partie recevable, ne doit pas occulter le fait que toutes les équipes étaient dans la même situation. Pire, la Libye est dans une situation plus difficile que les autres pays.
Il appartient à la structure en charge du volet technique de faire l’analyse la plus large possible de cet échec, c’en est un, pour tirer les enseignements utiles, rectifier le tir et aller de l’avant. Il y a probablement beaucoup à dire sur l’aspect technique qui a entouré le choix initial des joueurs, la qualité et le niveau de la préparation, les options tactiques choisies, la stature des adversaires. Tous ces paramètres concourent dans la réussite ou l’échec d’une équipe. Les deux arguments vont de pair dans l’analyse globale d’une performance. Occulter l’un d’eux ne fera pas avancer la recherche objective d’un succès ou d’un échec. Se remettre en cause perpétuellement est le meilleur moyen d’avancer. Concernant la responsabilité des instances et organes du football (clubs, ligues, fédération), personne ne peut nier le haut degré de responsabilité de celles-ci dans l’échec patent et renouvelé des sélections de jeunes depuis trois ou quatre décades, pour ne pas faire de mécontents. La politique à la petite semaine, qui consiste à monter une sélection à l’approche d’une compétition continentale, n’est pas la meilleure approche. La fédération, les ligues et les clubs assument une grande responsabilité dans l’échec renouvelé des catégories de jeunes. La première n’a jamais disposé des moyens à même de lui permettre d’asseoir une vraie politique en direction des jeunes. Elle a toujours été limitée dans ses prérogatives et moyens dans le sens où les infrastructures ne sont pas à la hauteur des vrais besoins pour le développement de la discipline. Tant que le schéma actuel – un stade par commune pour plusieurs clubs – n’évolue pas, il est illusoire de prétendre à des lendemains qui chantent. Ce chapitre est de la responsabilité des pouvoirs publics.
Les ligues ne sont pas exemptes de reproches. Elles sont un acteur important. Parfois, elles se dérobent à leurs responsabilités en assumant que les prérogatives d’établir le calendrier du championnat et la programmation des rencontres de jeunes très souvent disputées sans la présence d’arbitres. Ne parlons pas du scandale qui a éclaté cette saison au sujet des petites catégories, qui n’ont pas été engagées, ni des matchs qui n’ont pas eu lieu sans que des ligues ne trouvent à redire. Que dire alors de ces matchs de jeunes qui n’ont pas eu lieu en raison de l’absence d’un médecin, d’une ambulance alors que les jeunes attendaient ce jour de match avec impatience. Des responsables et dirigeants de clubs accordent-ils l’importance voulue aux petites catégories ? Pas toujours. Eux aussi ont des contraintes qui les poussent à agir ainsi. Les pouvoirs publics, qui sont les garants de la protection des petites catégories à travers les moyens, subventions, qu’ils accordent aux clubs pour financer ce secteur névralgique, ont souvent démissionné de cette lourde responsabilité.
Donc, tous les acteurs, à des degrés différents bien sûr, assument une responsabilité dans ce qui arrive aux jeunes depuis des lustres. Saber Bensmain et les jeunes du crû 2020 sont plus victimes que responsables de ce qui est arrivé à Tunis.