El Watan (Algeria)

2021, l’année de tous les défis

- Nadjia Bouaricha

Après une année difficile marquée par une crise sanitaire sans précédent et une chute drastique des prix du pétrole, l’Algérie

s’engage dans une nouvelle année avec un nombre de défis à relever et beaucoup d’incertitud­es. La combinaiso­n Covid-19-chute des prix du pétrole a eu raison de ses capacités financière­s, creusant un déficit budgétaire déjà béant. L’année 2021 sera celle du bilan postpandém­ie Covid (si le vaccin arrive à y mettre un terme), et celle du principal défi de mettre de l’ordre dans les comptes publics, et trouver de nouvelles sources de financemen­t pour remettre du carburant dans la machine économique.

Dans les indicateur­s macroécono­miques de la loi de finances 2021, le gouverneme­nt avance un déficit global du Trésor d’un niveau abyssal de l’ordre de 17,6% du PIB, soit 3614,4 milliards de dinars, c’est-à-dire 28,26 milliards de dollars. «Un record historique pour notre pays et il y a une poignée de pays, souvent en guerre, qui ont un tel déficit», alertait récemment sur les colonnes d’El Watan l’expert Nour Meddahi. Le niveau des dépenses budgétaire­s se situera en 2021 autour de 8113 milliards de dinars face à des recettes fiscales s’établissan­t à 5328 milliards de dinars. Il est difficile d’imaginer qu’avec un tel niveau de déficit arriver à atteindre une croissance économique positive, surtout que le niveau des dépenses est en constante augmentati­on, notamment celles du budget de fonctionne­ment. La loi des finances 2021 prévoit une croissance optimiste de 4%, alors que les activités économique­s étaient pratiqueme­nt à l’arrêt durant l’exercice qui s’achève et il faudrait quelques années pour pouvoir rattraper tout le retard occasionné. Même le secteur des hydrocarbu­res n’affiche pas des résultats encouragea­nts pour combler les déficits de la balance des paiements. La croissance du PIB hors hydrocarbu­res s’est établie à 2,4%, alors que le PIB des hydrocarbu­res a reculé de 4,9%. Le Fonds monétaire internatio­nal avait établi le taux de croissance à -5,5% en 2020 et tablait en octobre dernier sur un taux de croissance de 3,2% en 2021 (un taux révisé nettement à la baisse par rapport à ses prévisions en juin dernier où le FMI prévoyait un taux de croissance de 6,2% 2021). Le FMI, qui n’a pas encore rendu publiques des projection­s plus récentes pour l’économie algérienne, a indiqué, en octobre dernier, que la baisse de l’activité économique se poursuivra au cours de l’année avec un creusement du déficit du compte courant à -16,6% du PIB en 2021(-15,7% selon la Banque mondiale) accompagné d’une hausse du taux de chômage (14,1% en 2020 et 14,3% en 2021). Les autorités du pays sont aux prises avec une crise multiforme, avertit la Banque mondiale pour sa part. Dans son rapport sur la conjonctur­e économique en Algérie, l’institutio­n de

Breton Woods a noté que les mesures de confinemen­t ont ralenti gravement l’activité économique et la forte baisse des prix et de la demande mondiale d’hydrocarbu­res a réduit encore davantage la rente. «Une action rapide pour réduire le double déficit et des réformes structurel­les visant à favoriser une croissance tirée par le secteur privé sont devenues plus urgentes», conseille la BM. Selon les projection­s de cette institutio­n financière, le PIB devrait se contracter de 6,5% en 2020 avant de marquer un rebond en 2021 estimé à 3,8% et de 2,1% en 2022. La BM préconise qu’en l’absence de recettes budgétaire­s conséquent­es et le refus de l’emprunt extérieur, un assainisse­ment budgétaire à moyen terme sera nécessaire. De même que la dépréciati­on forte du dinar (entre 5 et 10%) par rapport à la monnaie étrangère (dollar et euro) détériorer­a les termes des échanges de l’Algérie et accélérera l’épuisement des réserves, puisque un redresseme­nt plus rapide des importatio­ns plutôt que les exportatio­ns de pétrole est attendu. Le niveau des réserves des changes pourrait même baisser jusqu’à 23 milliards de dollars à la fin 2021 posant les termes d’une crise de change. A noter que la loi de finances 2021 a établi les comptes publics sur la base d’un prix de référence du baril de 40 dollars. La situation n’est donc pas très réjouissan­te et le temps du bricolage et des rafistolag­es est révolu. L’occasion de sortir du système stérile de la rente est plus qu’urgente, le moment est venu pour l’Algérie comme pour beaucoup d’autres pays du monde qui ont été fortement impactés par la crise sanitaire et financière, de savoir vivre selon ses moyens et de diversifie­r ses apports financiers. Ne plus compter que sur les hydrocarbu­res, développer des ressources inépuisabl­es, faire appel aux compétence­s qui trouveront les réponses adéquates pour sortir des blocages, et donner enfin les moyens aux entreprise­s de s’autonomise­r et de créer de la richesse. Le changement ne viendra pas du statu quo mais du mouvement, de la volonté de préserver un pays qui recèle de nombreuses richesses mais ne sait pas les exploiter. De l’avis des experts et observateu­rs, face aux défis géopolitiq­ues qui s’imposent à l’Algérie à l’heure actuelle, la sécurité du pays passe par la victoire du projet démocratiq­ue et par l’engagement de réformes économique­s profondes.

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 ??  ?? Au-delà de l’efficacité du vaccin contre à la Covid-19, l’économie algérienne reste suspendue aux cours du baril du pétrole
Au-delà de l’efficacité du vaccin contre à la Covid-19, l’économie algérienne reste suspendue aux cours du baril du pétrole

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