Une paella à Koléa
Quel est l’endroit à 30 kilomètres d’Alger où l’on peut croiser 3 ex-ministres, un ex-chef de gouvernement, un ex-wali d’Alger, deux journalistes célèbres et des dizaines de militants, un ex-chef du GSPC, un tueur de Président, 8 émirs et 200 djihadistes de Daech ? C’est la prison de Koléa, qui concentre sur 18 hectares tout ce beau monde, Abderrezak El Para, Khalida Toumi, Boumaârafi, Khaled Drareni et Anis Rahmani, Houda Feraoun, Zoukh et Sellal malgré l’annonce de son déplacement à El Menia, annulé sans explications. C’est Rachid Nekkaz, en détention préventive depuis 1 an à Koléa, qui, il y a quelques jours, a proposé de l’argent afin que «tous les détenus puissent manger deux fois par semaine de la viande ou du poulet et un dessert par jour, comme en France» avant l’indépendance, en gros «ce qu’avait demandé le FLN», viande ou poulet et yaourt «pour les 19 000 prisonniers politiques des geôles françaises». On
connaît donc l’origine du fameux problème de yaourt, Ouyahia, qui en a abusé, était d’ailleurs à la prison de Koléa jusqu’à son déménagement dans le désert, sans dessert, ce qui ne règle pas ce problème de fond : les indépendantistes algériens sous la France avaient donc un meilleur traitement alimentaire que les simples militants aujourd’hui condamnés pour une phrase ou un rassemblement ? Centre pénitentiaire pourtant moderne, inauguré en 2015 dans le cadre du vaste programme présidentiel d’une cellule pour tous, la prison de Koléa avait très mal démarré puisque dès 2016, le journaliste Mohamed Tamalt y trouve la mort en décembre dans des conditions suspectes, premier journaliste à mourir en détention depuis l’indépendance, après avoir été incarcéré pour «offense au Président», l’ex Président bien sûr, qui a offensé tout un pays. C’était la question du jour, avec ces arrestations massives, qui sera le prochain mort dans les prisons algériennes ? Avec cette autre, comment le porte-parole du gouvernement va-t-il le justifier ? Il n’avait pas sa carte de cantine ?