Droit et libertés, victimes de la Covid
La lutte contre la pandémie dans le monde en 2020 a restreint les libertés, fragilisé leurs défenseurs. Elle favorise le glissement de l’Etat de droit occidental vers un nouveau modèle plus autoritaire. En Guinée, le gouvernement a interdit toute manifestation jusqu’à nouvel ordre, en invoquant la lutte contre la Covid-19. Alpha Condé a été investi mi-décembre président pour un troisième mandat en présence d’une dizaine de chefs d’Etat africains, après la répression de manifestations de l’opposition qui ont fait des dizaines de morts depuis fin 2019. Au Nigeria, les violences policières et militaires dans la foulée des mesures sanitaires ont fait plusieurs morts. Pendant ce temps à Singapour, des systèmes de traçage ont permis de suivre les citoyens de manière individualisée, sous prétexte de lutte antiCovid. La Bolivie a reporté ses élections générales de plusieurs mois, pour cause de pandémie. En France, les citoyens ont dû pendant des semaines remplir une attestation pour pouvoir sortir de chez eux. Fin novembre, «plus de la moitié des pays du monde (61%) avaient adopté des mesures de lutte anti-Covid inquiétantes du point de vue de la démocratie et des droits humains», selon l’ONG International Idea. En avril déjà, Michelle Bachelet, Haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, mettait en garde : «Vu la nature exceptionnelle de la crise, il est clair que les Etats ont besoin de pouvoirs supplémentaires», mais «la situation d’urgence sanitaire risque de devenir une catastrophe des droits de l’homme». L’ONG américaine Freedom House estime pour sa part que «les conditions démocratiques et les droits humains se sont détériorés dans 80 pays». Elle dénonce les gouvernements qui en ont profité pour faire taire les critiques et démanteler les contre-pouvoirs, comme le Sri-Lanka, «illustration de la tendance générale», selon elle. «Au cours des derniers mois, le président (Gotabaya Rajapaksa) a consolidé son pouvoir.»