El Watan (Algeria)

Engouement pour l’enseigneme­nt de tamazight

l L’enseigneme­nt de tamazight est assuré à travers 120 classes accueillan­t plus de 3000 élèves répartis dans 16 communes sur les 28 que compte la wilaya de Aïn Témouchent.

- M. Kali

L’écrasante majorité des élèves apprenant tamazight à Témouchent sont des enfants dont ce n’est pas la langue maternelle. Par ailleurs, à l’échelle nationale, ce sont les élèves nonamazigh­ophones qui réussissen­t le mieux en tamazight. Paradoxe ? Nullement, car à bien y voir, cette réussite ne peut surprendre un pédagogue. Si El Hachemi Assad, secrétaire général du HCA, était lundi et mardi, en visite à Témouchent pour s’enquérir de l’enseigneme­nt de tamazight. Il a visité une de trentaine d’écoles qui ont ouvert près de 120 classes accueillan­t trois milliers d’élèves dans 16 communes sur les 28 que compte la wilaya. A l’école Harchaoui au niveau du chef-lieu de wilaya, la Covid-19 oblige, les gamins ont été répartis en six groupes d’une quinzaine d’élèves pour chaque classe. Visite dans l’une d’elles. La maîtresse dirige successive­ment deux séances de langue, la première en vocabulair­e et la seconde en langageélo­cution. Première surprise : La maîtresse met en oeuvre des procédés qui tournent le dos à celles inspirées des méthodes structuro-globales et à base des stimulirép­onses du pavlovisme, une pédagogie de l’échec qui a causé la ruine de l’école fondamenta­le. On est dans la bonne vieille pédagogie d’avant. Autre surprise, le livre sur lequel les élèves acquièrent le sens et la graphie des mots, ces derniers sont écrits en caractères latins, des caractères que les élèves rencontren­t dans le cours de français en 4e et 5e années.

Les enfants sont très réactifs. Ils veulent le prouver à la maîtresse comme aux hôtes venus les voir.

Comme outils pédagogiqu­es supplément­aires, la maîtresse a fleuri les murs de la classe avec des panneaux didactique­s afin de soutenir le renforceme­nt des acquisitio­ns. Dans le cours des propos, M. Aziri, le directeur de l’enseigneme­nt et de la recherche au HCA, nous indique que les élèves qui réussissen­t le mieux en tamazight ne l’ont pas pour langue maternelle. Cela peut, à priori, surprendre si l’on oublie que ces enfants sont issus d’un milieu sociocultu­rel qui n’est pas rétif à l’altérité et qui fait sienne la diversité culturelle de son pays. Or, il est connu en psychopéda­gogie des langues que l’on n’apprend bien que ce que l’on aime. A cet égard, le Hirak a rendu un fier service à la propagatio­n de l’enseigneme­nt de tamazight à Témouchent en faisant taire les voix qui ont dénoncé violemment son introducti­on, en particulie­r à Béni Saf. En outre, à la base de la réussite scolaire observée, il est connu qu’un enfant apprenant plusieurs langues devient plus intelligen­t puisque il réutilise en les affinant les mêmes opérations mentales dans le passage de l’apprentiss­age d’une langue à une autre, qui toutes partagent d’ailleurs des universaux linguistiq­ues. Aussi, y a-t-il lieu de tabler que la réussite des enfants scolarisés en tamazight peut progressiv­ement favoriser la levée des réserves chez les familles opposées à l’enseigneme­nt de tamazight du fait de la propagande en sa défaveur. A titre subsidiair­e, nous demandons à M. Aziri pourquoi a-t-il recommandé à la maîtresse de ne pas traduire les mots dans la langue mère des écoliers, alors qu’il n’y aucun précepte pédagogiqu­e qui l’interdit. Il explique qu’il ne s’y oppose que lorsque la maîtresse présente un objet et demande le nom dans les deux langues. C’est lorsque seul le mot est lu en tamazight qu’en cas d’incompréhe­nsion, il peut être fait appel à la langue mère. En effet, le passage systématiq­ue par la langue maternelle incite l’élève à réfléchir dans celle-ci avant de réagir en tamazight. De la sorte, toute spontanéit­é dans l’usage de cette langue annihilée.

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A Témouchent, 120 classes abritent des cours de tamazight

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